Accueil » Sur la distinction entre règnes minéral, végétal et animal

Par Bonneau Xavier1

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Résumé : La théorie évolutionniste affirme la continuité universelle entre tous les êtres, alors que les faits montrent partout des discontinuités, et jusqu’à des oppositions flagrantes entre les grandes catégories de la classification. C’est déjà vrai entre l’inerte (qui subit) et le vivant (qui filtre ses échanges avec l’extérieur). Ce l’est surtout entre les deux grandes catégories que constituent le règne végétal et le règne animal. La respiration est l’exact contraire de la photosynthèse ; les plantes n’ont pas d’organes de la locomotion ; la sève et le sang ont une mission analogue mais l’exercent de manière bien différente, tout comme, chez les animaux, entre la lymphe des insectes et le sang proprement dit des vertébrés.

On ne peut pas mettre les trois règnes : minéral, végétal et animal sur le même plan, comme nous l’apprenions en classe de sciences naturelles. Il y a une première distinction fondamentale entre le monde minéral et le monde organique, le non-vivant et le vivant. Car tous les êtres vivants sans exception sont bâtis sur le même plan : la cellule avec une structure moléculaire et un mode de fonctionnement identique à base de chimie du carbone, notamment le mode de reproduction identique avec la même machinerie d’acides nucléiques ADN et ARN. Aucun minéral ne possède ce type de structure, ni même partiellement quelque chose d’approchant.

Plus on avance dans la connaissance des mécanismes chimiques moléculaires, plus le fossé entre l’inerte et le vivant se creuse et s’élargit. Aucune structure intermédiaire, aucun chaînon manquant n’ont jamais été découverts, Messieurs les évolutionnistes ! Ni aujourd’hui, ni surtout dans les couches géologiques les plus anciennes (ou supposées telles) : une structure est vivante ou elle est inerte, exclusif l’un de l’autre !

Quant à imaginer des scénarios de passage de l’inerte au vivant par petites touches à l’aveugle, on butte toujours sur l’impossibilité de quelque chose de simplement plausible – à défaut de traces fossiles – en l’absence d’une cause supérieure.

Passons maintenant aux différences entre règne végétal et règne animal. La principale réside dans leur comportement face au carbone. Les végétaux sont autotrophes (ils utilisent le carbone atmosphérique pour synthétiser leurs molécules carbonées), alors que les animaux sont hétérotrophes (ils prennent le carbone chez d’autres êtres vivants).

Au niveau cellulaire, il y a deux organites spécialisés dans l’énergie cellulaire : la mitochondrie commune aux végétaux et aux animaux, qui accumule et libère l’énergie nécessaire au fonctionnement de la cellule ; et le chloroplaste, qui n’existe que dans les feuilles des végétaux : cet organite capte l’énergie lumineuse pour synthétiser des molécules carbonées.

L’équation fondamentale d’échange d’énergie dans la cellule de tout être vivant est donc la suivante :

C6H12O6 + 6O2 —> 6CO2 + 6H2O

Une molécule de sucre est brûlée en présence d’oxygène en libérant de l’énergie, et les deux produits finaux sont l’eau et le gaz carbonique. C’est le phénomène de la respiration.

Seuls les végétaux ont la faculté de faire jouer l’équation dans l’autre sens, c’est-à-dire : synthétiser du sucre à partir d’eau et de gaz carbonique. L’énergie exigée pour faire fonctionner l’équation en sens inverse est fournie par un complexe moléculaire situé dans les chloroplastes. Ce complexe (la chlorophylle) capte et transforme l’énergie lumineuse pour remonter le cycle du carbone dans le sens ascendant. C’est le phénomène de la photosynthèse.

Telle est la différence fondamentale entre les deux règnes végétal et animal. Il y en a bien d’autres. Par exemple, les structures des tissus sont différentes. Un bon biologiste examinant une cellule ou un groupe de cellules au microscope, vous dira tout de suite s’il s’agit d’un tissu végétal ou animal.

Il y a aussi une différence au niveau du mouvement, le motus sui défini par saint Thomas d’Aquin et qui est aussi un critère de distinction entre inerte et vivant.

