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Par Rigault Philbert

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Nos correspondants publient :

Il est des ouvrages qui restituent en bon ordre toutes sortes de connaissances grapillées de part et d’autre, et l’on remercie l’auteur de nous permettre ainsi d’assimiler en quelques pages ce qui lui aura coûté parfois plusieurs années d’étude. Le Bon Travail est tout autre chose. L’éditeur, Chiré, signale en couverture : « précédé de “testament d’inventeur”». Et, certes, les 30 premières pages, datées des 35 ans de l’auteur, nous introduisent dans cet émerveillement devant l’invention technique qui fut celui d’un enfant bricoleur devenu dessinateur industriel, sachant imaginer et mettre au point des machines originales destinées à soulager la peine des hommes. Puis le jeune constructeur entendit l’appel du Constructeur et quitta sa vie rurale, pour paître un troupeau largement urbain et souvent coupé de nombre de ces vérités que saint Benoît voulait faire découvrir et assimiler avec sa noble devise : ora et labora. Le labeur, certes, nous rappelle que l’homme fut condamné à « gagner son pain à la sueur de son front », mais – écrit l’abbé Rigault – celà « doit être regardé comme un décret de la Miséricorde plutôt qu’un acte de Justice » (p. 70).

De fait, alors que l’Antiquité païenne avait « déplacé la loi de la peine sur la multitude des esclaves […], la chrétienté avait redonné au travail pénible sa dignité. L’effort contribuait à la louange de Dieu » (p. 71). De là ce titre : Le Bon Travail. Tel peut être qualifié en effet ce travail qui unit la vie matérielle et la vie morale, qui permet à l’homme d’accomplir sa mission divine – et de le faire chaque jour – en même temps qu’il satisfait à ses besoins immédiats, au lieu d’attendre d’un futur indéfini une satisfaction purement temporelle qui n’arrive jamais sans contreparties. Le livre ouvre ainsi une page profondément critique de notre société, société hédoniste où alternent souvent un temps de pure pénibilité et un temps d’accomplissement de soi dans le pur loisir.

Bien des leçons de vie surgissent ainsi au hasard des pages, ainsi peut-être la clé de la non-tranmission du sens de l’effort dont furent victimes les nouvelles générations : « Tout ne s’enseigne pas en paroles et en écritures ! La vie quotidienne : la soupe qui mijote dans la marmite, l’eau qu’on tire au tourniquet du puits, le fagot qu’on jette dans le four à pain, la fourche sur le tas de foin et l’aiguille sur la chaussette… La vie quotidienne est un enseignement, le langage d’un trésor caché ! Langage que les générations des années 1950 n’ont pas voulu transmettre, aveuglées qu’elles étaient par le mythe du progrès ! Et les enfants, retournés à la barbarie, cherchent à tâtons le chemin de la lumière ! » Nous pourrions commenter longuement ce thème et de multiples autres dont ce petit livre se fait une mine où piocher.

Le bon travail nous enseigne surtout à bien vivre.

(Éd. de Chiré, 2017, 130 p., 14 €)

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