De l’intelligence de l’homme préhistorique

Par Dr Pierre-Florent Hauvillier


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LES DESSOUS DE LA PRÉHISTOIRE

Résumé : L’idéologie évolutionniste s’est imposée comme « la » composante incontournable pour la compréhension de la paléontologie et de la préhistoire humaine. Il s’ensuit que l’image de l’humanité préhistorique est analysée et interprétée à travers un prisme réducteur qui en altère la réalité. On considère l’homme préhistorique comme un être émergeant de l’animalité (Homo habilis) pour devenir un « Homo erectus », en se différenciant de ses congénères simiesques par un redressement qui le mènera à la marche bipédique. Il évoluera en « Homo sapiens » (avec l’Homme de Neandertal), puis deviendra véritablement homme « Homo sapiens sapiens » tel celui de Cro-Magnon. Pourtant, sous la pression de multiples découvertes, il apparait de plus en plus que l’homme préhistorique était doté d’une intelligence semblable à la nôtre, ce qui est incompatible avec la théorie d’une évolution progressive qui considère qu’« un type anthropologique particulier ne peut correspondre qu’à un degré d’intelligence et de développement culturel précis ». On s’efforcera ici de porter un regard objectif sur l’intelligence manifestée dans les   sociétés primitives dites préhistoriques.


             Après la Renaissance, on a commencé à classer les mammifères en y incluant au sommet l’homme de race blanche. L’homme-sauvage, où la race noire était incluse, n’était pas considéré comme totalement homme mais comme une sorte d’hybride entre l’homme et le singe, animal intelligent, ce qui, du même coup, justifiait l’esclavage. Jusqu’au XIXème siècle, l’africain noir s’est ainsi trouvé classé près de l’orang-outang, lequel précédait l’homme dans le classement des encyclopédistes.

En 1613, de Razilly, capitaine dans la Marine Royale, offrit, en « présent de curiosité », au roi de France Louis XIII, âgé de douze ans, six indiens du Brésil.

Toute la Cour et tout Paris venait les voir danser tout empanachés de leurs plumes au son des tam-tams. Le roi comprit très vite que c’était des hommes à part entière mais de race différente ; il les fit baptiser et tint à être leur parrain. Les malheureux indiens ne survécurent pas longtemps ; ils moururent de maladie quelques mois après leur arrivée.

Le grand Voltaire – toujours encensé pour son souci de vérité, de justice et de tolérance – émargeait parmi les actionnaires des armateurs de la traite des noirs et parlait de ces derniers dans son « essai sur les mœurs et l’Esprit des Nations » ( tome XI ) comme étant des « animaux-singes », précisant doctement que des nègres et des négresses transplantés dans d’autres pays y « produisent toujours des animaux de la même espèce ».

Il fallut attendre 1792 pour que l’anatomiste hollandais Petrus Camper démontre dans ses études anthropométriques d’anatomie comparée, à partir de l’angle facial, que la race noire était bien une race humaine à part entière, donnant ainsi des bases scientifiques aux mouvements antiesclavagistes, ce qui hâta l’abrogation de l’esclavage.

Plus tardivement, mais dans la même lignée, Jules Ferry (1832-1893), à l’Assemblée Nationale, pour justifier l’intervention coloniale de son gouvernement parlait « du droit des races supérieures sur les races inférieures » et au sujet des exécutions perpétrées (1885) par l’armée française à Madagascar, déclarait « les Hovas sont une race à moitié sauvage, comme les vendéens étaient hier des sous-hommes[1] ».

Ces déclarations sont presque contemporaines de l’Exposition Universelle de Paris, en 1878, au cours de laquelle nous retrouvons une lamentable illustration du point de vue de Jules Ferry. Quatre indiens alakalufs[2], deux hommes et deux femmes, kidnappés en Patagonie[3], furent exhibés comme curiosité exotique, au titre d’anthropophages, derrière les barreaux d’une cage pour « protéger le public » au Parc des Expositions du Champ de Mars. En 1879, ils seront exposés au zoo de Hambourg, dans un enclos où ils moururent rapidement. Tout cela dans l’indifférence des Sociétés philosophiques et humanistes de l’époque.

En fait, le concept de l’évolution humaine hantait l’esprit des Lumières et de la Révolution française, une évolution qui ne se ferait pas toujours au même rythme selon les races. Charles Darwin y mettra un peu d’ordre et le revêtira d’un vernis scientifique.

Cependant, au XIXème siècle, si ces hommes primitifs étaient considérés comme des sous-produits, ou plutôt des ébauches de l’humanité moderne, qu’en était-il des hommes fossiles ou archaïques que l’on commençait à découvrir, dans les fouilles du Périgord en particulier ? L’époque était très reculée et tout indiquait que ces hommes n’étaient pas encore « totalement humains », puisqu’ils vivaient dans des cavernes…

On pourrait envisager la question autrement: plutôt que définir un archaïsme ou une modernité de l’homme préhistorique en fonction d’un certain «délit de faciès », ne serait-il pas plus efficace d’appréhender cette « modernité » en fonction de son intelligence, c’est-à-dire, en pratique, des restes de son activité qui nous sont parvenus?

Voyons d’abord comment se composerait la galerie de portraits de famille de nos ancêtres telle que la préhistoire officielle (évolutionniste comme il se doit, il n’y a pas d’alternative) nous la classifie.

Galerie des portraits de famille de nos ancêtres ( évolutionniste)

  • Paléolithique inférieur : de 3 millions d’années à 300.000 ans avant notre ère, évoqué par les doux noms de « oldowoyen, chelléen, acheuléen, micoquien, clactonien ». Ce serait le chemin vers l’humanisation de nos soi-disant ancêtres simiesques.
  • Paléolithique moyen: de 300.000 à 30.000 ans avant notre ère. C’est l’ère de la première humanité, avec l’Homme de Neandertal, représentée par le moustérien et le tayacien.
  • Paléolithique supérieur: de 30.000 à 12.000 ans avant notre ère. L’homme de Cro-Magnon en est le plus connu et le plus représentatif. C’est l’ancêtre direct de l’homme moderne.

