L’affaire du Glozel

Par le Dr Pierre-Florent Hautvilliers

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Les dessous de la préhistoire


Résumé : Le Glozel, près de Vichy, pose aux préhistoriens une énigme. Le site découvert en 1924 présente en particulier des traces d’écriture primitive sur des poteries d’argile à une époque qui serait bien antérieure à ce qui est habituellement admis pour son origine. De plus, les datations donnent une telle disparité de l’ancienneté des divers objets du même lot archéologique, allant jusqu’à 20.000 ans d’écart, que les préhistoriens ont préféré décréter avoir affaire à des faux mêlés à de vrais objets antiques, malgré des décisions du tribunal, plutôt que de remettre en cause leurs connaissances.

A une vingtaine de kilomètres au sud de Vichy, dans le Bourbonnais, le 1er mars 1924, un jeune homme de 17 ans, Emile Fradin, laboure son champ quand, soudain, la vache qui tirait la charrue s’enfonce dans le sol. Il explore la fosse ainsi mise à jour et en remonte des ossements humains et des terres cuites : des vases curieux et des plaques ou briques rouges couvertes de signes mystérieux. Le champ est alors surnommé le “champ des morts”.

Un médecin de Vichy, passionné d’archéologie, le docteur Morlet entreprend les premières fouilles qui se poursuivront durant 18 années. 3000 objets, outils, bijoux en os et en bois de cervidés, briques d’argile et poteries seront exhumés. Les plaques d’argile ressemblent à des tablettes sur lesquelles figurent des signes alphabétiques inconnus. C’est alors que “l’affaire” commence.

Les spécialistes de la préhistoire estiment qu’il est impossible, selon les connaissances de l’époque, que ces signes nombreux puissent être assimilés à un alphabet inconnu ou à quelque chose de semblable : l’alphabet est né au Moyen-Orient, et bien plus tardivement puisque que certains des objets retrouvés à Glozel sembleraient dater du néolithique.

Ces objets porteurs de ces signes ne peuvent donc être que des faux inventés par Emile Fradin : un petit faussaire, voire un escroc  ! Une commission internationale est créée pour examiner l’affaire et confirme la suspicion en hurlant à la supercherie en 1927. Aussi, le 24 février 1928, le président de la Société Préhistorique de France se croit autorisé à porter plainte contre X, c’est-à-dire contre l’inventeur. Le commissaire de police de Vichy est alors mandaté par le procureur pour perquisitionner les locaux contenant les trouvailles. A cette occasion le jeune Emile est giflé et un certain nombre d’objets sont volontairement brisés, tandis que deux cents autres sont emmenés comme “pièces à conviction”.

Vont suivre deux ans et demi d’enquêtes et de contre-enquêtes pour finalement reconnaître, en 1932, l’innocence d’Emile Fradin tandis qu’un rapport signé par le Conservateur des musée nationaux et un professeur du Collège de France conclut que “les trouvailles faites dans le champ dit de Duranthon appartiennent au début de l’art du néolithique sans mélange d’objets postérieurs”. Depuis les fouilles n’ont jamais été reprises et les passions et les polémiques sont loin d’être éteintes. Selon Marie Perpère, préhistorienne au Musée de l’homme, il faudra attendre – peut-être 100 ans ! – que les passions disparaissent, pour en reprendre l’étude. Le Glozel avait fini par être surnommé “l’affaire Dreyfus de l’archéologie” car, selon ses termes, “il y a des faux manifestes et des pièces authentiques” (!)… déclaration d’autant  plus curieuse que M.Emile Fradin avait été décoré des Palmes Académiques et de la médailles du Conseil Général en 1990, pour le bon sens et le courage qu’il avait montré au cours de ces années d’épreuve et de persécution.

En 1972, des techniciens du commissariat à l’Energie atomique procèdent à des datations par thermoluminescence de 25 tablettes et de divers objets : 20 des 25 tablettes remonteraient entre 700 avant Jésus-Christ et 100 après-Jésus Christ, tandis que certains objets en os daterait du paléolithique supérieur (-19.000 ans). En 1983, un nouveau sondage est effectué sous l’égide du Conseil supérieur de l’Archéologie, datant de nouveaux objets exhumés depuis l’époque celtique jusqu’au Moyen-Age ! Il semblerait que les pièces analysées en 1983 aient été entièrement détruites. Les relevés de magnétométrie laissent supposer que le gisement est beaucoup plus étendu qu’on ne le pense.

Le site n’a jamais été étudié.


L’énigme du Glozel demeure entière.

Les questions soulevées.

Cette évocation du site du Glozel et de ses démêlés préhistorico-judicières ne va pas sans soulever un certain nombre de questions que nous ne pouvons éluder.

1. Tout d’abord, l’attitude indécente des autorités préhistoriques de l’époque, qui décident de ce qui est vrai et de ce qui est faux, non pas en fonction des faits mais des concepts et des schémas théoriques et préconçus dans lesquels doivent s’encadrer les découvertes. Tout élément contraire ne peut être que faux. C’est avec cet a priori que Glozel a été jugé sur le plan préhistorique. Cela ne relève certes pas d’une attitude scientifique et montre de la part des auteurs plutôt  une attitude entachée d’un scientisme borné et étroit.

2. La conséquence de l’attitude de ces personnes qui se prétendent seules compétentes en préhistoire se retrouve dans les errements judiciaire qui ont néanmoins fini par reconnaître l’innocence d’Emile Fradin… toujours coupable cependant aux yeux des préhistoriens. Il est pour le moins anormal que les autorités préhistoriques aient eu ainsi recours aux forces de l’ordre pour imposer leur vérité préhistorique qui se montre ainsi un système de “pensée unique” imposé à tous. Ce monopole de pensée semble encore en  vigueur si l’on en croit les déclarations de la préhistorienne Marie Perpère.

3. Le site du Glozel met en cause les différentes méthodes de datation. Il est en effet inconcevable qu’un site ait été alimenté par des dépôts d’objets divers pendant quelques 20.000 ans au même endroit dans les mêmes caches. C’est pourtant la démarche été supposée être ici la seule manière de concilier les datations. Il y a là un manque de discernement scientifique avalisé par la communauté des préhistoriens ce qui laisse pour le moins rêveur… Que ce soit par thermoluminescence ou par le carbone 14, les objets d’un même lot préhistorique sont diversement et allègrement datés depuis 20.000 ans avant Jésus Christ jusqu’au Moyen-Age sans jeter le moindre soupçon sur la valeur de ces méthodes.

4. Il ressort de tout ceci que les hauts dignitaires de la préhistoire semblent plus enclins à imposer leur propre vision (faussée par l’idéologie évolutionniste) de l’histoire humaine qu’à rechercher la vérité préhistorique selon l’accumulation des découvertes qui remettent en cause leurs connaissances. Ici, comme au Régourdou 40 ans plus tard, c’est la version idéologique qui sera imposée quitte, si nécessaire, à recourir à la force publique, voire à la destruction du site.

5. Le dernier point d’étonnement concerne l’avalisation tacite de toute la communauté préhistorique devant les attitudes indécentes du recours à la force utilisée à Glozel comme au Regourdou et l’indifférence  passive à ces “dérapages”.

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Pour en savoir plus :

Association “Les Amis de Glozel”

Site préhistorique du Glozel

03250 Ferrières sur Sichon

Tél. : 04 70 41 12 96

“Glozel et l’écriture préhistorique” de A.Cherpillod, 80 F.

“Glozel et ma vie” de E.Fradin. (Ed. Archeologia, 1990, 272 p.) (En vente au musée, même adresse).

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