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Par le Pr Pierre Cornillot
« Il a plu à Dieu qu’on ne pût faire aucun bien aux hommes qu’en les aimant.« (P. Le Prévost)
Les affections iatrogéniques, un délit à sanctionner1
Pr Pierre Cornillot2
Résumé : On parle de plus en plus souvent des maladies « nosocomiales », contractées à l’hôpital, en pensant surtout aux microbes résistant aux antibiotiques. Mais il existe aussi toute une catégorie d’affections « iatrogéniques », dont la cause directe est un acte médical. Le professeur Cornillot montre ici qu’il ne s’agit nullement d’un phénomène marginal, même si les professionnels de santé – c’est humain – ont tendance à l’escamoter et si les statistiques n’en rendent compte que très partiellement.
La grande presse est régulièrement saisie par des informations qui mettent en cause des médicaments qui se sont révélés dangereux ou toxiques. En provenance des É.-U. pour une part importante, ces affaires se soldent en général par des transactions ou des condamnations qui portent sur des sommes extrêmement élevées. On peut citer, parmi les plus récentes affaires, celle du Vioxx, un anti-inflammatoire dont les effets toxiques indésirables ont été reconnus; mais aussi celle du Prozac, un anxiolytique aux effets secondaires redoutables chez certaines personnes; ou encore celle du groupe des statines, hypocholestérolémiants, accusés de provoquer des désordres musculaires plus ou moins graves, parmi d’autres.
Mais ce qui semble échapper encore à l’opinion, c’est l’importance de ces affections, pas seulement médicamenteuses, dans le quotidien de notre système de santé et des conséquences personnelles et économiques qu’elles entraînent.
Un peu de curiosité dans la littérature mondiale apporte des éclairages stupéfiants.
Disons d’abord que les affections iatrogéniques ont une caractéristique générique commune : elles sont toutes dues à un geste médical au sens le plus large, le mot iatrogénique signifiant littéralement engendré par le médecin (iatros en grec). Et là, bien sûr, vient se situer une mauvaise volonté évidente des médecins et des laboratoires pour reconnaître la part de responsabilité qui leur incombe. Disons seulement que le monde médical et pharmaceutique avance à reculons dans la reconnaissance de l’importance du problème.
Pour tenter de prendre la dimension du problème, il faut souligner que la nature de ces affections est très variable selon qu’il s’agit de la prescription médicale d’un médicament susceptible de provoquer des désordres par sa nature même (un anticoagulant par exemple ou une chimiothérapie), d’une sensibilité particulière du patient à la nature chimique du médicament (certaines personnes sont allergiques à l’aspirine, d’autres à certains antibiotiques), d’une erreur de prescription entraînant un surdosage, ou d’une synergie défavorable entre deux médicaments conduisant à des troubles plus ou moins graves. Mais il n’y a pas que les médicaments qui peuvent être en cause. Certaines études montrent qu’à l’hôpital près de 50 % des affections iatrogéniques sont provoquées par les actes chirurgicaux. De même, on observe des effets iatrogéniques parfois graves dans différentes explorations et investigations à visée diagnostique, comme les coronarographies, les examens radiologiques avec produits de contraste (allergie à l’iode), les radiothérapies… C’est donc tout un monde de risques qui fait son apparition dans l’univers de la santé et qui pose de vastes problèmes de préjudices, de coûts et de responsabilités.
Certes, il n’est pas question de minimiser les effets bénéfiques de tous ces moyens d’investigation ou de traitement, mais il semble indispensable d’apporter toutes les clarifications nécessaires afin que cesse cette occultation permanente des risques encourus par les patients du simple fait des prescriptions qui leur sont proposées, et le plus souvent imposées.
Dans le but d’y voir plus clair, les autorités gouvernementales ont entrepris, en juin 2004, une grande enquête dans 71 établissements de santé: l’Étude nationale sur les événements indésirables liés aux soins, l’ENEIS. L’extrapolation tirée de l’étude ENEIS à l’échelon national permet d’avancer qu’il survient, chaque année, entre 350 000 et 450 000 événements indésirables graves chez les personnes hospitalisées, le risque étant un peu plus élevé en chirurgie (7 événements/1 000 journées d’hospitalisation) qu’en médecine (6,2/l 000). Les patients les plus fragiles sont hospitalisés en gériatrie, en réanimation chirurgicale et en néonatalogie.
