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Peter Wilders (1931-2020)

Notre ami anglais Peter Wilders a quitté brusquement cette terre le 11 novembre dernier. Ayant épousé une Française, il fut pour nous un pont vers le monde anglo-saxon d’où il avait surgi, monde majoritairement protestant alors qu’il était, lui, soucieux de rester fidèle à une foi catholique exigeante héritée de sa famille. Ayant compris, comme bien des Britanniques, à quel point l’évolutionnisme rongeait et défigurait les vérités chrétiennes, il chercha longtemps des Français animés des mêmes convictions et finit par découvrir le CESHE et les travaux de Guy Berthault, pièce majeure dans l’édifice antiévolutionniste, mais alors encore ignorée outre-Manche. Ce fut pour lui, au moment même où il pouvait se dégager de son activité d’assureur, comme une vocation. D’une part, faire connaître aux scientifiques « créationnistes » (en majorité américains) une arme géologique puissante venant à point pour renforcer leur artillerie ; et, d’autre part, donner aux antiévolutionnistes français la connaissance d’une vaste armée d’alliés potentiels. Parallèlement, il voulut que l’Église catholique, prenant conscience du piège teilhardien grâce à la nouvelle géologie, se libérât des miasmes de ce mythe brumeux et revienne à la doctrine pure et sûre de la foi apostolique et romaine.

Homme de communication, il savait que les idées ne s’imposent pas d’elles-mêmes, qu’il faudrait encore les adapter au grand public. Sur le terrain de la science, un acte décisif fut la réalisation, entre 1984 et 1991, d’une vidéocassette professionnelle « L’évolution : science ou croyance ? », bientôt traduite en cinq langues (dont le polonais) et aujourd’hui toujours diffusée1. Cette vidéo, dans laquelle intervenaient cinq scientifiques dont le Pr Maciej Giertych, fut primée au festival du film catholique de Niepokalanów. Dans le feuillet de présentation, on pouvait lire cette phrase du P. Malachi Martin2 : « Votre vidéo est plus que remarquable, elle est la réponse à une prière. » Elle fut complétée par une courte vidéo strictement scientifique intitulée : « Expériences fondamentales de stratification. »

Peter Wilders permit à Guy Berthault d’entrer en relation personnelle avec divers savants, notamment américains puis, par ricochet, russes. Pensons ici à Dimitri Kouznetsov, ce chimiste Prix Lénine du Komsomolsk, qui fit la « Une » de la presse italienne lors du Symposium organisé par le CIELT à Rome en 1993 : il avait montré expérimentalement que le chauffage d’un tissu de lin ancien en présence d’argent le « rajeunissait »3. Pensons aussi à Alexandre Lalomov dont les travaux prolongent aujourd’hui sur le terrain les expériences liminaires réalisées par Guy Berthault4. Un lien fructueux s’établit aussi avec une organisation catholique américaine, le Centre Maximilien Kolbe.

Le saint franciscain polonais est connu pour sa mort édifiante, sa dévotion à l’Immaculée Conception et sa lutte contre la franc-maçonnerie. Mais c’était aussi un antiévolutionniste convaincu : « tout se tient », dit le proverbe ! Lors de la réalisation de ses vidéos, Peter, toujours soucieux de doctrine, s’était fait conseiller par le P. Damien Fehlner, un franciscain américain enseignant la théologie dogmatique à Rome. Aux yeux de ce dernier, les arguments théologiques contre l’évolutionnisme étaient décisifs. Mais lesquels choisir ? Car, pour l’homme de la rue, il faut un argument simple, puissant parce que simple. Cet argument, Peter le trouva dans la définition de la Création donnée au concile de Latran IV (1215) et reprise mot à mot par le concile de Vatican I (1870). Il y est dit que tous les êtres, tant corporels que spirituels, furent créés au Commencement, ex nihilo, tous ensemble et dans la totalité de leur substance. En s’attachant au sens propre de chacune de ces formules, comment voir dans ce bloc la moindre faille où pourrait se glisser une évolution faisant naître les êtres vivants les uns à partir des autres (donc nullement ex nihilo) au long d’immenses durées (donc pas tous ensemble) et par transformation de formes préexistantes (et non dans la totalité de leur substance) ? Tel l’homme qui découvre un trésor enfoui dans un champ et vend tout ce qu’il possède pour l’acquérir (Mt 13, 44), Peter, ayant vu tout le parti à tirer d’une définition ayant force de dogme (et, à ce titre, assortie d’anathèmes), en fit le cœur exclusif de son dernier combat et s’y lança avec la redoutable ténacité qui le caractérisait. Sa plume alerte n’en était pas à son galop d’essai puisqu’il avait même déjà écrit une pièce de théâtre contre l’Évolution. Il se fit le rédacteur principal d’une étude approfondie : La Création et le Temps. Plusieurs fois remaniée entre 2009 et 2016, ce travail reçut l’approbation de théologiens qualifiés (dont le cardinal Sandoval5 et Mgr Athanase Schneider), ce qui laisse prévoir que le message finira par passer.

Le lion britannique s’est tu désormais. Reste les œuvres accomplies, l’invisible comme la visible, l’indirecte comme la directe, les fruits des multiples voyages de par le monde, les milliers de lettres et de courriels, les appels incessants auprès des revues et des autorités, « à temps et à contretemps » selon l’injonction de saint Paul. On sait que Charles de Foucauld n’a converti aucun des Touareg qui l’entouraient : les fruits vinrent après. Semblablement, sauf quelques exceptions, Peter ne sut guère convaincre les ecclésiastiques dans son entourage proche : un argument trop simple effraye l’intelligence qui mesure aussitôt les redoutables conséquences de tous ordres, avec les inévitables remises en cause à prévoir.

Mais rien n’est plus fort qu’une idée qui vient à son heure. Le grain semé dans la bonne terre finira par germer. Il n’est pas exagéré de dire que, sans Peter Wilders, le CEP n’existerait pas. Il fut une pierre de fondement pour l’édifice, une « pierre vivante » dont les actes quotidiens attestaient la foi indéfectible en l’autre vie. Que son épouse et ses quatre enfants trouvent ici le témoignage de notre reconnaissance. Requiescat in pace.


1 En libre accès sur le site noevolution.org et diffusée en DVD par le CEP.

2 Sur Malachi MARTIN, se reporter au dossier publié dans Le Cep n°84.

3 L’argent, catalyseur dans nombre de réactions chimiques, constituait le matériau du reliquaire où se trouvait le Linceul du Turin lors de l’incendie de Chambéry, en 1532. Ce fut Marie-Claire van Oosterwyck qui avait suggéré le protocole de ces expérimentations dont D. Kouznetzov sut donner l’explication théorique.

4 On trouvera sur le site du CEP les vidéos des exposés donnés par Alexandre LALOMOV lors du colloque du CEP en 2019.

5 Archevêque émérite de Gadalajara, cette ville qui fut l’épicentre de la rebellion des Cristeros.

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