ADN : quand les « experts » se trompent

Par Jean-Marc Manach

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ADN : quand les « experts » se trompent[1]

Résumé : L’ADN fait aujourd’hui partie des techniques usuelles pour identifier les personnes et, à ce titre, sert aux enquêtes. Or le degré d’incertitude lié à la méthode est très élevé, ce dont le grand public n’a guère conscience. Les sources d’erreurs sont multiples, à commencer par la contamination de l’échantillon lors du prélèvement ou même au laboratoire. Ainsi la « tueuse en série » d’Heilbronn était-elle une employée de la société fournissant les cotons-tiges pour les prélèvements par la police. Surtout, l’analyse consiste à comparer quelques marqueurs localisés sur l’ADN, puis un calcul statistique établit la probabilité qu’un suspect soit le coupable. Or, d’un « expert » à l’autre, la probabilité change même d’ordre de grandeur. De plus le « fichage ADN » d’un nombre croissant d’individus (75% des noirs de 18 à 35 ans en Angleterre) rend la confrontation des profils ADN de plus en plus aléatoire. Il importe donc que le public, et surtout les juges, prennent conscience de l’incertitude résiduelle parfois considérable de la « preuve par l’ADN 

Souvent paré de toutes les vertus, l’ADN n’est pas la “reine des preuves” : erreurs de manipulation, d’analyse ou de conservation, “faux positifs“… les annales policières et judiciaires ont d’ores et déjà répertorié plusieurs cas de personnes, accusées et incarcérées, à tort, parce que leur ADN les désignait comme suspectes. Plusieurs scientifiques tirent aujourd’hui la sonnette d’alarme : les taux d’erreurs seraient bien trop importants.

En juin 2010, plusieurs utilisateurs de 23andme, l’une des entreprises proposant de décoder son propre ADN, découvrirent, stupéfaits, qu’ils n’avaient pas le même ADN que leurs enfants, frères, sœurs, parents, ou bien qu’ils étaient noirs, ou asiatiques (alors qu’ils étaient blancs)…

Quelques jours plus tard, 23andme découvrit qu’il s’agissait d’une erreur, une plaque comportant 96 empreintes génétiques ayant été retournée à 180 degrés, entraînant une confusion dans les noms de ses clients.

En décembre 2009, la société deCODE genetics, qui cherchait à concurrencer 23andme en proposant à ses clients une autre interprétation de leur ADN, avait expliqué à certains d’entre eux, à tort, qu’ils encouraient un risque élevé d’être atteints par la maladie d’Alzheimer : 23andme avait changé le format de ses données, mais deCODE ne s’en était pas aperçu, et continuait à utiliser une ancienne grille d’analyse…

En août 2009, un journaliste du New Scientist, qui avait demandé à deCODE d’analyser son ADN, reçut quant à lui cette étonnante réponse, par courriel : “La question va peut-être vous paraître étrange, mais êtes-vous bien sûr qu’il s’agit d’un Homo sapiens ?”

En l’espèce, il s’agissait d’un bogue (bug) logiciel affectant la façon d’extraire les informations de la base de données de deCODE… Mais l’erreur peut aussi être humaine, et avoir des répercussions d’autant plus graves lorsqu’elle permet de suspecter, voire de condamner, à tort, un innocent.

Onze erreurs judiciaires (au moins) imputables à l’ADN aux USA

En 2004, un procureur du New Jersey[2] annonça ainsi que le viol et le meurtre d’une étudiante, 36 ans auparavant, venait enfin d’être élucidé : “Grâce à l’ADN, nous avons enfin pu mettre un visage sur le meurtrier de Jane Durrua, et ce visage appartient à Jerry Bellamy”.

Deux ans plus tard, Bellamy fut libéré après que les enquêteurs découvrirent que l’échantillon génétique issu de la scène du crime avait en fait été contaminé, dans le laboratoire de la police technique et scientifique, au contact de l’ADN de Bellamy, qui devait y être également expertisé, mais dans un autre dossier…

L’affaire dite du Fantôme d’Heilbronn[3] est probablement la plus connue des erreurs liées à l’ADN. Qualifiée sur TF1 de “plus grande énigme criminelle de l’Histoire“, elle mobilisa plus de 100 policiers, sur plus de 1400 pistes différentes, entraînant 2400 analyses génétiques, afin d’identifier une tueuse en série à qui les polices allemande et autrichienne imputaient une dizaine de meurtres, et des dizaines de cambriolages, depuis 1993.

