Accueil » À propos des troubles liés au manque de repos

Par Desjardin Laurence

, , , , ,

BIBLE
« Le ciel et la terre passeront ; mes paroles ne passeront pas. »
(Mt24, 35)

À propos des troubles liés au manque de repos 1

Résumé: La loi biblique de Moïse que constitue le Pentateuque est-elle porteuse de mesures de prévention sanitaire, en particulier pour protéger du Syndrome d’Épuisement ? La comparaison de ces lois avec celles des civilisations du Proche-Orient ancien démontre qu’elles en sont culturellement imprégnées, mais que le monothéisme qui les inspire leur donne une grande particularité. Trois catégories de lois concernent la prévention des pathologies du stress : les sabbats, les lois alimentaires, la législation familiale et sociale. Les recherches scientifiques montrent que les lois établies dans le désert du Sinaï n’ont qu’un intérêt relatif dans ce domaine, tandis que les lois des deux premiers chapitres de la Genèse apparaissent comme physiologiques. L’étude de leur possible application permet de faire des propositions de prescriptions. Néanmoins, il apparaît que le sens premier de ces lois est avant tout spirituel. On trouvera ici quelques extraits de la thèse de médecine du Dr Laurence Dejardin2.
Pages dédiées à notre époque, au moment où l’Assemblée nationale vient de voter la suppression des
7 jours de réserve durant lesquels une femme sur le point d’avorter pouvait réfléchir, voire consulter, et où la « loi Macron » donne un coup de poignard mortel au principe du repos dominical…

« Ce que je veux faire passer devant toi, dit YHWH, c’est toute ma bonté. » Ex33, 19

Notions de chronobiologie

« L’activité rythmique est une des propriétés fondamentales de la matière vivante. » (Alain Reinberg)

Le prophète Jérémie parlait ainsi au peuple d’Israël de la part de Dieu : « Même la cigogne dans le ciel connaît le moment de sa migration ; tourterelle, hirondelle et grue savent quand il faut revenir. Mais mon peuple ne connaît pas les lois [héb. michpat, Lxx :  ta krimata] de YHWH » (8, 7).

Intuition, observation, temps font que l’on commence aujourd’hui a bien connaître certaines de ces lois-règles, même si l’on a toujours autant de difficultés à en tenir compte. Ce sont les causes et surtout les conséquences de ces résistances que nous allons tenter de mettre en évidence.

Au XVIIIe siècle, le botaniste Linné avait établi une horloge de flore, car il pouvait déterminer l’heure qu’il était selon l’ouverture ou la fermeture de certaines fleurs.

– Quelle heure est-il, s’il vous plaît ?

– Un instant, je vais demander à mon kalenchoe [belle plante grassetropicale]. 

Linné n’est pas un auteur romantique, mais un de premiers chronobiologistes.

Le spécialiste français en la matière, le Pr Alain Reinberg, nous rappelle qu’il n’y a pas si longtemps l’anatomie et l’histologie ont précisé l’endroit où se situe tel ou tel organe, répondant à la question où ? Peu après la physiologie a répondu au comment ? de leur fonctionnement. Reste une troisième grande question qu’il invite les médecins à se poser : quand fonctionnent-ils ? En plus de notre organisation dans l’espace qu’est notre anatomie, il existe une anatomie dans le temps. Car l’activité rythmique ne concerne pas seulement les fleurs, mais elle « est une propriété fondamentale de la matière vivante », donc bien sûr de l’homme.

Notre vie est soumise à des variations physiologiques, statistiquement significatives et reproductibles. Il s’agit de rythmes biologiques ayant un spectre de fréquences différentes. Ces variations, qui réapparaissent après des périodes prévisibles, peuvent être quantifiées par des approximations mathématiques, entre autres par une fonction sinusoïdale.

Il existe un chapitre de la biologie appelé « chronobiologie » qui s’attache à la description objective de la structure temporelle biologique.

Définition

La chronobiologie se définit comme l’étude de l’organisation dans le temps des êtres vivants, des mécanismes qui la contrôlent et des altérations qui peuvent la perturber.