Comme aucun système de datation fiable ne permet de hiérarchiser les découvertes selon leur ancienneté, le classement s’effectue en fonction de la profondeur des trouvailles dans les couches stratigraphiques qui sont comparées entre les sites. L’âge de ces couches est attribué en fonction d’une chronologie évolutive estimative artificielle, laquelle ne repose sur aucune base scientifique.
       La période Cro-Magnon entre dans la fourchette d’une datation possible par le carbone 14, mais sans qu’il soit possible de vérifier si l’âge mesuré correspond à quelque réalité, faute d’échantillon de référence. Aussi, est-il ajouté une autre estimation de date, avec l’examen des objets découverts : moins c’est humain, donc plus rustique, plus c’est ancien ; et plus c’est élaboré et pensé, plus c’est récent[4]. Tout cela permet une hiérarchisation des dates entre -30.000 et -12.000 ans.

LE PALÉOLITHIQUE INFÉRIEUR

Il concerne la population « pré-humaine ». Un spécialiste des chimpanzés s’exprimant à la TV[5] déclarait: « L’Homme et le Singe ont 99% de gènes en commun, le 1% représente 40 millions de mutations: 2O millions pour l’Homme et 20 millions pour le singe ». Ce 1% avec ses 20 millions de mutations concernant la lignée humaine couvrirait la période du paléolithique inférieur, période au cours de laquelle l’homme va émerger[6]. Autrement dit, l’événement est si vieux qu’il ne nous en reste rien ou pas grand chose. En fait, dans ce groupe on y mélange tout et n’importe quoi, du moment qu’on puisse évoquer une possible humanisation. On y incorpore des restes osseux de toute nature ainsi que tous cailloux qui semblent présenter des traces d’intervention pré-humaines. Ainsi, le micoquien (-300.000 ans, correspondant au gisement de La Micoque, près des Eyzies-de-Tayac, à quelques encablures de la Vézère), n’est qu’un amoncellement sur plusieurs mètres de sédiments contenant des restes osseux, de dépôts de toute sorte en fait accumulés par les débordements de la rivière à la fin des glaciations.

Or on sait (cf. Le Cep n° 3, p. 41) que les galets taillés attestant d’une ancienne présence pré-humaine avaient été apportés par une main malhonnête au début des fouilles, il y a un siècle. Que reste-il d’attribué à l’activité humaine de cette époque ? Rien ou trois fois rien. Ce ne sont que spéculations de préhistoriens sur la rusticité des traces lithiques dont les datations ne reposent sur rien de matériel.

La période, s’étendant de -3.000.000 à – 300.000 ans, se verra attribuer toute industrie lithique grossière et enfouie. On y met l’Homo habilis, vers 2,5 millions d’années, dont va dériver l’Homo erectus, environ 1 million d’années plus tard, âge supposé du début de l’humanisation.

À gauche: l’Homo habilis; à droite: l’Homo erectus:

Crâne attribué à l'Homo habilis,
Galets aménagés

Fig. 1 : Crâne attribué à l’Homo habilis  Fig. 2 : Galets aménagés

               (en grisé : ce qui est reconstitué)

Ainsi en est-il des galets « aménagés »[7] (simples galets sur lesquels on aurait donné des coups.de taille rustique (fig. 2).

Les spécialistes ne sont d’ailleurs pas d’accord entre eux: pour les uns, cette forme mal dégrossie serait due à la main de l’Homo erectus dans ses premières tentatives de taille, tandis que pour d’autres plus pragmatiques, il n’y aurait pas d’intervention humaine, mais seulement l’œuvre de la nature. Ils seront datés arbitrairement, selon la chronologie imposée, vers un million d’années. La période du paléolithique inférieur se terminant vers -300.000 ans, les paléontologues vont donc situer vers la fin de cette période tout ce qui aurait porté une quelconque trace d’intervention humaine certaine: les premiers outillages et une arme rustique comme l’épieu (dont bien sûr aucun n’a été retrouvé !). La maîtrise du feu, dans cette fresque de l’évolution humaine, sera donc un peu antérieure : -400.000 ans. L’outillage lithique (bifaces[8] et hachereaux[9]), laissant supposer une trace d’intelligence différenciant l’homme de l’animal par un début d’esprit d’abstraction avec une intention du geste, se verra donc daté vers -300.000 ans (outillage lithique levalloisien). Il marque la fin du paléolithique inférieur, s’ouvrant sur l’ère du paléolithique moyen de l’Homme de Neandertal (quand l’Homo erectus est devenu humain). En effet, les premiers bifaces, galets taillés sommairement (choppers), traduisent la réalisation d’un plan intellectuel, de par le choix du matériau, l’enlèvement de l’éclat sur une face, la maîtrise d’un angle de frappe précis pour obtenir un produit fini.

On le voit, la chronologie de la paléontologie humaine du paléolithique inférieur et la datation de l’activité humaine ou pré-humaine n’est effectuée qu’en fonction de l’évolutionnisme: plus l’Homo erectus s’est différencié du singe, c’est à dire qu’il s’humanise, plus son outillage se perfectionne[10].

Galet aménagé?

Fig. 3 : « Galet aménagé  » ?

(En fait œuvre de la nature et non de l’Homo erectus)  

           

Chopper

              

               Fig. 4 : Chopper  (le premier biface) 

    

PALÉOLITHIQUE MOYEN

Cette période s’étend de -300.000 à -35 ou -30.000 ans et concerne l’Homme de Neandertal. Elle commencerait donc au « levalloisien », présentant un outillage rustique qui va se perfectionner, et s’achève avec la disparition de l’Homme de Neandertal.

L’anatomie du Néandertalien

Ce descendant de l’Homo erectus est représenté en France principalement par le moustérien et le tayacien (sites éponymes voisins de quelques kilomètres). Le premier néandertalien[11] fut découvert en 1856, dans un boyau d’argile. La reconstitution de cet homme fossile archaïque avait d’abord été affublée d’une queue et d’un museau de rongeur avant d’être « modernisée », en 1909, suite à la découverte de nouveaux squelettes (fragmentaires), par le Pr Marcellin Boule (1861-1942).

Il en fit un homme-singe, une espèce de brute sortant à peine de l’animalité (comme le montre en fig. 6 l’illustration réalisée selon ses conseils), quitte à modifier (ou plutôt trafiquer) le montage du crâne de l’homme de La Chapelle-aux-Saints (premier exemplaire de squelette complet de l’Homme de Neandertal), pour lui donner un aspect simiesque évident.