En mars 2009, on découvrit que l’ADN de la tueuse en série était en fait celui d’une employée de la société de matériel médical qui fournissait les cotons-tiges de prélèvement génétique utilisés par la police, et qu’il n’existait donc pas de Fantôme d’Heilbronn. Ce même mois de mars 2009, un homme, mis en examen en 2004 pour le meurtre de sa femme après analyse de son ADN, était définitivement mis hors de cause : une consultation du fichier d’empreintes génétiques révéla qu’il avait le même profil génétique qu’un autre homme, connu pour des faits de proxénétisme, mais décédé depuis.

Brandon L. Garrett, professeur à l’école de droit de Virginie, et Peter J. Neufeld, cofondateur de l’Innocence Project , ont permis, à ce jour, d’innocenter 261 personnes en démontrant que leur ADN ne correspondait pas à celui du véritable coupable.

Sur les 137 cas qu’ils ont analysés, en 2009, pour l’étude[4] qu’ils ont consacrée aux erreurs des “experts” de la police scientifique et technique, Garrett et Neufeld ont découvert 11 erreurs judiciaires imputables, en partie, à une mauvaise interprétation ou exploitation de “la preuve par l’ADN ’’.

Une « chance » sur 95 000, sur 47 ou bien sur 2 ?

En août dernier, Linda Geddes, journaliste au New Scientist , revenait de son côté sur le calvaire traversé par Richard Smith, accusé de viol, et qui risquait 25 ans de prison. Le prélèvement génétique effectué lors de son arrestation comportait deux ADN mêlés.

L’expert qui témoigna à son procès estima que la probabilité que l’autre ADN ne soit pas celui de la victime était de 1 sur 95 000. Son supérieur hiérarchique estima quant à lui que la probabilité était de 1 sur 47. Une expertise ultérieure avança qu’elle était plutôt de 1 sur 13. En changeant de méthode statistique, elle n’était plus que de 1 sur 2…

Une étude du National Institute of Standards and Technology (NIST), qui avait envoyé une même empreinte génétique à 69 laboratoires américains, révéla que les méthodes utilisées étaient tellement divergentes que les résultats obtenus variaient d’une magnitude de 10. Les résultats émanant de laboratoires utilisant les mêmes méthodes statistiques n’étaient guère plus rassurants : selon les analyses, la probabilité d’identification de l’ADN variait de 1 sur 100 000 à 1 sur un quadrillion (10 puissance 15).

Pour profiler quelqu’un, les “experts” analysent en effet généralement 13 marqueurs (ou loci, régions chromosomiques) de l’échantillon ADN qu’ils expertisent, dans la mesure où l’analyse de ces marqueurs suffit généralement à distinguer l’empreinte d’un individu, avant d’estimer la probabilité de concordance des profils (random match probability, RMP, en anglais), à savoir la probabilité de voir cet ADN correspondre à une ou plusieurs personnes. Dès lors, l’objectif n’est donc pas tant de déterminer l’”empreinte” ADN d’un individu que son “profil“, et ça change tout, pour Escondida et Timélos :

“Deux ADN différents peuvent donner deux profils ADN semblables justement parce que le profil n’utilise qu’une fraction de l’ADN et non l’ADN dans sa totalité. Pour pallier ces difficultés, les experts vont se livrer à un calcul de probabilités. L’idée est simple : même si on ne peut certifier que deux profils ADN identiques représentent bien un ADN unique, il est toujours possible d’essayer d’estimer la probabilité d’une coïncidence fortuite. Autrement dit, le résultat d’une expertise ADN n’est pas, contrairement à ce qu’on croit, une affirmation du type « l’ADN retrouvé dans cette trace appartient à telle personne » mais bien une affirmation du type « il y a x probabilités pour que l’ADN retrouvé dans cette trace appartienne à telle personne ». Si on peut réfuter, avec une certitude absolue, l’identité entre deux profils, on ne peut en revanche jamais confirmer celle-ci avec une certitude de 100 %.”

En mai 2008, le Los Angeles Times revenait ainsi sur le cas de John Puckett, un Américain qui, en 2004, à l’âge de 70 ans, se vit inculpé d’un meurtre commis 30 ans auparavant, parce que son ADN correspondait partiellement à celui prélevé sur la victime.