On admet aujourd’hui que cette structure temporelle biologique caractérise les individus et, dans un organisme donné, les activités de systèmes d’organes, d’organes, de tissus, de cellules et d’éléments intracellulaires, jusqu’aux ultra- structures perceptibles au microscope électronique.

Les grands rythmes chronobiologiques

[…] Le « père » de la chronobiologie, le Pr Frantz Halberg, écrit : « Nous avons appris que l’atome, autrefois regardé comme indivisible, est sujet à la fission et à la fusion. Le domaine des variations physiologiques peut aussi être scindé en chrones et unifié en chronomes » [du grec  chronos « temps » + nomos « règle »].

En fonction de la période prépondérante, la chronobiologie distingue trois grands domaines de rythmes :

a- Les rythmes circadiens (du lat. circa « environ » + dies « jour ») :

D’une période équivalent théoriquement à un jour de 24h, mais qui varie en réalité de 20 à 28h. Ce rythme apparaît dans nombre de fonctions qui concernent :

– Les influences exogènes de l’alternance du jour et de la nuit, avec leurs répercussions plus ou moins cycliques sous forme d’exigences sociales, de l’éclairage artificiel, de phénomènes électromagnétiques, de la température…

– Les cycles circadiens endogènes […] :

Tous retentissent sur le repos et l’activité, la fatigue et la somnolence.

Les rythmes circadiens prédominants sont : la sécrétion de mélatonine (le meilleur témoin de la rythmicité circadienne), les variations de la température corporelle et la sécrétion de cortisol.

b- Les rythmes ultradiens (du lat. ultra + dies, c’est-à-dire d’une fréquence plus rapide qu’un rythme circadien, donc d’une durée inférieure à 24h)  […].

c- les rythmes infradiens (du lat. infra+ dies, d’une fréquence plus lente qu’un rythme circadien, donc d’une période supérieure à 24h) […].

Dans notre monde qui va toujours plus vite, une plainte incessante nous parvient, qui a commencé comme un murmure, puis s’est amplifiée progressivement jusqu’à devenir aujourd’hui un bruit presque assourdissant, en tout cas menaçant : « nous sommes stressés, et nous voici épuisés, épuisés parfois à en mourir. »

Certains cherchent le repos dans diverses substances : drogues, alcool, psychotropes, sucre… D’autres, convaincus qu’il s’agit d’un mal typiquement occidental, se tournent vers le lointain Orient dans l’espoir d’y trouver une source d’apaisement et de bien-être, peut-être même de bonheur : yoga, méditation, ashrams, retraites spirituelles, chamanisme… fleurissent abondamment dans nos contrées.

Ce n’est pas notre propos ici de discuter du bien fondé de ces pratiques. Mais familière d’un ouvrage, oriental lui aussi, d’un Orient plus « Proche », ouvrage qui parle de repos, de paix, de vie, nous nous sommes demandé si ce qu’il en dit serait encore pertinent pour nos sociétés modernes. Il s’agit de la Bible où, dès le premier chapitre, il est question de repos, Dieu lui-même s’étant reposé de ses œuvres le sixième Jour de la création. Puis il y est question de « stress3 » : division, peur, culpabilité, mort ; et de tentatives de réponses à ce stress par l’instauration de lois, des lois données à Moïse sous l’inspiration du même Créateur.

Ce sont ces lois que nous avions voulu explorer dans les cinq premiers Livres bibliques, de la Genèse au Deutéronome. Et nous avons souhaité le faire avec le regard d’un médecin, d’un médecin généraliste, sous l’éclairage de la science de ce début de XXIe siècle.

La Bible ne se présente pas comme un Livre scientifique, aussi avons-nous pris le temps d’en présenter les grandes lignes, puis, par un travail rétrospectif, de souligner les lois qui pouvaient avoir une valeur hygiénique. L’hygiène est le socle de la prévention, c’est essentiellement grâce à elle que l’espérance de vie a presque doublé en un siècle. Assainissement des eaux, en particulier pour les rendre potables, lavage, notamment des mains, traitement des déchets, des cadavres, isolement et déclaration des maladies contagieuses, gestion des stocks alimentaires, apports caloriques suffisants, équilibre nutritionnel, repos, activité, travail, influence de l’équilibre social, familial et affectif, connaissance de la physiologie depuis l’observation macroscopique jusqu’aux mécanismes moléculaires, sont autant de choses qui ont contribué à la santé de la vie.

