Partager la publication "Le véritable Attila (416-454)"
HISTOIRE
« Si l’homme est libre de choisir ses idées,
il n’est pas libre d’échapper aux conséquences des idées qu’il a choisies. »
(Marcel François)
Par:Irène Döményi
Résumé: La figure d’Attila traverse les manuels d’histoire comme un ouragan dévastateur, comme l’exact contraire d’un être « civilisé ». Or le véritable Attila, éduqué à la cour de l’Empereur d’Occident, fut un sage homme d’État, sachant s’entourer d’hommes cultivés, nouant d’habiles alliances, soucieux du bien commun de son peuple, mais animé d’un profond mépris pour la décadence morale d’un Empire en voie de liquéfaction. Ainsi s’explique sans doute sa décision de ne pas piller Rome, à la suite de son entrevue avec le pape Léon 1er. Il avait souci des conséquences et pressentait peut-être que ses fils seraient incapables de préserver les conquêtes de l’État hun. L’auteur, une Hongroise, est bien placé pour nous faire entrevoir la face noble de ce grand chef et de cette civilisation des Huns qu’il a illustrée.
Il n’est pas aisé de connaître la véritable personnalité du dernier roi des Huns, qui régna de 435 à 454 après Jésus-Christ, malgré – ou à cause de – l’abondance de données et des légendes qui l’entourent.
Tant d’inexactitudes ont été commises par des chroniqueurs, ambassadeurs et voyageurs quant aux dates des événements au cours des 3000 ans d’histoire de ce peuple et quant à l’orthographe des noms! Il existe encore une telle confusion entre les noms des personnes et ceux de leurs fonctions, que nous devrons nous borner à rectifier au passage quelques erreurs en essayant de décrire ce personnage hors pair.
Attila (Etele, Etli, Etil, Etzel) est presque toujours présenté comme un « barbare, un sauvage indomptable, cruel qui régnait sur une horde de nomades, chevauchant sans cesse à travers les steppes de l’Asie et semant la terreur parmi les peuples européens pacifiques ».
Mais ces Huns étaient-ils militairement efficaces (donc redoutables) ou vraiment et seulement « féroces », c’est-à-dire aimant à tuer sans raison ?[1] [2]
Dans l’imagination collective occidentale un peuple cavalier ne peut être qu’une « horde » qui vit nécessairement en « nomade ». C’est là une erreur fondamentale, car pour constituer un peuple proprement dit, il faut l’association libre d’au moins trois tribus (des dizaines de milliers de personnes) qui obéissent à un même Chef et parlent la même langue. Alors, une bonne organisation administrative, économique, militaire, culturelle et religieuse leur permet de concevoir et de réaliser des projets à long terme. Tel fut le cas du peuple Hun.
On imagine volontiers que les Huns, « toujours en mouvement » (parce qu’ils avaient l’espace devant eux?) vivaient dans les tentes, nommées (aujourd’hui!) yourtes (à l’instar des tentes des Mongols dans des films)…Non! Les Huns ne vivaient pas dans des tentes, car ils étaient sédentaires. C’était pour eux une nécessité, car ils cultivaient la terre pour la nourriture des hommes et des animaux. Il leur fallait aussi de l’eau, du sel, du temps et des territoires pour l’élevage et le dressage des chevaux, pour la formation militaire de la jeunesse, pour organiser les soins médicaux des femmes, enfants et vieillards, et aussi pour le repos. Presque toujours ils habitaient dans les « kamliks« .
Ce mot déformé vient du sumérien : kalim (laine pétrie, battue), sorte de feutre très lourd, imperméable, qui couvrait le « kamlik », la maison des Huns.
Elles étaient construites sur des charpentes de bois préfabriquées, transportables sur deux chars tirés par des bœufs. On pouvait les monter en une seule journée. [3]
Cette maison n’était ni un taudis, ni un cagibi mais une salle ronde, spacieuse et claire (d’un diamètre de 7-8 mètres, d’une hauteur de 4-5 mètres), où une famille pouvait se loger confortablement pendant longtemps. La coupole était maintenue par un solide mat de bois auquel on pouvait monter pour régler la position de l’aérateur (en métal ou en céramique), sorte d’entonnoir renversé protégeant la maison contre la pluie et la neige tout en laissant sortir la fumée. La charpente comprenait des pièces rigides et courbées, assemblées par des courroies en cuir, où venaient aussi s’attacher les parties en laine. Le foyer se trouvait au milieu. Il y avait une ported’entrée et une autre en arrière. Autour du mât et tout autour des murs un banc, souvent couvert de tissu, large de 60 cm environ, était aménagé pour s’asseoir. Un espace à gauche de l’entrée servait à recevoir les hôtes; sur la droite se déroulait la vie plus intime de la famille.