Lors de son procès, les experts de l’accusation avancèrent que la probabilité d’une coïncidence de profils ADN était de 1 sur 1,1 million. Les experts de la défense, utilisant d’autres méthodes de calcul, avancèrent les chiffres de 1 sur 40.000, et de 1 sur 16.400. Après 48h de délibéré, les jurés le déclarèrent coupable.

Or, d’après le Los Angeles Times, la probabilité que l’ADN de Puckett et celui du meurtrier fussent les mêmes était en fait de 1 sur 3… Car le fichier génétique répertoriait, à l’époque, 338.000 profils ADN, et qu’il convenait donc, pour affiner la probabilité, de diviser 338.000 par 1,1 million, soit une probabilité de concordance de profils de 1 sur 3…

Interrogé par le Los Angeles Times, l’un des jurés expliqua que le taux de probabilité de 1,1 million était ce qui leur avait finalement permis de conclure à la culpabilité de Puckett. Et que, s’ils avaient eu vent de ce taux de 1 sur 3 seulement, le verdict aurait très certainement été différent.

Condamné par un « expert », innocenté par 16 autres

Aux États-Unis, la fascination exercée par la police scientifique et technique porte un nom : le CSI Effect, du nom de la série télé (”Les experts“, en VF) qui cartonne en termes d’audience, et qui a bouleversé la façon de présenter le travail de la police à la télévision.

Or, cette vision, comme toute fascination, est une représentation glamour, romancée, exagérée et inexacte, pour ne pas dire faussée, de la réalité, comme l’ont noté[5] plusieurs sociologues et juristes américains : “Par exemple la place de la preuve ADN est grandement exagérée, tout comme sa pertinence. Les procureurs sont poussés à produire toujours plus de preuves scientifiques même si cela ne présente aucun intérêt pour l’affaire a priori. Bien que les technologies présentées par la série et ses dérivés existent dans les laboratoires criminels, elles demandent bien plus de temps et sont souvent bien plus équivoques dans la réalité. Les analystes craignent que les gens en viennent à croire que les sciences légales sont aussi efficaces que dans les séries télévisées et s’attendent donc à des effets plus spectaculaires dans les cours de justice.”

Pour comprendre pourquoi un seul et même prélèvement génétique pouvait ainsi être interprété de façon si différente, le New Scientist a demandé à 17 “experts” d’analyser un prélèvement génétique ayant permis la condamnation d’un homme, Kerry Robinson, pour viol. Comme le résume sobrement Le Matin, dans un article intitulé Crime : peut-on faire confiance à l’ADN ?[6]: “Les avis sont apparus étonnamment divergents : quatre ont affirmé que les résultats n’étaient pas probants, douze ont établi que la présence de l’homme en question sur le lieu du crime pouvait être écartée, et un seul s’est rallié à l’avis qui avait prévalu lors du jugement, concluant qu’il n’était pas possible d’exclure sa présence sur les lieux.”

Autrement dit : pour près des 3/4 des laboratoires, le prélèvement génétique permettait d’établir l’innocence du prévenu, pour 1/4 d’entre eux, il ne permettait de rien établir du tout. Et le seul laboratoire qui s’est rangé à l’avis de l’expert ayant contribué à faire condamner cet homme, n’a pas affirmé que ce fût lui le coupable recherché, mais que sa présence sur les lieux ne pouvait pas être exclue…

Pour le New Scientist, “la technique est subjective et faillible“. Or, il suffit de l’”opinion” d’un seul individu pour finir en prison. De fait, Richard Smith et Kerry Robinson, bien qu’innocentés par une grande majorité des laboratoires ayant contre-expertisé les échantillons génétiques leur ayant valu condamnations, sont toujours en prison.

« On n’est jamais sûr à 100 % »

Pour Raphaël Coquoz, chargé de cours à l’École des sciences criminelles de l’université de Lausanne et spécialiste de l’ADN, interrogé par Le Matin, ces divergences d’expertises ne sont pas très étonnantes : “Un profil ADN n’est pas quelque chose d’univoque : on lui accorde trop de valeur. L’analyse ADN donne une probabilité que telle ou telle personne ait été présente à un endroit. Le concept de probabilité est parfois difficile à entendre quand on aimerait voir les choses en blanc ou en noir.