Or, beaucoup des lois bibliques portent sur presque tous ces facteurs, aujourd’hui considérés comme fondamentaux dans le domaine de la prévention. Il nous fut donc aisé de les repérer.

Bien que ces textes soient considérés comme étant d’inspiration divine par les croyants juifs et chrétiens qui s’y réfèrent, ils s’inscrivent dans un contexte historique et culturel. Nous avons eu la curiosité de savoir dans quelle mesure les pays du Proche-Orient Ancien qui entouraient Israël ont pu influencer la rédaction de ces cinq premiers livres de la Bible.

Nous avons mis en évidence qu’Israël n’est pas une nation « extraterrestre », elle s’inscrit complètement dans son contexte culturel et vivait en interaction avec les sociétés qui l’entouraient.

On a beaucoup parlé de l’influence de la Mésopotamie, et, dans une moindre mesure, de l’Egypte, sur la rédaction des textes bibliques, et nous avons vu qu’elle est incontestable. Mais nous avons pu souligner que l’inverse est probablement vrai : la culture sémite, très ancienne, a également fortement influencé ces pays, en particulier leurs mythes. La tradition orale ayant largement précédé l’écriture, on peut émettre l’hypothèse que les textes bibliques fondateurs sont issus de récits transmis oralement depuis très longtemps, lesquels ont pu influencer les traditions des autres pays du Proche-Orient Ancien, les similitudes entre les textes bibliques et les autres traditions pourraient aussi s’expliquer de cette manière.

En ce qui concerne les lois proprement dites, nous relevons trois éléments :

– Dans leur forme, beaucoup d’entre elles se rapprochent de ce que l’on trouve aussi en Mésopotamie et en Égypte.

– En revanche, les lois dites de pureté, que nous avons identifiées comme pouvant avoir trait à l’hygiène, semblent assez spécifiques à Israël, en tout les cas pour la majorité d’entre elles. Le sabbat est une spécificité biblique.

– La différence majeure se trouve dans la spiritualité qui les inspire.

Le monothéisme du peuple hébreu en est bien sûr la pierre angulaire, c’est une vision radicalement différente, nouvelle et totalement unique dans ces temps anciens. Nous avons vu qu’il n’a pas grand-chose à voir avec ce que l’on a appelé à tort la tentative de monothéisation de la religion égyptienne par le pharaon Akhenaton. Pour ce dernier, il s’agissait de donner la prééminence à une divinité sur toutes les autres, et d’adorer un élément de la nature, en l’occurrence le soleil.

A contrario, la foi d’Israël se place, non pas dans un dieu parmi d’autres, mais dans un Dieu unique, affirmant qu’il n’en existe qu’un. Ce Dieu n’est ni une représentation de la nature, ni anthropomorphique, il est Esprit, transcendant, Tout Autre, Créateur.

L’homme est appelé à adorer le créateur et non la créature : ni le cosmos, ni la nature, ni les humains ne peuvent être divinisés.

Cela a de multiples conséquences, parmi lesquelles une qui nous intéresse plus spécialement pour son influence sur la science : les pratiques magiques sont rigoureusement interdites. Le Dieu unique est le maître du monde qu’il a créé, et c’est à Lui seul que l’on s’adresse pour agir dans ce monde. Il est demandé à l’homme de respecter la création, d’en prendre soin, de l’observer, de la découvrir et de s’en émerveiller en adorant celui qui en est l’Auteur, afin d’en tirer le meilleur profit.

Les spécialistes pensent que cette vision du monde physique et spirituel a favorisé une science de l’observation rationnelle, telle qu’on la conçoit aujourd’hui.

C’est peut-être pourquoi il ne nous a pas paru aberrant ni anachronique de proposer une étude scientifique de certaines de ces lois.

En raison de son extrême actualité, nous avons choisi de traiter du repos et de la prévention du stress.