Cette construction élaborée au fil des siècles était un miracle d’ingéniosité, car, malgré un poids au sol relativement faible, elle résistait à la pression formidable du vent des déserts asiatiques et au grand froid qui régnait dans les régions plus au Nord.
Attila fit construire tout un réseau de protection autour de son Empire : ouvrages en terre, forteresses en bois et en pierre qui comportaient l’appartement du capitaine de la garnison, plusieurs autres pour le personnel, des dépendances, etc. Dans les régions très froides, elles étaient chauffées par des tuyaux en terre cuite dans lesquels circulait l’air chaud provenant d’une chaudière centrale.
Contrairement aux idées répandues, Attila n’était ni asiatique, ni mongol, ni turc, ni germanique. D’où venait-il donc ? Selon plusieurs historiens, son peuple, les Huns (Chuns, Kuns), le troisième peuple composant la future nation hongroise, était venu de Sumer (en Mésopotamie) vers 2000 av. J. C.
Une partie – (« les Huns Blancs ») s’est répandue vers le Nord, entre le Caucase et la mer Caspienne, dans la région de Volga-Jajk de la Russie actuelle.[4] Ils furent nommés « Scythes« par les historiens du 19e siècle (!), nom grec désignant tous les peuples du Nord-est de l’Europe et du Nord de l’Asie et signifiant par extension « homme inculte et brutal ». Mais un tel peuple n’a jamais existé et celui qu’on désigne ainsi ignorait ce nom.
L’autre partie des Huns s’établit entre les Montagnes Oural-Altaï et les lacs Aral et Baïkal, donc en Asie Centrale, et fut connue – 2000 ans plus tard! – comme étant les « Huns Noirs, ou Ephtalites« . Ils y rencontrèrent leur peuple-frère, les Dahs (Daces, Daks), sortis eux aussi de Sumer et qui parlaient la même langue. Pendant leur séjour d’environ 1000 ans dans ces vastes territoires, ces peuples se déplacèrent, en partie ou en entier, dans tous les sens.[5]
Ils commencèrent leur migration vers l’Ouest au 4e siècle après J. C. Les sources chinoises depuis 1200 av. J. C. les désignent sous le nom de « Xiongnu » (Hiungnu, Siung-nu).
Les « Huns Noirs » firent la guerre à la Chine de 700 av. J. C. jusqu’à la fin du troisième siècle sous les souverains Tou-Man et Mao-Tun (- 307, -174). La Grande Muraille de Chine fut érigée contre eux par plusieurs Empereurs aux environs de 300 av. J.C.
Les Chinois leur payaient tribut en soie sauvage, filée et tissée ensuite par les femmes hunniques. Les ateliers impériaux chinois tissant la soie employèrent des motifs hunniques. Les Huns en revanche n’utilisèrent pas de motifs mongols ou chinois.
Entre-temps, en Europe, un grand Empire s’était constitué : l’Empire Romain d’Occident.
Le règne des Romains se fondait sur une armée bien entraînée, exerçant une dictature cruelle sur les peuples vaincus. Ils devaient se transformer en Romains dans tous les aspects de leur vie : se soumettre à l’administration romaine, oublier leur langue, renier leur histoire et leur culture, adopter la religion de l’État romain et la façon de vivre des vainqueurs. Comme peuples et nations ils devaient disparaître et se fondre dans l’Empire qu’ils servaient souvent comme esclaves.
Très imbus de leur supériorité, les Romains estimaient que tous ceux qui osaient s’attaquer à Rome (Goths, Vandales, Alains, Huns) étaient des « sauvages » et des « barbares », car ils voulaient détruire la seule et unique civilisation, la leur.
Mais qu’était-elle devenue, cette civilisation, au 5ème siècle ? L’Empire Romain, traversé par des cultures diverses, était déjà très corrompu au temps de Jésus. Il avait adopté bien des aspects de la civilisation hellénique, avec ses grandeurs et ses faiblesses.
