Courrier des lecteurs : À propos de l’article de Baruk paru dans le numéro 19

Par Madame S.R. (Paris)

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L’article du Cep n°19 n’insiste pas assez, à mon sens, sur ce qui fait l’originalité de la pensée de Baruk, qui méritait d’être mieux connue. J’ai relu ses « Mémoires d’un psychiatre », qui ne vieillissent pas ; bien au contraire ils contiennent, en substance, l’affirmation que la science et la foi ne s’opposent pas.

Voici pourquoi et comment. Baruk avait une haute idée non seulement du métier de psychiatre, mais aussi de la psychiatrie. Il disait d’elle qu’elle « est et demeure d’essence morale », ce que l’on n’ entend jamais dire ; et il le disait d’expérience. En effet, il avait assez vite remarqué, en examinant les malades mentaux, qu’une défaillance dans une partie de la personne humaine en entraîne souvent une autre dans une autre partie de cette même personne, et en avait conclu que l’homme est un tout, que la personne physique ne peut être dissociée de la personne morale, et que les données psychologiques ne peuvent être isolées d’un vaste contexte qui ne s’arrête ni à l’entourage familial, ni à la condition sociale. D’observation en observation -ses examens étaient conduits avec beaucoup de méticulosité-, il avait découvert que la maladie mentale pouvait aussi être fonction de la dégradation plus ou moins grande de la « conscience morale », qui est une « exigence interne » de la nature humaine. Ce concept de « conscience morale » n’a rien à voir avec une quelconque morale. D’autre part, -et c’est ce qui nous intéresse ici-, il est totalement étranger à ce qu’il est convenu d’appeler la « psychologie des profondeurs », c’est-à-dire au freudisme et à ses avatars, qui enferment le mot conscience dans le sens de « prendre conscience de ». Ceci est grave.

Baruk n’était pas de cette lignée destructrice qui descend de Darwin (la lutte pour la vie) et de Marx (la lutte des classes) et aboutit à Freud (sur-moi) en passant par Nietzche (sur-homme). Sa connaissance de l’homme a deux sources : son expérience clinique, sans cesse accrue et amplifiée par la confiance qu’il s’efforçait d’inspirer aux malades, et son étude de la Bible. Il s’était mis à l’hébreu vers l’âge de 40 ans, et a gagné à cette étude du texte sacré dans la langue originelle la certitude que la connaissance de l’homme qu’il  avait acquise au contact de ses malades était comme un écho de ce que racontent les livres saints. Il y voyait tout simplement que l’homme a été créé à l’image de Dieu, que les données bibliques pénètrent jusqu’au fond de l’homme, que le « Dieu vivant est au fond de nos entrailles ». Là, sa confiance rejoignait sa foi : il donne d’ailleurs aux deux mots tout le sens que recèle leur parenté.

A ce qui vient d’être écrit doit être ajoutée une dernière évidence capitale, et qu’il faut souligner avec force.

 Non seulement la psychanalyse ne peut pas guérir, parce qu’elle refuse à la conscience morale d’être constitutive de l’homme, mais comme elle entreprend de réduire les résistances du patient jusqu’au point zéro, elle s’attaque aussi à celles qui sont liées à l’éducation religieuse. Or, de l’aveu des psychanalystes eux-mêmes, cette aspiration vers le religieux n’a jamais pu être extirpée d’aucun patient par l’analyse. Traduisons : la conscience morale – et l’appel de Dieu – font partie intégrante de la nature humaine.

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