Les lois bibliques ayant trait au repos se trouvent dans le thème du sabbat : repos tous les sept jours, toutes les sept semaines, tous les sept ans, tous les 49 ans (7×7 ans). Cette rythmicité nous a amené à nous intéresser à la chronobiologie, qui est l’étude des rythmes biologiques. Nous avons découvert qu’il existe bien un rythme biologique de sept jours, et que celui-ci n’est pas induit par nos rythmes hebdomadaires de repos, mais qu’au contraire, nos semaines de sept jours sont nées de rythmes septénaires endogènes, génétiques, appelés rythmes circaseptains.

Le manque de repos est un facteur de stress organique évident, comme à l’inverse le stress trouble notre repos. Nous avons donc approfondi la physiologie du stress et le syndrome d’épuisement qui est l’aboutissement d’un stress devenu chronique, ce qui nous a permis de connaître les facteurs de risque de ce syndrome, et ainsi de distinguer les autres lois qui pouvaient avoir un intérêt pour le prévenir : les lois relatives à l’alimentation, et à la vie sociale et familiale.

En éclairant ces trois domaines législatifs par des recherches scientifiques, nous avons fait quelques observations dont certaines, il faut le dire, ont été pour nous de réelles découvertes, parfois même des surprises.

Ainsi, il est apparu que si le repos est à l’évidence nécessaire, c’est bien d’un repos tous les sept jours dont nous avons besoin, en particulier à cause du rythme circaseptain du cortisol4, le non-respect de ce rythme est apparu comme nettement pathogène. L’étude des rythmes scolaires, éclairés par la chronobiologie, a également montré la nécessité d’un repos toutes les sept semaines, plus particulièrement à deux périodes de l’année, qui correspondent aux fêtes juives ordonnées par Moïse, et qui duraient une semaine, exactement le temps nécessaire à la restauration des rythmes biologiques perturbés par le stress. Nous n’avions pas anticipé cette découverte, ni son corollaire, à savoir que notre physiologie est conçue pour être physiquement active six jours sur sept, le manque d’activité à ce rythme ayant aussi des effets délétères pour notre santé.

La plus grande surprise est venue de l’étude sur les lois alimentaires. Il est apparu que les lois du Sinaï proprement dites, concernant la distinction entre animaux purs et impurs, pour la consommation, ainsi que l’exclusion du sang, n’avait qu’un intérêt très relatif pour notre santé, et quasi inexistant dans la prévention du stress. En revanche, nous avons découvert qu’il semble, en l’état actuel de nos connaissances, que le régime le plus adapté à la physiologie humaine, à la prévention et plus encore au traitement du syndrome d’épuisement, soit celui donné dans le premier chapitre de la Genèse, dans le jardin d’Éden : un régime cru constitué uniquement de fruits et légumes verts, de feuilles tendres, à l’exclusion de tous produits animaux, évitant aussi les céréales et les légumineuses puisqu’elles ne sont digestes que si elles sont cuites.

Dans notre monde de produits raffinés, transformés, concentrés, de prêt à consommer, de snack et de fast-food, c’est quasiment révolutionnaire !

Enfin, les lois relatives à ce que nous avons qualifié de relations affectives sont celles qui nous ont le plus touchée, d’abord parce qu’elles parlent de relation, d’amour et de foi, mais aussi par leur portée préventive et thérapeutique. Nous n’avons pu que survoler l’extraordinaire pouvoir du lien affectif, et d’une vie amoureuse stable et durable, avec le sentiment qu’à la fois tout a déjà été dit sur le sujet, et que pourtant tout reste à découvrir, comme une galaxie dont on aurait identifié la plupart des étoiles mais qu’il nous reste à explorer. Nous espérons que ce modeste travail contribuera à stimuler cette exploration.

Il nous fallait savoir si ces découvertes sont applicables à nos vies quotidiennes. Dans l’absolu, il semble bien que oui, mais une réalité s’est faite jour tout au long de notre étude, l’obstacle majeur à notre santé ne se trouve pas dans une potentielle difficulté intrinsèque à leur application, mais dans la nature complexe de l’être humain, que la Bible définit comme pervertie. Tout en nous aspire à la vie et à la santé, et en même temps une force de destruction nous pousse vers la mort, et ce, même lorsque nous sommes convaincus de ce qui est bon pour nous.