Caloote crânienne trouvée à Néandertal

Fig. 5 : Calotte crânienne de l’homme trouvé à Neandertal 

Homme de la Chapelle-aux Saints- selon Boule

Fig. 6 : Homme de La Chapelle-aux-Saints (1909) selon Boule

Considéré comme homme-fossile, donc disparu, Neandertal fut le mal aimé de la préhistoire, longtemps représenté comme une espèce de brute mal dégrossie, peinant à sortir de son animalité. D’habitude, on le représente velu et avec des membres plutôt graciles mais aux articulations puissantes, courbé en avant avec de long bras, et les pieds ayant le gros orteil préhensile comme ceux des singes (c’est-à-dire avec une fonction identique à celle du pouce). On le dit de petite taille.

En réalité, l’observation des squelettes complets retrouvés nous indique une stature humaine normale et une taille d’environ 1,65 m (moyenne des tailles adultes connues, établie sur moins de 10 individus, donc non représentative). Le crâne présente des différences avec celui de son successeur du paléolithique supérieur que l’on qualifie d’archaïque : le volume en est plus important que le nôtre, bien que sa forme soit plus allongée. Les arcades sourcilières sont plus développées et contribuent à donner au front un aspect fuyant. L’arrière du crâne présente une légère proéminence occipitale osseuse surnommée « chignon néandertalien ».

Connu comme homme fossile, on avait supposé qu’il s’était éteint 5 à 10.000 ans avant  l’apparition sur les mêmes lieux de Cro-Magnon, notre ancêtre direct (période appelée aussi hiatus diluvien). Maintenant, on lui fait côtoyer le même Cro-Magnon pendant quelque 5.000 ans, ce qui ne va pas sans difficultés car aucun métissage n’a été constaté et que Cro-Magnon n’est pas fossilisé. La disparition subite de Neandertal demeure donc un mystère et chacun y va de sa spéculation, alors que l’examen attentif de la destruction de son habitat et des lieux où il avait été retrouvé le montre, pour qui sait les lire, enfoui sous les stigmates du Déluge.

Actuellement, sous la pression de nouvelles trouvailles (quelque 120 squelettes au total, dont seulement quelques-uns sont complets), on a fini par s’accorder pour dire que, si nous le croisions dans la rue, nous ne le remarquerions peut-être pas. Les faits sont têtus, même si les préhistoriens évolutionnistes ont freiné des quatre fers cette modernisation qui s’imposait.

Néandertal représentation de 1950

Fig. 7 : Neandertal (représentation datant de 1950)

Néandertal représentations actuelles
Néandertal représentations actuelles

Fig. 8 : Neandertal (représentations actuelles)

L’intelligence abstractive

Lorsque le Neandertal est évoqué dans la littérature préhistorique, c’est en général du « Moustérien » dont il s’agit[12], de loin le plus connu[13], et que son outillage élaboré fait classer arbitrairement parmi les néandertaliens tardifs.

Nous savons maintenant que l’Homme de Néandertal possédait une véritable vie sociale, inhumant ses défunts dans de petites fosses creusées au même endroit, ce qui exclut un nomadisme complet comme mode de vie habituel. Cela est confirmé par le site de La Ferrassie (près des Eyzies-de-Tayac) qui contenait des sépultures d’adultes, d’enfants et d’un adulte âgé et paralysé (ce dernier élément a été retrouvé récemment car il avait été caché, sur ordre de Marcelin Boule, par celui qui dirigeait les fouilles, notre trafiqueur de La Micoque). Ce site permet de conclure que Néandertal avait du respect pour les anciens, même handicapés, ainsi que pour les défunts. Tout ceci indique une notion de spiritualité. Nous savons de plus (par le site du Regourdou, tout près de Lascaux, cf. Le Cep n° 4 & 13), qu’il savait construire des murs de pierres sèches, qu’il avait des rites funéraires et des rites religieux (culte de l’ours [14]), qu’il savait travailler et sculpter la pierre et qu’il possédait une intelligence abstractive et une vie sociale.

Son outillage ne nous est que parcimonieusement parvenu, car tous les objets petits et légers se sont disséminés et ce qui était en bois a pourri, mais il nous a laissé des outils comme des poinçons à tête, des épingles en os mais aussi des pics en bois de cervidé ou en côte de grand herbivore, ce qui laisse supposer qu’il travaillait déjà la terre. Il possédait aussi une bonne maîtrise de la taille des silex de type « Levallois », c’est à dire un débitage laminaire fait avec précision et une maîtrise technique basée sur une préparation particulière du nucléus (bloc de matière première taillée pour en débiter des éclats), à l’aide d’un percuteur.

C’est ainsi qu’il nous a laissé des grattoirs, des pointes à dos, des lames à dos et des burins sur dos.

Quelques objets mobiliers retrouvés (blocs et os gravés) et des éléments de colliers (pendeloques, dents, anneaux en os) laissent apercevoir qu’il avait des préoccupations artistiques.  

Dans le rite funéraire du Regourdou, il avait remplacé les tibias du défunt, par ceux d’un ours, allongeant le corps sur un gros bloc de pierre saupoudré d’une couche d’ocre et recouvert de fleurs, avant de l’entourer d’une cinquantaine de tombes d’ours reliées entre elles par une série de murets de pierres sèches.

Nucléus et éclats levalloisiens

Fig. 9 : Nucléus et éclat levalloisiens

Fig. 10: Pointes levalloisiennes

Bifaces levalloisiens

Fig. 11 : Bifaces levalloisiens

Bifaces levalloisiens

De nos jours, les préhistoriens comparent parfois le Neandertal aux populations dites « primitives » d’Amazonie, de Java ou de Bornéo (qui, elles, n’auraient donc pas évolué…). En effectuant cette comparaison, les préhistoriens, sans s’en rendre compte, récusent toute notion d’évolution humaine, car on sait que ces peuples sauvages sont des hommes à part entière comme nous, avec la même intelligence, mais avec une culture et des coutumes qui les différencient de notre civilisation.

Poinçons et épingles en os

Fig. 12: Poinçons à tête, en os et Épingles, en os.