Le motus sui peut se traduire au niveau biochimique par la faculté qu’ont les êtres vivants d’être parcourus de flux actifs (des flux d’oxygène, de liquide, de protons, d’électrons, toutes sortes de flux en fait), alors que les minéraux ne font que subir des processus physico-chimiques. L’intérieur d’une cellule vivante est séparé du milieu extérieur par une membrane ; c’est à travers cette membrane que la cellule pompe dans le milieu extérieur les éléments dont elle a besoin pour son fonctionnement, ou bien – dans l’autre sens – excrète les éléments résiduels dont il est souhaitable qu’elle se débarrasse.

Les processus chimiques d’absorption et d’excrétion sont le plus souvent des processus actifs, à contre-gradient de concentration (c’est-à-dire en sens inverse du processus d’osmose, purement passif, où deux solutions séparées par une membrane poreuse se mettent à l’équilibre, les ions et molécules allant du compartiment, où ils sont le plus concentrés, vers le compartiment où ils sont le moins concentrés). La cellule vivante contrôle en permanence son milieu intérieur et le maintient en conditions stables, à l’abri des fluctuations qui se produisent à l’extérieur. C’est bien entendu un attribut exclusif du monde vivant. Et les deux règnes : végétal et animal, ont bien cette faculté du motus sui, autant l’un que l’autre. Mais ils l’ont sur un mode différent.

La croissance des végétaux  (élongation des racines, des tiges, des rameaux…) se fait par divisions cellulaires dans des zones particulières ; on les mesure à l’œil nu à une échelle de temps hebdomadaire ou journalière. Il n’y a pas d’organes dédiés à la locomotion tels que les cils et les flagelles des animaux unicellulaires, qui leur permettent un mouvement rapide immédiat, à une échelle de temps de la fraction de seconde. Les mouvements brusques de certaines parties de plantes (la fermeture immédiate des feuilles de certaines espèces) sont des réactions chimiques à un certain stimulus, sans plus.

Au fur et à mesure que l’on monte dans l’échelle de complexité chez les animaux, ces organes de locomotion sont contrôlés par un système nerveux de plus en plus perfectionné, qui leur permet de réagir instantanément à leur environnement.

La course du guépard, le vol en piqué du faucon pèlerin ou les déplacements de la chauve-souris par écholocation sont des exemples connus de ces merveilles d’adaptation. Le mouvement chez les animaux est donc beaucoup plus actif et développé que chez les végétaux.

Cela ne veut pas dire que les uns seraient plus «évolués» que les autres, mais simplement que chaque créature est à sa place, accomplissant ce pour quoi elle est faite. Les plantes ont des organes parfaitement adaptés à la fonction qu’ils exercent. Par exemple, le système photosynthétique est une nano-machine avec un rendement exceptionnel inégalé et chez les animaux et dans le monde artificiel. Autre exemple : les arbres de grande taille. Nos chênes séculaires et autres séquoias d’Amérique ont des systèmes de conduits extrêmement performants pour tirer l’eau du sol et la monter sur plusieurs mètres pour assurer en instantané la demande transpiratoire du feuillage.

Un point de classification : qu’en est-il des organismes qui ne sont ni complètement végétaux, ni complètement animaux ? L’exemple le plus connu est celui des champignons. Ces derniers sont considérés à part, car ils ont la plupart des caractéristiques des végétaux, tout en étant hétérotrophes pour le carbone, comme les animaux. Ils ne photo-synthétisent pas et sont donc contraints de chercher leur carbone dans un milieu nutritif, souvent en parasitant un autre organisme. Les évolutionnistes disent : ce sont tout simplement des plantes qui ont perdu la fonction photosynthétique à un des tournants de l’évolution (lequel ? je ne saurais le dire : il y en a tant !).

Il y a probablement d’autres classes d’êtres vivants qui n’entrent pas forcément dans un des deux règnes, surtout chez les micro-organismes unicellulaires : virus, bactéries et autres. Des spécialistes de la classification des micro-organismes s’en préoccupent. Mes lointains souvenirs d’étudiant donnent quand même pour règle que la grande majorité de ces micro-organismes entre exclusivement : ou bien dans le règne végétal, ou bien dans le règne animal.