Certes, la société romaine a connu le Christianisme, mais elle l’a combattu et persécuté pendant plus de 300 ans. Celui-ci n’avait donc pas pu encore la purifier et la transformer selon les préceptes de l’Évangile. Les luttes entre les Chrétiens, dues à de nombreuses hérésies, avaient également affaibli la moralité générale. Les anciennes idoles et les superstitions encore vivantes des peuples conquis exerçaient aussi leur influence. Les pressions impériales sur l’Église, l’écart entre les conditions et le mode de vie dissolu des riches patriciens, et la misère matérielle et morale des esclaves étaient criants et révoltants.
Ajoutons-y les attaques des « barbares » qui ébranlèrent les anciennes structures et traditions romaines et furent considérées par certains comme une juste punition.
C’est dans ce contexte qu’Attila fut considéré comme le « Fléau de Dieu. » Était-ce l’Église qui avait répandu cette idée, ou le peuple effrayé ? Toujours est-il que le titre d’Attila était : « le Roi d’Astur ». Or ce mot s’écrit en Hongrois actuel : « Ostor » (prononcer: ochetore) et il signifie: « fouet », c’est-à-dire l’instrument de correction corporelle. Il n’est pas impossible que le jeune Attila, ayant passé plusieurs années à la Cour de l’Empereur, soit arrivé à la conclusion qu’il avait une mission personnelle et sacrée à accomplir : celle de punir cette société décadente et de devenir, en effet, le « Fléau de Dieu ».
En 408 l’Empereur Honorius II siège à Ravenne, alors capitale de l’Empire. Alaric, le Roi des Goths (un arien), arrive à Rome pour la détruire. Le Pape saint Innocent se présente pour être l’intermédiaire entre le Roi et l’Empereur en vue d’un traité de paix. Cette dernière est achetée à prix d’argent. Impatient des tractations qui traînent en longueur, Alaric veut des trésors qui n’arrivent pas. Alors en août 410, il attaque Rome. Il y fait un massacre et un pillage terrible : l’Empire Romain d’Occident est pratiquement anéanti.
414, 415, 416 (?) : naissance d’Attila, le prince Hun. Après la mort de son père Mundzsuk, survenue quand il était encore enfant, âgé de 10 ans environ, le roi Rugila, son oncle, régnant désormais sur les Huns, l’envoya comme « caution » (gage « d’amitié ») à Ravenne, à la Cour de l’Empereur d’Occident. Ce séjour lui permit d’apprendre le latin, le grec et le germain. Plus tard, il put parler sans interprète avec les ambassadeurs étrangers.
Au cours d’une insurrection complotée par le roi Goth Alaric, un officier de l’armée romaine mourut. Son fils encore enfant, Aetius – mi-Goth, mi-Romain – fut alors envoyé comme caution à la Cour Royale de Ravenne où il fit la connaissance d’Attila.
Plus tard, ce même Aetius vint en Pannonie (devenue ensuite « Hunnia »), à la Cour du roi Hun Rugila, lui aussi comme caution. Ainsi put-il connaître et apprécier la langue et la civilisation des Huns.
Grâce à cette coutume d’échanges de princes-otages, plusieurs affrontements armés entre les peuples furent évités.
Devenu roi des Huns, Attila, lui aussi, préféra éviter les guerres par la diplomatie, art où il excellait.
423 : 40.000 excellents guerriers huns expérimentés étaient entrés dans les légions romaines. Ils y servirent pendant plusieurs décennies comme mercenaires (comme une armée auxiliaire). Ils pouvaient ensuite s’établir dans les régions frontalières inhabitées pour y cultiver la terre (par exemple au Sud de la Pannonie, sur les bords de la rivière Sava, un affluent du Danube), ou encore terminer leur existence au service de riches Romains.
434 : Mort de Rugila, l’oncle d’Attila.
A Ravenne le jeune Attila apprit à voir dans leur réalité la civilisation et la mentalité romaines. Elles n’exercèrent pas un grand attrait sur lui. La dégénérescence morale généralisée à la Cour le remplit de dégoût ; il souhaitait en préserver son peuple. Les Huns, même s’ils n’étaient pas chrétiens, n’adoptèrent pas les mœurs dépravés d’autres grands empires.[6]
Ils étaient monothéistes et monogames. Ils respectaient leur femme. Ils croyaient au « Seigneur Suprême des Armées » (célestes) avec qui ils établissaient des relations respectueuses par le ministère du « tàltos », sorte d’intermédiaire entre le Ciel et la Terre. C’était un homme « inspiré » mais loin des « chamans » ou des « derviches » asiatiques qui se mettent en transe à l’aide de drogues hallucinogènes…
Ils vénéraient leurs anciens. Les riches enterraient leurs morts dans de larges sépulcres soutenus par une charpente en bois. On y mettait des vêtements, des ustensiles, des armes et des chevaux sacrifiés, pour qu’ils leur servent dans l’Au-delà.