Grattoirs

Fig. 13 : Grattoirs  Pointes à dos. Lames à dos. Burins à dos

PALÉOLITHIQUE SUPÉRIEUR (époque de Cro-Magnon)

Cette période se présente comme la mieux documentée et la plus populaire. Il est vrai qu’elle est bien plus proche, bien plus moderne, et que tout le monde s’accorde à y voir nos ancêtres directs, même si la préhistoire la situe de 30 à 12.000 ans  jusqu’à 9.000 ans avant notre ère.

Homme de Cro-Magnon

Anatomie

Le Cro-Magnon est un homme de taille assez grande, entre 1,70  et 1,80 m pour les hommes et 1,67 m pour les femmes. Sa capacité crânienne, bien qu’inférieure à celle de Neandertal[15], est comparable à la nôtre (1.600 cc), son crâne présente une forme plus ronde que le Néandertal, avec un front plus large et plus élevé, et sa mandibule présente une saillie mentonnière (absente sur le Néandertal). Dans son ensemble son aspect est très proche du nôtre.

Intelligence abstractive

Cette culture magdalénienne (datée entre -15 et -20.000 ans) se fait connaître par des œuvres artistiques impressionnantes : 300 grottes ornées connues, peintes (Lascaux, Chauvet, Cosquer, Niaux, Altamira, etc.) et gravées (Combarelle, Bara-Bahau, Cussac…), et des abris sous roche comprenant des sculptures en relief souvent peintes (Cap blanc, abri du saumon, abri Pataud etc.), voire sculptées, gravées et peintes (Roc-aux-Sorciers), soit quelque 5.000 œuvres d’art. Il nous a aussi laissé un art mobilier considérable, plus de 10.000 objets retrouvés conservés dans les collections publiques (sans parler des collections privées). Il préférait vivre dans des abris sous roche qui le protégeaient de la pluie et en partie du froid et des vents.

Il y construisait une maison rectangulaire avec des parois de branchage montées sur une bordure de pierres agencées au sol. Il la réalisait confortable, avec un sol recouvert de rameaux de fougères, parfois de lauzes (pierres plates calcaires typique du Sud-Ouest de la France) ou de galets. La paroi calcaire de la falaise qui lui servait de fond d’habitation était parfois décorée ou sculptée. Il connaissait aussi la technique de la hutte indienne qu’il montait lors de ses déplacements nomades. Il s’éclairait avec des lampes à graisse, cuisait ou grillait sa viande. Pour obtenir de l’eau chaude, la technique était simple: une bâche en peau remplie d’eau soutenue par un trépied dans laquelle on plongeait un galet brûlant retiré du foyer. Mais il savait aussi cuire les aliments dans un four en argile[16].

Il nous laissé nombre d’objets mobiliers usuels en pierre ou os, des colliers et des parures en os, en coquillage, des aiguilles en os montrant qu’il cousait ses habits à l’aide de nerfs d’animaux et de fibres végétales. Pour la pêche et la chasse, il a développé tout un armement adapté : couteaux, silex domestiques, racloirs, poignards, haches, pics, harpons, arcs à flèche, épieux et lances dont il augmentait l’efficacité grâce à l’invention d’un propulseur.

On a aussi retrouvé des « Bolas » (Proumeyssac) identiques à celles utilisées encore aujourd’hui par les gauchos de la Pampa[17] . Il pratiquait aussi le troc et commerçait, car des nucléus en silex bergeracois très recherchés ont été retrouvés jusque dans le Basses Pyrénées[18]. La vie était organisée en village[19].

Dans la région des Eyzies-de-Tayac, on peut estimer que la population comptait plusieurs centaines de personnes, si ce n’est plus. Ce qui inclut un certain nomadisme saisonnier pour la recherche du gibier qui avait dû se raréfier[20], mais aussi la pratique de l’élevage, comme celui des rennes (d’où les bolas pour leur capture), la conquête du cheval (tellement présent dans leur art) ainsi que des rudiments de culture agraire, car les traces de sédentarisation sont certaines. Il ensevelissait ses morts et parfois les déposait dans des grottes. Il utilisait des résines et des fibres végétales connues par leur solidité pour consolider l’emmanchement des outils et pour des rudiments de tressage (transport des nucléus de silex ou confection de nasses pour la pêche). L’hameçon fut aussi inventé, droit d’abord et bipointe, avant de devenir courbe comme de nos jours, ainsi que la foëne[21].

La couture ne lui était pas inconnue : à l’aide de poinçon en os et de perçoir en silex, Cro-Magnon perçait les cuirs pour coudre les pièces de son vêtement et les toiles de tentes avec des aiguilles à chas et des fibres de tendons ou de fines lanières de cuir. Il était coquet et se confectionnait des colliers avec, par exemple, des coquillages percés au poinçon et enfilés sur un lien de suspension. Ces coquillages marins provenaient de la côte, même située à plusieurs centaines de km, ou parfois de sites fossilifères.

Les silex bien taillés étaient aussi coupant qu’une lame de rasoir et le tranchant se ravivait par un coup précis.

Aiguilles à chas

Fig. 14 : Aiguilles à chas  

Feuilles de lauriers

Fig. 15 : Feuilles de lauriers

Je me souviens d’une histoire racontée par un préhistorien américain qui avait organisé des « journées découverte » sur le terrain pour un groupe d’étudiants. Ils campaient dans une réserve peuplée d’ours. Un soir, un ours menaçant attaque le groupe réuni autour d’un feu de camp. Le fusil fut sorti et l’ours abattu.

Une heure plus tard, le garde forestier qui avait entendu la détonation et connaissait la présence du groupe, arriva et constata les faits. Il sortit alors son couteau pour dépecer l’ours. Il en avait l’habitude et le faisait systématiquement lorsqu’il y avait un ours abattu. La vente de la peau lui assurait un complément de revenu. Le préhistorien lui proposa de remplacer le couteau à lame suédoise par un silex qu’il avait apporté. À la surprise du garde, le dépeçage fut plus rapide ; la coupe plus aisée ne prit que 45 mn au lieu d’une bonne heure comme d’habitude.

Tout montre donc que l’homme du paléolithique supérieur était intelligent, habile et astucieux pour traiter les problèmes quotidiens, qu’il avait une vie sociale, des échanges commerciaux, des rites funéraires et qu’il était sensible à l’art, avec certainement des échanges artistiques, car il peignait et sculptait dans le même style en différents endroits éloignés en Europe. Mais Cro-Magnon nous avait réservé encore bien des surprises…

Le propulseur, une invention simple mais géniale, qui caractérise l’ingéniosité humaine

Le développement de la population, les chasses répétées ont certainement provoqué une raréfaction du gibier. La sagaie ne convenait plus car le jet ne portait plus assez loin. Il inventa alors un élément très simple, le propulseur (fig. 16 et 17).