Mais l’exception existe de quelques classes ou groupes dits intermédiaires, qui suscitent toujours de vifs débats chez les taxonomistes.

Un exemple : le plancton à la surface des océans, formé de millions d’êtres unicellulaires agglomérés en masses flottantes. On y distingue très bien les organismes appartenant au phytoplancton de ceux appartenant au zooplancton, avec une chaîne alimentaire similaire à d’autres dans le milieu terrestre : le phytoplancton flotte passivement à la surface de l’eau et utilise la lumière comme source d’énergie pour se développer. Un premier groupe de zooplancton – généralement pourvu d’organites de locomotion – se nourrit de phytoplancton ; puis on arrive à un deuxième groupe du zooplancton, qui se nourrit du premier groupe ; on passe ensuite aux organismes pluricellulaires, avec une chaîne alimentaire bien connue : les crevettes, les sardines, les thons pour terminer par le roi des prédateurs : le grand requin blanc.

Concernant les liquides internes aux êtres vivants, on pourrait dire que tout organisme multicellulaire d’une taille critique ne peut fonctionner que si ses tissus peuvent absorber et excréter en continu des quantités de matière non négligeables. Le meilleur moyen à cette fin est l’irrigation permanente par un liquide circulant dans des vaisseaux dont l’architecture et les propriétés physiques et chimiques sont adaptées aux besoins de l’organisme. Ce liquide transporte dans les deux sens les substances nécessaires au fonctionnement de l’organisme. C’est la sève des végétaux et le sang des animaux.

Les complexes organismes multicellulaires des deux règnes possèdent donc bien des fluides internes, mais avec des modes de fonctionnement différents. Chez les végétaux, l’essentiel des échanges gazeux : oxygène, gaz carbonique et eau, se fait au niveau des stomates dans les feuilles. Il y a, dans le sens ascendant, un système de pompage et de montée de l’eau de la racine vers la feuille par des vaisseaux de sève brute. Et dans l’autre sens, la sève élaborée redistribue les photosynthétats (les sucres produits de la photosynthèse) dans les organes où ils sont nécessaires.

Chez les animaux, les échanges gazeux et liquides se font par différents organes de plus en plus spécialisés au fur et à mesure qu’on monte dans l’échelle de complexité : systèmes respiratoires pour les échanges gazeux, et systèmes digestifs pour les échanges liquides et solides. Avec le sang comme liquide interne au corps assurant l’absorption, la répartition et l’évacuation des produits.

Il y a évidemment plusieurs types de systèmes circulatoires selon les embranchements animaux et plusieurs types de sang à l’intérieur des groupes animaux. Il reste à définir exactement le mot « sang ». Dans un sens large : tout liquide irriguant le corps des animaux multicellulaires, ou dans un sens plus strict : liquide de composition donnée (analogue à celle du sang humain) irriguant le corps de tels groupes d’animaux. Avec, du point de vue de la composition du sang et de la structure des vaisseaux, des différences selon le genre, la famille, l’ordre, etc., différences d’autant plus grandes que les animaux sont éloignés dans le système de classification. Ainsi, de la même façon que le plan anatomique des insectes est différent de celui des vertébrés, leurs systèmes circulatoires sont aussi très différents : on parle de l’hémolymphe des insectes et non pas de sang stricto sensu. Notez quand même qu’on retrouve ici la racine grecque αίμα haïma (hémo)  « sang ». Il s’agit toujours d’un liquide dédié au transport dans des organismes pluricellulaires.

Physiologistes et hématologistes pourront commenter plus en détail. Un exemple, toutefois : l’hémoglobine des vertébrés contient un noyau de fer, alors que la molécule transportant l’oxygène dans le sang chez les escargots est l’hémocruorine contenant un noyau de cuivre. La formule chimique est différente mais la fonction est la même. L’hémoglobine est plus efficace que l’hémocruorine en termes de nombre d’atomes d’oxygène transportés et de rapidité de chargement/déchargement. Les escargots s’en tirent quand même, certes sans pouvoir sprinter comme un guépard. On est donc en droit d’affirmer que chaque créature a été pensée pour elle-même.

1 Ingénieur agronome INA-PG, docteur ès sciences.

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