Le Palais d’Attila à Buda, construit en bois, sans être ostentatoirement luxueux, était le plus bel édifice. Les ambassadeurs envoyés vers les rois Huns étaient en admiration à la vue des tenues en soie somptueuses des seigneurs de la Cour ; elles s’ornaient de broderies et d’applications de cuir ; leurs harnachements étaient embellis de pierres précieuses, leurs chaussures rehaussées de motifs d’or ou d’argent, leurs besaces enrichies de plaques d’or ciselées.
Le vêtement d’Attila était simple et toujours très propre. Il rendait hommage à ses hôtes en faisant servir leur repas dans une vaisselle en or ou en argent, mais lui-même n’utilisait qu’une assiette et une coupe en bois, aux yeux de tout le monde. Il n’obligeait pas les autres à être modestes, mais il se permettait de l’être.
Les Huns, civilisés différemment des Romains, avaient une autre façon de faire la guerre. Leur aspect extérieur, leur tactique, leur rapidité d’action et de formation même pendant les batailles, leur discipline basée sur la responsabilité personnelle, leur maîtrise du cheval (grâce surtout à l’étrier, inventé des siècles auparavant), leur système de transmission des ordres par des courriers à cheval, des signes lumineux, colorés ou sonores dans tout l’Empire (signes incompréhensibles pour les non-initiés), ainsi que leurs arcs à très longue portée: toutes ces nouveautés étaient déroutantes, donc effrayantes, pour les Romains et donnèrent naissance à la « légende noire« , à toutes les horreurs inventées et attribuées aux Huns.
A partir de 440, Attila ne fournit plus de soldats à l’Empire d’Occident décadent.
Le rêve du jeune Attila était d’unir toutes les tribus dans un grand État où tous les Huns seraient réunis. pourraient développer leurs talents. Il y travailla pendant vingt ans.
Il devait donc d’abord faire cesser les dissensions entre tribus, avant de se lancer dans la Grande Campagne.
Le premier, il aperçut l’unité géographique du bassin danubien. Il désirait réaliser l’union des peuples vivant dans le cercle des Carpates. Il fit encore dessiner la carte des voies fluviales européennes entre les fleuves Don et Rhin et au Nord jusqu’à la mer Baltique (plus tard Charlemagne reprendra cette idée).
441 : Début de la « grande campagne » d’Attila contre l’Empire Romain d’Occident.
Les peuples qui se soumettaient aux Huns ou qui s’alliaient avec eux étaient politiquement anéantis, mais jamais massacrés physiquement.
Moyennant un tribut – souvent lourd – ils étaient incorporés dans le très grand empire hun. Ainsi, tout en bénéficiant d’une protection, se libéraient-ils du joug romain et préservaient-ils leurs coutumes et leur religion.
448 : Théodose II, l’Empereur d’Orient, fut un souverain bienveillant mais faible.
Il n’aimait pas la guerre. A cause de nombreuses intrigues à sa cour, il ne pouvait faire confiance à personne. Chrisapius, son Grand Eunuque, voyant que le trésor de l’État était presque vide (à cause du lourd tribut exigé par le roi des Huns), tenta uns), tenta de soudoyer Edecon (envoyé à la Cour impériale comme ambassadeur d’Attila) pour qu’il tue son roi (car avec de l’or on pouvait acheter tout et tous dans l’Empire corrompu). Mais il n’en allait pas ainsi chez les Huns. L’ascendant d’Attila sur les Huns et la confiance qu’il témoignait à ceux qui la méritaient, se manifestèrent à cette occasion, car Edecon, loin d’assassiner le roi, l’avertit du projet. Attila trouva ainsi le moyen de tourner l’histoire à son avantage et de faire punir Chrisapius par l’Empereur d’Orient, lui-même.