Sagaie et propulseur

Fig. 16 : Sagaie et propulseur

D’une seule main, la sagaie pouvait être envoyée comme un javelot grâce au propulseur qui donnait au tir la vitesse, la puissance et la précision. Un crochet prenait appui sur le talon de la hampe de la sagaie et prolongeait le bras du chasseur, décuplant ainsi la force du jet par effet de levier. La puissance du tir est telle que le bois de la sagaie se déforme en début de course. L’allongement du tir nécessita de recourir à l’empennage, ce qui déboucha sur l’invention de l’arc à flèches plus maniable et plus léger.

Propulseur décoré

Fig. 17 : Propulseur décoré                                        

L’art de Cro-Magnon est issu de sa religiosité

Cette sensibilité artistique était bien plus développée qu’on ne le pensait ou, plus exactement, on cherchait à minimiser cet aspect jusqu’aux nombreuses découvertes de grottes ornées. Ainsi, nous avons connu une ancienne conservatrice des Réserves du Musée de Saint-Germain-en-Laye. Consciencieuse, elle avait examiné les pièces entreposées dans les réserves et constata que celles qui n’étaient pas exposées au public étaient toutes décorées et que celles qui étaient exposées au public ne l’étaient pas ou peu. Y avait-il donc une volonté de cacher au public ce côté artistique qui touchait la décoration des objets les plus usuels: propulseurs, pointes de harpons, sagaies, bâtons en bois de rennes, épieux, lissoirs, redresseurs de sagaie, ciseau-repoussoirs, spatules, pendeloques, rondelles, sans compter de multiples objets décorés de lignes, de traits, de pointillés, de chevrons, de crans, de croissants, de croisillons, etc.?

Fragments de propulseurs

Fig. 18 : Fragments de propulseurs, lissoirs et bâtons percés en bois de renne

Harpons et pointes de sagaie

Fig. 19: Harpons en bois de renne (à gauche) et pointes de sagaie, baguette et lames en os (à droite)

L’étonnant est que cela concernait aussi des objets hétéroclites et insolites pour nous: os d’oiseau, fragments de calcaire, de grès, d’os, de côtes, galets, bois de rennes, etc. toutes ces figures géométriques étaient pour le moins intrigantes ; elles avaient certainement une signification qui nous échappait. Cette découverte se passait vers 1960. La conservatrice édita une monographie avec quelque 3.000 photographies (soit plus de 5.000 objets) et le catalogue fut publié en 1961 malgré les réticences des autorités du milieu des préhistoriens.

Puis un catalogue de tous les graphismes sortit en 1963 sous le titre évident, mais provocateur pour la conception de la préhistoire de l’époque: “L’Art géométrique magdalénien et les Origines du Symbolisme d’après les collections du Musée des Antiquités Nationales ». Puis en 1980, ce sera « Les Origines du Graphisme symbolique », dans lequel elle écrit que ces « civilisations antérieures utilisent les décors pour signifier une symbolique sacrée, magico-religieuse, funéraire, cosmogonique, prophylactique, car « l’Art pour l’Art »n’existe pas dans ces civilisations primitives mais possède toujours soit une connotation, soit une fonction religieuse ». Mots interdits à l’époque, qu’il ne fallait surtout pas prononcer!…Ils valurent à l’auteur une désapprobation suivie du retrait de son statut d’enseignante à la Sorbonne et de sa place de conservatrice.

Le nombre d’or

Les hommes préhistoriques nous réservaient une autre surprise, et de taille : leur notion du beau, était complétée très souvent par des proportions harmonieuses selon le nombre d’or qui est clairement utilisé, en particulier, dans la taille des silex en forme de « feuille de laurier ». L’Homme de Néandertal n’en était pas ignorant car il l’avait aussi utilisé dans ses bifaces levalloisiens. Le nombre d’or est un rapport harmonieux entre deux mesures ou deux proportions (par exemple longueur/largeur) utilisé en architecture et dans tous les arts depuis l’Antiquité. Il est présent dans la nature (proportion chez les animaux, les plantes) et s’élève à 1,618 033 :

[______________a____________]________b_______]

       « a » est à « b » ce que « a+b » est à « a »

Le rapport de « a/b » est égal au nombre d’or ou φ

La science astronomique

Nous abordons ici un sujet encore plus « chatouilleux » pour nos préhistoriens. L’un d’eux, Jean Clottes, avait déjà osé, dans les années 1990,  émettre l’hypothèse que les grottes ornées ainsi que les parois sculptées ou gravées indiqueraient l’existence d’un culte religieux de type chamanique (théorie à laquelle les préhistoriens s’opposèrent aussitôt, la qualifiant « d’absolutiste » pour mieux la dénigrer). Mais des travaux récents effectués par Mme Chantal Jègues-Wolkiewiez élargissent cette thèse et incluent des « connaissances astronomiques » chez le Cro-Magnon. Ainsi la grotte de Lascaux voyait-elle son couloir d’entrée s’illuminer totalement quelques minutes au soleil couchant du solstice d’été (ce qu’on retrouve d’ailleurs dans certains tumuli celtiques de Bretagne).

Depuis quelques années, Mme Jègues-Wolkiewiez démontre, de plus, que la fresque de la grande salle de la grotte de Lascaux (-17.500 ans) représente assez fidèlement la carte du ciel, et cela en tenant compte de son orientation dans l’espace : aux points maîtres des dessins d’animaux correspondent les étoiles de première grandeur des principales constellations. C’est-à-dire que, si la grotte était transparente, l’observateur verrait ces points se superposer grossièrement sur l’aspect des constellations au solstice d’été. Cela suppose des connaissances certaines en astronomie et une technique de report à l’intérieur de la grotte par l’observateur, tenant compte des distances et de l’orientation des astres concernés. Lascaux est donc bien plus qu’une grotte décorée, c’était un lieu sacré et les fresques ne sont pas de simples décorations : ils ont une signification religieuse qui reste à préciser. On y a d’ailleurs trouvé un os de renne encoché de 69 marques, semblable à celui retrouvé dans la même région, dans l’abri Blanchard.