En présence d’un profil “faible”, lorsque les traces sont infimes ou mélangées, la probabilité diminue. Lorsque le profil est de bonne qualité, les certitudes sont élevées, mais on n’est jamais sûr à 100%. L’ADN n’est qu’un outil parmi d’autres, qui peut mener à des erreurs judiciaires. Il faut le reconnaître.”

Tout dépend d’abord de la qualité de l’échantillon recueilli. Parfois, il est trop petit, ou abîmé, dégradé, pollué, quand il ne comporte pas plusieurs ADN, qui peuvent se masquer les uns les autres… rendant l’analyse encore plus ardue. Le mythe de l’infaillibilité des “experts“, et la pression de la hiérarchie et de la justice sont tels que, par ailleurs, les policiers procèdent de plus en plus à des prélèvements d’échantillons génétiques sur les scènes de crimes.

Un rapport[7] de l’autorité de contrôle britannique de la génétique (HGC) avait ainsi révélé, en 2009, que la police arrêtait de plus en plus de gens aux seules fins de les ficher génétiquement.

Alors que la délinquance baissait, les arrestations, et le fichage ADN progressaient, au point que 1 million d’innocents figuraient dans la base de données policières britanniques (forte de 6,3 millions de profils, dont 282.000 mineurs de moins de 18 ans), ainsi que 75% des Noirs de 18 à 35 ans.

Dans son rapport [8] sur le projet de loi de finances français pour 2011, le député UMP Guy Geoffroy rappelait ainsi que le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) continuait sa “montée en puissance, avec 1 582 595 traces génétiques enregistrées au 1er juillet 2010. Rien que sur l’année 2010, près de 375 000 traces supplémentaires devraient avoir été insérées. Depuis la constitution du fichier, de très nombreux rapprochements d’affaires ont été réalisés : 5548 avec une trace non identifiée, 25 884 avec l’empreinte génétique d’une personne mise en cause et 8796 avec celle d’une personne condamnée.”

Visitant en octobre 2010  un laboratoire de la police technique et scientifique, Brice Hortefeux a ainsi rappelé l’objectif fixé par son ministère de l’Intérieur : “réaliser des prélèvements d’empreintes génétiques sur 100% des cambriolages et des voitures volées retrouvées“.

Dans le même temps, et conséquemment, ceux qui sont transmis aux laboratoires d’analyse sont de moins en moins bonne qualité. De plus, il existe plusieurs techniques  et méthodes statistiques pour expertiser un échantillon génétique. Et moins l’empreinte est de qualité, plus il faut recourir à des techniques complexes, mais donc également plus compliquées à appréhender par un juge, et a fortiori par des jurés, qui n’ont jamais été formés aux subtilités de la statistique ni de la génétique.

L’ADN, une preuve essentiellement « à charge »

Si la génétique permet souvent d’accuser, ou d’innocenter, quelqu’un sans trop de difficultés, David Balding, un généticien et statisticien anglais, n’en estime pas moins que juges et jurés sont trop fréquemment confrontés à des preuves exploitées essentiellement “à charge“, pour confondre tel ou tel suspect, et non de manière neutre et scientifique. Il est ainsi courant qu’un laboratoire se voit demander si l’ADN de tel suspect, qui a été appréhendé, se trouve aussi sur l’échantillon prélevé sur la scène du crime. Ce qui est tout à fait différent que de demander au laboratoire d’identifier le ou les ADN du prélèvement, sans faire de lien, d’emblée, avec tel ou tel suspect.

Pour Peter Gill, qui déplore le “mythe” de l’infaillibilité de l’ADN, “le manque de compréhension de la part du public, mais également des juges et des avocats, est considérable“. Ainsi, aux États-Unis, il estime que seuls 10 à 15% des avocats dont les clients ont pourtant été, en tout ou partie, incriminés sur la base de leur empreinte génétique, effectuent une contre-expertise… Dane Krane, lui, estime[9] que le taux serait plutôt inférieur à 1%, soulignant la croyance aveugle qu’accorderaient les avocats à la preuve génétique…

Bruce Budowle, ancien responsable du laboratoire génétique du FBI, plaide ainsi pour que les laboratoires généralisent la contre-expertise et la vérification de leurs analyses, et pour que toutes ces données et conclusions soient aussi confiées aux avocats et défenseurs des personnes dont l’ADN a été identifié.

18 des 19 laboratoires interrogés par le New Scientist  procèdent à de telles contre-expertises, mais dans la majorité des cas, le second analyste a préalablement pris connaissance des conclusions de son prédécesseur, faussant ainsi potentiellement leurs résultats.