Outre les décès consécutifs à ces troubles iatrogéniques (plusieurs milliers de cas par an), le coût de ces affections s’évalue actuellement à plus d’un million de journées d’hospitalisation en plus, soit 3 % au moins de toutes les hospitalisations, et se chiffre en milliards d’euros.
Mais le problème se complique encore si l’on tient compte des patients soignés en ville et hospitalisés pour une affection iatrogénique contractée hors de l’hôpital. L’étude conduit à évaluer ces cas: de 175 000 à 250 000 patients sont hospitalisés tous les ans, soit de nouveau 3 % des hospitalisations, les 2/3 pour une affection iatrogénique contractée en soins de ville et l/3 pour des complications d’hospitalisation antérieure.
Tout le monde s’accorde pour reconnaître qu’au moins 30 % de ces affections pourraient êtres évitées au prix de diverses mesures prophylactiques et de soins précautionneux.
La lecture de la littérature internationale ne fait que confirmer les conclusions de cette étude ENEIS. En particulier, aux É.-U., une étude, conduite par un groupe de médecins, réunit plusieurs données qui font frémir : en 1998, le nombre des personnes hospitalisées présentant une affection iatrogénique est évalué à 2,2 millions. Différents autres chiffrages permettent de conclure en 2003 à 8,9 millions d’hospitalisations inutiles, et à 790 000 décès, principale cause de décès avant les maladies cardiovasculaires et les cancers. Certes, ces estimations peuvent être contestées, mais plusieurs études font apparaître que le système médical et hospitalier minore volontairement la fréquence et la gravité de ces accidents.
Aux É.-U., seuls 5 % à 20 % des accidents iatrogéniques sont comptabilisés. En Grande-Bretagne, une étude sur des maternités montre que seul un quart des affections iatrogéniques est signalé.
On voit donc qu’il s’agit d’un problème considérable auquel le monde médical doit avoir le courage de s’attaquer. De ce point de vue, les esprits changent lentement, mais on peut raisonnablement espérer que diverses mesures permettront de réduire ces effets néfastes des actes médicaux et pharmaceutiques et que nous pourrons voir enfin reconnu un fléau si volontairement et si maladroitement étouffé.
La Pologne persiste et signe :
le vaccin contre le virus H1N1 est dangereux3
Le gouvernement polonais tient bon: il refuse toujours de faire procéder à la vaccination de la population contre le virus de la grippe H1N1.
« Nous savons que les sociétés qui offrent les vaccins contre la grippe H1N1 – a déclaré le Premier ministre, Donald Tusk, – ne veulent pas prendre la responsabilité des effets secondaires de ce vaccin. (…) Elles demandent des clauses qui ne sont probablement pas conformes à la législation polonaise, et qui rejettent toute la responsabilité sur le gouvernement d’un pays en ce qui concerne les effets secondaires et les indemnisations éventuelles. »
Le Premier ministre polonais fait allusion aux clauses dérogatoires du droit commun acceptées par les États-Unis et par la France pour dégager les laboratoires pharmaceutiques de toute responsabilité quant aux effets secondaires indésirables de ce vaccin. Normalement, un laboratoire est responsable des conséquences sanitaires indésirables d’un produit. Or la France a, par exemple, accepté de dégager la responsabilité des fabricants de « toute réclamation ou action judiciaire qui pourraient être élevées à [leur] encontre dans le cadre des opérations de vaccination. »
Que se passera-t-il dans quelques mois, quand les victimes des effets secondaires de cette vaccination massive effectuée en dépit du bon sens commenceront à affluer ?
Les malades vont-ils – encore une fois – se retourner contre l’État ?
Comment la France a-t-elle pu autoriser un tel désengagement de la part de laboratoires qui ont pourtant reçu des centaines de millions d’euros de commandes publiques ?
Bravo la Pologne !
1 Votre Santé n°123, janvier 2010, p. 3.
2 Ancien doyen de la Faculté de Médecine de Paris-Bobigny.
3 Votre Santé n°123, janvier 2010, p. 3.