Curieusement, les découvertes de cet abri sont datées de l’Aurignacien, c’est-à-dire de 30.000 ans avant Jésus-Christ[22]. L’os avait été expertisé à la NASA dans les années 1980 par A. Marshack qui y avait vu un calendrier lunaire avec les différentes phases des lunaisons et leur position dans le ciel tel qu’on peut les observer d’un emplacement fixe (fig. 20).Cet os ressemble aussi, étrangement, à celui retrouvé dans l’Abri Lartet, toujours en Dordogne, aux Eyzies, mais lui est daté au Chatelperronien, le dernier des Néandertaliens(!) et considéré aussi comme un calendrier lunaire.

Os de l'Abri Blanchard

Fig. 20 : Os de l’Abri  Blanchard avec ses différentes phases lunaires

Autre observation intéressante de Mme Jègues-Wolkiewiez : les couloirs d’entrée des grottes ornées sont orientés selon l’axe solaire du solstice d’été ou d’hiver, ou bien des équinoxes, ce qui ne se rencontre pas dans les grottes habitées et non ornées.

Il y a donc une signification cachée en rapport avec l’ornementation, mais certainement aussi entre ses différents éléments : l’emplacement des animaux, leur orientation spatiale sur les parois rocheuses, leurs séquences, correspondent à une logique qui n’est pas liée au hasard. Si nous examinons la sculpture peinte de l’abri du saumon (fig. 21), on découvre que sa tête est orientée en direction de la Vézère proche de 200 m, mais aussi de l’Est, symbole de l’hiver, période au cours de laquelle le saumon fraie et la couleur donnée au poisson est celle d’un mâle lors de la saison de reproduction. Mme Jègues-Wolkiewicz applique sa méthode avec succès à bien d’autres sites préhistoriques, qu’il s’agisse d’abris, de grottes ou de signes gravés sur des rochers alpins situés à 3.000 m d’altitude. Tout ceci ouvre d’intéressantes perspectives sur les connaissances que pouvait posséder Cro-Magnon.

Saumon de l'abri du Poisson

Fig. 21 : Saumon de l’Abri du Poisson, aux Eyzies-de-Tayac

Cette chercheuse indépendante s’attire à son tour les foudres de la communauté préhistorique qui refuse de vérifier et d’approfondir ses découvertes car « elle remet en cause un ensemble de connaissance qui sert d’outil de travail en préhistoire et transforme la conception de la préhistoire et la fait exploser car elle suppose un savoir extrêmement structuré qui entre en contradiction avec l’image du chasseur-cueilleur » selon les propos qu’avait osé tenir à la télévision M. Jean-Michel Geneste, conservateur de Lascaux (Arte 30/12/2010).

CONCLUSIONS

1. Il n’y a pas eu d’évolution humaine sur le plan physique

Depuis une trentaine d’années, j’ai effectué des centaines d’analyses céphalométriques de crânes humains pour en étudier les déformations ; je puis affirmer qu’un bon nombre de crânes de type néandertaliens et Cro-Magnon issues de ma patientèle ont été mesurés par mes soins. Ce sont des types physiques osseux présents dans nos sociétés actuelles en France et en Europe. Pour illustrer mes propos, voici quelques reproductions de crânes préhistoriques, à côté de leur équivalent actuel.

Sur les reproductions N° 1 & 3, sur la gauche, se trouve un crâne type d’homme de Neandertal (Combe Capelle) et de Cro-Magnon (Abri de Cro-Magnon) et sur les N° 2 & 4, sur la droite, la radiographie d’un crâne contemporain correspondant au type préhistorique. On constate que ces deux types physiques existent toujours.

Crânes type Neandertal

Crânes type Neandertal

Fig. 22 : Crânes, type Homme de Neandertal 

Crane type Cro-Magnon

Fig. 23 : Crânes, type Homme de Cro-Magnon

D’ailleurs, cette comparaison ne s’effectue que par rapport à la race blanche[23] européenne laquelle présente des sous-groupes qui se différencient aussi entre eux sur le plan morphologique osseux.

2 Il n’y a pas eu d’évolution de l’intelligence abstractive

Pour l’Homme de Neandertal :

Le peu de matériaux de cette civilisation qui nous est parvenu permet de répondre qu’il avait des acquis techniques proches de Cro-Magnon. Ne sont parvenus de lui que les industries lithiques, la plupart du temps assez lourdes, et peu de produits finis légers : n’oublions pas qu’il est toujours enfoui sous d’épais sédiments et que les courants qui les ont déposés ont entraîné ce qui était léger.[24]

Pour l’Homme de Cro-Magnon :

Avec l’accumulation des découvertes provenant de Cro-Magnon, nos préhistoriens ont maintenant tendance à le comparer aux populations modernes supposées « primitives », telles les indiens d’Amérique du nord, les esquimaux, certaines tribus africaines ou les aborigènes, afin de reconstituer l’univers de Cro-Magnon. Ceci prouve bien que, depuis Cro-Magnon, l’intelligence humaine est inchangée. En effet, en une ou deux générations ( le temps d’un apprentissage de la culture occidentale), combien de personnes provenant de ces groupes ethniques dits primitifs (et, à ce titre, assimilés au Cro-Magnon) sont devenues ingénieurs, avocats, médecins, chercheurs, etc. ?

Combien de fois n’ai-je pas entendu ceux qui tenaient des ateliers d’initiation à l’art, la taille de silex ou la couture préhistoriques s’exprimer avec respect sur l’intelligence de Cro-Magnon, concluant qu’il était aussi intelligent que nous. Il n’y a pas de différence de potentiel intellectuel entre Cro-Magnon et nous, comme le supposent les préhistoriens influencés par l’évolutionnisme, mais seulement des acquis techniques accumulés sur le terreau des civilisations précédentes.

Ainsi, l’intelligence abstractive humaine comme le physique de l’homme préhistorique n’ayant pas évolués sur des dizaines de milliers (voire des centaines de milliers d’années, selon les datations admises), nous trouvons ici un magnifique contre-témoignage aux conceptions évolutionnistes sur la préhistoire humaine.