451. L’armée d’Attila s’approcha de Lutèce (Paris). Les hommes étaient plus effrayés par les Huns que par les Romains. Ils voulaient se joindre à l’armée d’Aetius. Mais celle-ci tardait à arriver et, lorsque les Lutétiens virent les éclaireurs huns sur les bords de la Seine, ils plièrent bagage pour quitter la ville.
Mais les femmes, croyant à la prophétie d’une sainte femme, Geneviève, qui leur disait qu’elles n’avaient pas à avoir peur, car Attila n’allait pas détruire leur ville, se réunirent au baptistère de la chapelle de saint Roland pour implorer sa protection. Le roi, de fait, laissa intacte la ville. Ainsi se réalisa la prédiction de sainte Geneviève : Lutèce fut sauvée.
L’explication d’une telle clémence est qu’à ce moment-là Attila devait de toute urgence descendre vers le Sud pour atteindre les armées de Théodoric Ier (roi des Wisigoths) avant qu’elles ne se joignent à la légion romaine d’Aetius. C’est pourquoi les Huns galopaient à bride abattue vers Toulouse, la capitale des Goths d’Occident (Wisigoths).
Mais ils trouvèrent sur leur chemin la ville d’Orléans, devant laquelle ils durent faire un siège long et difficile car la ville était défendue par de très braves soldats et dirigée par un évêque décidé et courageux. Après leur victoire, les Huns pillèrent la ville. Ce fut une grosse erreur, car cela leur fit perdre un temps précieux. En effet le jour de la bataille décisive de Catalaunum approchait.
451. 20 juin 451. Les «Champs catalauniques ».
Attila arriva sur place quelque temps auparavant. Le champ de bataille était proche du village de Mauriacum, situé entre Châlons-en-Champagne et Troyes. Aetius l’y attendait avec son armée. Dès la veille de la bataille proprement dite 15.000 hommes furent tués des deux côtés. Le lendemain, de l’aube au coucher du soleil, les forces adverses se livrèrent à un carnage mutuel d’une incroyable férocité. Le troisième jour, Attila fit mettre en rangs le reste de son armée pour la bataille décisive, mais il ne trouva plus d’ennemis. Ils étaient partis pendant la nuit.
Plusieurs versions circulent quant à la fin de cette campagne :
a)Aetius a définitivement vaincu Attila ;
b) Attila est parti pendant la nuit ;
c) les deux chefs ont abandonné une lutte devenue insensée en raison des énormes pertes humaines ;
d) par amitié, chacun a laissé à l’autre une victoire apparente.
Toujours est-il que le roi hun décida de réorganiser son armée. Un an après on le retrouve devant Rome.
452 : Attila menace Rome.
Un messager blanc de peur annonça l’arrivée d’Attila à la cour du grand pape saint Léon Ier. Le roi des Huns venait du Nord de l’Italie où il avait déjà détruit plusieurs villes (Padoue, Vérone, Venise) et, à la tête d’une immense armée, il marchait maintenant sur Rome.
L’ambassadeur de l’Empereur Valentinien III, lequel s’est enfui à Ravenne, suggère au Pape de suivre son exemple. Mais Léon Ier répond : « Moi, je ne fuis pas. Je vais au campement des Huns pour sauver Rome ! »
Ne pouvant s’opposer militairement, le Pape, en effet, partit à pied avec sa suite vers le Nord et, près de Mantoue, rencontra le grand roi hun qui faisait trembler toute l’Italie.
Il réussit à le persuader de repartir et, de plus, reçut sa promesse de faire la paix avec l’Empire Romain.
D’après la légende, à cette occasion, Jésus-Christ serait apparu à Attila, ainsi qu’au Pape. Il était entouré de Ses Anges. Saint Pierre et saint Paul apparurent également aux deux souverains, celui de l’Église, Léon Ier, et celui des Huns, uns, Attila. Le Seigneur ordonna alors à Son « fléau » (son fouet) de laisser encore un temps à la ville sainte des chrétiens – là où se trouvaient les ossements de Ses Apôtres et de Ses martyrs – pour s’amender. Si Attila obéissait, Jésus lui promettait la couronne apostolique et une protection spéciale pour son peuple et pour ses descendants. (Cet évènement fut immortalisé par la peinture magnifique de Raphaël qui se trouve au Vatican).
Attila obéit à Notre Seigneur : il épargna la ville.