77% des personnes fichées, en France, sont « innocentes »

En 1994, la loi qui avait créé le fichier génétique américain avait expressément anticipé le fait que des chercheurs pourraient y effectuer des contrôles de qualité “dans la mesure où les informations personnelles et identifiables en seraient retirées“, ce qui est d’autant plus facile à faire que les identifiants génétiques fichés sont “non-codants“, et donc non susceptibles de révéler d’informations sensibles (une affirmation cela dit contestée par Catherine Bourgain, chargée de Recherches de l’Unité INSERM 535 “Génétique épidémiologique et structures des populations humaines“, pour qui il n’y a pas d’ADN “neutre”).

A contrario, l’article[10] que Linda Geddes, du New Scientist, a consacré à cette lettre ouverte, met plutôt l’accent sur les risques d’erreurs judiciaires. Elle cite ainsi plusieurs expériences, menées sur près de 300.000 profils génétiques extraits de trois bases de données ADN américaines. À la grande surprise des scientifiques, plus de 2000 profils partageaient des caractéristiques qui, normalement, auraient dû rendre leurs profils “uniques“.

Interrogé à ce sujet, Bruce Budowle, ancien responsable scientifique du fichier génétique du FBI, explique que sélectionner le profil d’un suspect afin de le comparer à un échantillon prélevé sur une scène de crime est à peu près aussi pertinent que de tenter d’identifier un suspect à partir de sa seule date de naissance : plus la base de données contient de profils génétiques, plus grandes sont les chances d’en voir un certain nombre partager certaines caractéristiques.

En décembre 2008, la Grande-Bretagne était condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme à détruire les profils ADN de 850 000 personnes, soit près de 13% des 6,3 millions d’individus présents dans le fichier génétique de la police britannique.

Les juges avaient en effet estimé que leur fichage génétique était une “atteinte disproportionnée au respect de la vie privée“, au motif que leur casier judiciaire était vierge, et qu’ils n’avaient pas été condamnés dans l’affaire qui leur avait valu d’être fichés, et qu’ils devaient donc toujours être présumés innocents.

Le Fichier national automatisé des empreintes génétiques, son équivalent français, ne comporte, lui, “que” 1,6 million de profils. Créé en 1998 afin de ficher les criminels sexuels, et lutter contre la récidive, il a depuis été élargi à la quasi-totalité des personnes à l’encontre desquelles il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elles aient commis un crime ou un délit (à l’exception notable de la délinquance routière et financière).

En décembre 2009, alors qu’il n’en recensait encore “que” 1,2 million de profils, le nombre de personnes condamnées enregistrées était de 280 399, soit 23%. Dit autrement : 77% des personnes fichées génétiquement, en France, n’ont été que “mises en cause” et suspectées, mais jamais condamnées. Elles sont donc toujours “présumées innocentes“…

Comme le soulignait l’an passé Matthieu Bonduelle, secrétaire général du Syndicat de la magistrature, au sujet du FNAEG, “Il faut reconnaître qu’il permet de résoudre des affaires, mais on est maintenant dans une logique d’alimentation du fichier. Personne ne prône le fichage généralisé, mais, de fait, on est en train de l’effectuer“ (voir  Objectif : ficher l’ADN de toute la population[11]).

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[1] Repris sur le site Le Monde.fr du 10 décembre 2010.

[2] articles.latimes.com/2008/dec/26/local/me-dna26

[3]  wikipedia.org/wiki/Fant%C3%B4me_d’Heilbronn

[4]  virginialawreview.org/articles.php?article=254

[5]  wikipedia.org/wiki/Incidence_des_Experts

[6]  lematin.ch/tendances/societe/crime-faire-confiance-adn-336432/

[7]timesplus.co.uk/tto/news/?login=false&url=http%3A%2F%2Fwww.thetimes.co.uk%2Ftto%2Fnews%2Fuk%2Fcrime%2F

[8]assemblee-nationale.fr/13/budget/plf2011/a2863-tviii.asp#P816_56165

[9]  bioforensics.com/Frames/intro.html

[10]newscientist.com/article/mg20527424.700-unreliable-evidence-time-to-open-up-dna-databases.html

[11]bugbrother.blog.lemonde.fr/2009/10/08/objectif-ficher-ladn-de-toute-la-population/

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