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BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE

Art et civilisation des chasseurs de la préhistoire (34.000-8.000 ans av. J.-C., Laboratoire de préhistoire de l’Homme et Musée des Antiquités nationales de St-Germain-en-Laye, 1985.

Chamanisme et arts préhistoriques, vision critique, Michel Lorblanchet et al., 2006.

Les derniers Néandertaliens (de -36.000 à -30.000 ans),

Le Châtelperronien, Dominique Baffier, 1999.

Lascaux retrouvé, Brigitte et Gilbert Delluc, 2003.

Les origines du graphisme symbolique : Essai d’analyse des écritures primitives en Préhistoire, Marthe Chollot-Varagnac,1980.

Les sépultures moustériennes, Alban Defleur, 1993.

La vie des hommes de la Préhistoire, Brigitte et Gilbert Delluc, 2003.

(Pour les numéros du Cep cités, on pourra aussi consulter le site internet : le-cep.org)


[1] Témoignage d’un soldat républicain blessé, recueilli et soigné par les vendéens, qui s’étonnait d’avoir trouvé de l’humanité chez ces gens-là : « On nous avait toujours représenté les vendéens comme les plus cruels et les plus féroces des hommes », avec ce sens, dans le contexte de la déclaration, que les vendéens seraient plus bestiaux qu’humains (L. Delhommeau, La paroisse de la Gaubretière, 1993). Cette mentalité d’homme supérieur face aux « sous-hommes » perdure toujours chez certains socialistes envers les vendéens. Ainsi à l’issue des élections cantonales de mars 2008, où la gauche n’avait obtenu que 3 sièges, le maire de la Roche-sur-Yon, conseiller général en Vendée, s’est exclamé devant l’Assemblée : « Alors que la France des départements vire au rose, la Vendée évolue peu, comme si elle avait du mal à s’inscrire dans le siècle actuel ». (Vendée Matin du 21 mars 2008)… Déclaration qui n’est pas sans rappeler la mentalité racialiste et rétrograde des socialistes à la Ferry du XIXème siècle ou des révolutionnaires de 1793.

[2] En fait, il y avait eu six indiens enlevés, dont deux moururent lors de la navigation.

[3] Darwin, faisant escale en Patagonie (1840), en route vers l’océan Pacifique s’exclamait : « C’est à peine si l’on peut croire que ce sont des créatures humaines ». Un article sur ces quatre indiens Alakalufs, paru sous forme de publicité rédactionnelle dans le quotidien Le Temps du 15 juin 1879, concluait ainsi : « On est confondu à l’idée que ces misérables créatures appartiennent à l’espèce humaine » (cité par Jean Raspail dans Adios, Tierra del Fuego, Albin Michel, février 2001, pp.  64-65).

[4] Que dire alors de l’art contemporain dont la régression artistique est certaine ? Picasso, au sortir des grottes de Lascaux, se serait exclamé : « J’ai enfin trouvé mon maître ! »

[5]Arte, le 28 janvier 2011.

[6] En effet, malgré toutes les recherches et les expéditions, on n’a jamais retrouvé « d’homme primitif » vivant, hybride entre l’homme et le singe. Au cours du XXème siècle, l’idée d’une évolution relativement rapide avait dû être abandonnée au profit d’un allongement spectaculaire de l’histoire de l’Humanité.

[7]Galets aménagés: ils présentent sur une partie de leur surface une perte de matière du nucléus (la matière première), due à l’éclat enlevé (le produit fini). Ce serait donc la trace (en creux) d’une taille grossière, ou encore un effet du hasard.

[8]Biface: ce serait l’outil de pierre taillée caractéristique du Paléolithique inférieur. Il nécessite un façonnage progressif de la matière par détachement des éclats sur les deux faces; l’outil présente alors une symétrie bilatérale et bifaciale qui induit l’idée d’une « beauté de forme ». Le biface aurait été l’outil à tout faire. Les plus vieux (abbevillien) remonteraient à 700 ou 800.000 ans… excusez du peu !

[9]Hachereau: petite hache composée d’un biface emmanché.

[10] Nous émettons bien sûr des réserves sur l’idée que la qualité de l’outillage définirait l’évolution humaine. Il y a en effet des qualités de nucléus de silex qui ne permettent pas une taille précise et la fabrication d’éclats de qualité. Les échanges étant relativement réduits à cause du poids des nucléus et de la faiblesse des groupes humains, la plupart devaient se contenter de matériaux trouvés sur place.

  Il ne faut pas non plus oublier que certains étaient plus habiles que d’autres pour la taille des silex ; ainsi se sont créé des ateliers spécialisés. Un autre aspect jamais soulevé est le suivant : les outils en silex ont été utilisés jusqu’au cours du haut Moyen Âge. À cette époque, qui n’est pas si reculée que cela, les objets en fer étaient un luxe que seule une minorité pouvait acquérir (épée, couteau, armures, etc.) ; les paysans possédaient des outils agraires en bois et les lames de couteaux étaient souvent encore en silex. Le propriétaire d’un site préhistorique (avec billetterie) au bord de la Vézère (Dordogne) m’avait avoué qu’en fait son site était « mérovingien » ainsi que les silex. La présence abondante des silex avait d’abord suggéré la présence d’un site préhistorique Cro-Magnon et déclenché des fouilles archéologiques dans les années 1960, mais la découverte de tombes mérovingiennes mit à mal l’hypothèse. La publication du rapport de fouilles fut fort longue (plusieurs années). Le propriétaire du site dut se rendre à l’Université de Bordeaux pour pouvoir le lire, car on n’avait pas pris la peine (volontairement ?) de le lui faire parvenir. Il constata avec surprise qu’on avait daté la découverte à – 13.000 ans, qu’on ne parlait pas des tombes mérovingiennes et que l’emplacement des silex taillés avait été déplacé de la proximité des tombes à plus de 50 m, sur la colline dominant la vallée de la Vézère. Finalement, il s’accommoda fort bien des libertés prises avec l’histoire… billetterie oblige !

[11]En fait, une simple calotte crânienne que l’on avait tout d’abord attribuée à un grand singe.