Même s’il exigea un tribut, comme le suggèrent certains historiens, Attila se comporta, encore une fois, non pas comme un « Barbare sanguinaire », mais comme un souverain puissant, civilisé et magnanime, comme un païen respectueux de la Foi et du Pontife de son adversaire : indéniablement comme un grand seigneur.
La promesse que Notre Seigneur avait faite à Attila s’est réalisée 500 ans plus tard. Après la mort de leur roi en 454, une partie des descendants des Huns se joignirent aux Magyars arrivés dans les Carpates et, à la suite du saint roi des Hongrois, Étienne, ils prirent le doux joug de Jésus et devinrent chrétiens.
[1] Comment qualifier alors tant d’autres guerriers : Romains, Normands, Vikings, Danois, Russes, Mongols, Turcs, Chinois, Coréens, Amérindiens, ou encore les conquérants de l’Amérique du Nord ?
[2] Note de Pierre Gastal, professeur d’histoire. Il est tout à fait vrai qu’Attila était un homme cultivé, prudent et que ses Huns n’étaient pas pires que les autres barbares en matière de pillage et de destructions. Je pense que c’est leur aspect qui donnait cette impression de sauvagerie aux populations de l’Occident : leurs chevaux petits et trapus, leur faciès asiatique, leur chevelure, leurs vêtements, leur armement… Tout cela était complètement différent des « canons » indo-européens. A cet égard, l’historien Ammien Marcellin et le poète Claudien en donnent un portrait saisissant, insistant sur leur laideur.
[3] Le sens premier de la racine « kàl » était : « premier, chef ». Le deuxième sens: « fort » et « battre ». La laine brute, épaisse, forte et imperméable qui couvrait les maisons en forme de calotte n’était pas tissée; elle était obtenue par étirement, lissage et battage par des instruments en bois (« kalimfa » : bâtons pour écraser la laine), travail exécuté en général en commun (d’où le mot encore utilisé : »kalàka »). Les Huns, comme les peuples parents, utilisaient cette laine battue comme couverture pour les chevaux, comme tapis ou comme matériau pour les chaussures, etc. La maison des Huns, (comme celle des Sabirs-Magyars) s’appelait « Kamlik ». Ce mot gardait sa signification première (« chef, couvre-chef ») dans le mot : « kalap »(chapeau); et le deuxième sens, exprimant l’idée de « battre », comme dans le mot « kalapàcs »(marteau). Le mot « kalim » fut utilisé par la suite pour des tissus plus légers (sous forme de « kelme »), mais le mot d’origine fut plus tard remplacé en Hongrie par « nemez » et « filc ». Les peuples parents d’Asie Centrale, par contre, ont gardé le mot exprimant la première phase de la fabrication : « gyùrni » (pétrir). Cependant les étrangers, ne pouvant pas prononcer correctement la diphtongue douce « gy » commune en Hun et en Hongrois, l’ont simplifiée en « y » et l’ont ajoutée au participe passé du verbe (« gyùrt »). De là le mot « yourte » bien connu pour désigner les tentes que l’on peut voir aujourd’hui encore en Mongolie.
[4] Avant 1200 av. J. C. le nom donné à la Volga était: « Etil », soit une des formes du propre nom d’Attila.
[5] C’est ainsi que l’on trouve des Sabirs (le cinquème « peuple-frère »), dont une partie avait émigré au Nord de la mer Caspienne (et qui a donné son nom à la Sibérie). L’autre partie de ce peuple s’est retrouvée à l’Ouest du Caucase, 1500 kms plus loin. C’est ainsi que Frère Julianus, de l’ordre de saint. Dominique, ordonné par le Roi de Hongrie Béla IV en 1235, est parti pour découvrir la « Magna Hungaria » située dans la région de la montagne Oural et des fleuves Kama et Bjelaja. Les Magyars vivant dans ce royaume l’ont parfaitement compris car il leur parlait leur langue commune. Le rapport qu’il a établi lui-même à la suite de son deuxième voyage décrit l’anéantissement des Hongrois de l’Est et celui des Bulgares de la Volga par les Mongols, ainsi que la menace mongole sur l’Europe. (Epistola de vita Tartarorum, Archives du Vatican – section hongroise.)
[6] Voir l’inceste « légalisé » à la cour d’Egypte, l’homosexualité très répandue chez les Romains, la luxure et les sacrifices humains chez d’autres païens (en Afrique, en Amérique du Sud).