[12]En référence au site du Moustier, sur le bord de la Vézère, à quelques kilomètres en amont des Eyzies-de-Tayac, haut-lieu de Cro-Magnon. Ce site est extraordinaire car il contient du Neandertal avec des sépultures d’enfants et de nouveaux-nés dans son sous-sol, et du Cro-Magnon dans l’abri sous roche situé à l’aplomb, 10 mètres plus haut sur la falaise. C’est ce site, en particulier, qui permet d’affirmer que Cro Magnon et Néandertal se sont côtoyés, car il n’y a qu’un seul point sur la carte… On reste rêveur, quand on pense au ménage que Cro-Magnon devait faire, dans l’abri sous roche, lorsqu’il était encombré par les éclats de ses tailles de silex et qu’il les envoyait par dessus bord, tombant ainsi chez Neandertal enfoui dans le sol sédimentaire, récipiendaire de ses déchets qui, avec le temps, se sont enfoncés pour le rejoindre de plus près. Terminons par quelques anecdotes authentiques sur ce site: le squelette de l’Homme du Moustier a été réenterré-redéterré au moins deux fois avant une reconnaissance grotesque mais officielle par les autorités de la Société de Préhistoire de Périgueux, que des enfants du village se sont vu interrompre une future partie de ballon avec le crâne de l’Homme du Moustier par son découvreur, que notre “trafiqueur” du site de La Micoque avait envoyé le squelette entier d’une fillette néandertalienne pour être expertisé par le célèbre Pr Boule. Celui-ci l’a bien reçu mais, par la suite, a été incapable de dire où il l’avait remisé (il n’a jamais été retrouvé), et cela sans n’avoir jamais rien publié sur le sujet… Cherchez l’erreur!

[13]Dans un premier temps, le moustérien était présenté comme ayant vécu il y a 60.000 à 80.000 ans, mais des analyses génétiques on pu mettre en évidence quelques séquences de son ADN. Ce qui a confirmé que c’était bien un homme (démentant ainsi plus d’un siècle de mensonge à son sujet), mais légèrement différent de nous (ça, on le savait déjà !). De plus, cela révélait qu’il n’était pas l’homme fossile que l’on nous avait présenté, car si présence d’ADN il y avait, il ne pouvait pas être fossilisé, donc il était plus récent qu’on ne le disait et il avait été enfoui rapidement sous des mètres de sédiments qui en ont assuré la conservation. En effet l’ADN se dégrade relativement vite ; il se conserve mieux dans les os, mais pas au delà de quelques milliers d’années. Au lieu de réfléchir sur les causes de son enfouissement sous des épaisseurs de plusieurs mètres de sédiments, et des raisons rendant possible une analyse ADN, on se contenta seulement de corriger sa présence en le plaçant dans la fourchette basse de la chronologie de l’Homme de Neandertal, entre – 30 et – 45.000 ans.

[14]J’ai bien connu le propriétaire du Regourdou et contribué à sauver son site. Depuis sa découvert en 1957 jusqu’à son décès, il y a quelques années, il a toujours été persécuté par le milieu des préhistoriens car son site n’était pas « préhistoriquement correct » à cette époque où l’on considérait comme totalement exclu que le Néandertal puisse avoir la moindre notion religieuse, thèse qui s’est bien sûr assouplie sous la pression des nouvelles découvertes de sites religieux néandertaliens.

[15] Selon le phylum évolutionniste transitant de l’Homo abilis vers l’Homo erectus puis sapiens, le redressement de la stature (marche bipèdique) aurait favorisé une augmentation de la taille ainsi que de la capacité crânienne et donc, par conséquence, le développement de l’intelligence (ce qui est loin d’être vrai, car il s’agit d’une question de circonvolutions du cerveau et non de volume ou de poids… D’ailleurs, chez un homme, l’intelligence est indépendante de la taille et du volume de la tête. Alphonse Allais connu à la Belle Epoque pour son esprit « pétillant » était le « plus petit chapeau de Paris »). Selon ce concept, Cro-Magnon, « plus évolué », aurait dû avoir une capacité crânienne supérieure à celle de Neandertal ; mais les évolutionnistes ne s’offusquent pas de cette anomalie.

[16] Lors d’un stage de « terre cuite », nous avons procédé à la confection fidèle d’un four de 40 cm de diamètre avec un foyer indépendant sous la chambre de cuisson, selon les plans réalisés à partir de restes archéologiques (estimés entre -9 à -12.000 ans) qui avaient été retrouvés. Nous l’avons réalisé à l’aide d’argile brute prise sur place : en 3 heures, le four était opérationnel et nous l’avons utilisé.

[17] Il s’agit de boules attachées ensemble par un lien de corde, qu’on lance en les faisant virevolter de manière à immobiliser un animal car elles s’enroulent autour de ses pattes.

[18] Chez moi, en Vendée, j’ai retrouvé un nucléus provenant de la région de Châtellerault, à quelque 150 km.

[19] Il ne faut pas oublier que certains étaient plus habiles que d’autres pour la taille des silex et qu’ainsi se sont créés des ateliers spécialisés dans la taille des silex.

[20] Au cours d’une expédition organisée par le président Jefferson et menée de 1804 à 1806 par Lewis et Clark pour traverser le continent nord américain à partir de la remontée du Missouri, les notes du carnet de bord indiquent qu’il fallait tuer chaque jour environ 4 daims ou un bison pour nourrir les 45 hommes de l’expédition. Leurs observations sur les indiens signalent aussi leur souci pour parvenir à nourrir des villages peuplés de 150 à 450 indiens, parce que le gibier  finissait par fuir de plus en plus loin. Certaines tribus abandonnaient en partie la chasse pour se spécialiser dans la culture du maïs qui était troqué contre de la viande ou des peaux. Le même phénomène a dû se produire chez Cro-Magnon.

[21] Harpon spécial pour pêcher le poisson plat.

[22] Et là, on ne s’étonne pas des 12.5000 ans qui séparent ces deux pièces semblables !…

[23] Je connais des types physiques ethniques congolais (ex-belge) typiques du néandertalien.

[24] Il faudrait aussi évoquer les mouvements dans le sol des objets enfouis, en fonction de leur poids, de leur densité, du piétinement et des périodes humides ou de recouvrement d’eau (inondations). Cette mobilité affecte leur profondeur relative et de là leur datation (sachant qu’ils sont datés selon leur profondeur et leur situation dans la couche archéologique dans laquelle ils sont retrouvés). De nombreuses erreurs de classements sont ainsi dues au simple fait d’avoir négligé cette question (ceci est aussi valable pour Cro-Magnon).

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