Nous n’en avons pas moins proposé un petit protocole de prévention et de traitement du syndrome d’épuisement, qui tient compte à la fois de ce qui est actuellement répertorié dans la littérature scientifique, et des apports de l’étude de ces lois. Les deux approches se confondent souvent, avec toutefois quelques spécificités apportées par ces dernières, et dont il nous semble que l’intérêt n’est pas négligeable.

Nous pouvons donc répondre maintenant à la question initiale : la loi de Moïse est-elle porteuse de mesures de prévention, particulièrement en matière de stress ?

Elle ne l’est pas totalement en ce qui concerne la loi du Sinaï, parce qu’en tenant compte des défaillances de l’esprit humain, elle maintient des habitudes non physiologiques ; mais elle le devient pleinement si l’on considère les lois créationnelles des trois premiers chapitres de la Genèse, tout simplement parce que celles-ci sont totalement physiologiques : elles nous rappellent ce pour quoi nous sommes faits, nos besoins fondamentaux, que ce soit en matière de repos et d’activité, d’alimentation ou de relation.

Il n’aurait pas été honnête de notre part de travailler sur un livre comme la Bible sans tenir compte de son message essentiellement spirituel. Cela nous a paru plus intéressant, que le thème central de la Bible tourne autour de la problématique que nous venons d’évoquer : cette ambivalence de l’être humain concernant son attrait pour la vie et sa tension vers la destruction et la mort. La Bible en situe l’étiologie5 dans la rupture entre l’humain et son Créateur, relatée de façon plus ou moins allégorique dans les premiers chapitres de la Genèse. Tout l’Ancien Testament, ou Tanakh6, révèle les effets de cette rupture, ainsi que la nécessité, et pourtant l’impossibilité pour l’humain, d’y échapper. Le Nouveau Testament, ou Nouvelle Alliance (ou Alliance Renouvelée), offre le « remède » : la réconciliation de l’humain avec son Créateur, lequel, répondant à notre incapacité à revenir vers Lui, vient Lui-même à nous en s’incarnant dans une chair d’homme, en la personne de Jésus. La Bible se termine par le livre de l’Apocalypse, ou « Révélation », qui révèle le projet de Dieu : re-créer le monde, nouveau, où les nations se nourriront, comme dans le jardin d’Éden de la Genèse, des fruits et des feuilles d’un arbre de Vie éternelle, cet arbre étant une allégorie de la présence même de Dieu.

Bien que sortant du champ strict de la médecine, nous avons souhaité terminer par cette approche spirituelle, parce qu’elle se présente comme la source du vrai repos, encore appelé la paix, à laquelle nous aspirons tant, et qui est le thème central de notre travail puisqu’elle est le contraire du stress.

Certains théologiens réfutent toute valeur médicale, ou même hygiéniste, aux textes bibliques. À l’aide de cette étude, nous pensons avoir montré que cette position est réductrice.

La position inverse le serait tout autant ; nous reconnaissons pleinement que ce n’est certainement ni l’objectif, ni le sens premier de tels écrits. Bien qu’elle soit traversée de récits historiques, allégoriques, épiques, poétiques, et même d’informations d’intérêt hygiénique, la Bible se présente avant tout comme un livre spirituel, aussi proposons-nous, dans l’épilogue qui suit cette conclusion, de nous pencher sur la portée spirituelle des lois que nous avons étudiées.

Le professeur Henri Joyeux rappelait, lors d’une conférence à Aix-en-Provence le 2 mai 2012, ce que nombre de grands scientifiques ont humblement constaté : chaque découverte nous fait réaliser l’immensité de notre ignorance. Comme la plupart de nos consœurs et confrères, nous souhaitons soulager quelque peu les souffrances de nos contemporains et contribuer à leur bien-être par la pratique de la science médicale, mais face à l’ampleur de la tâche et de notre ignorance, nous voulons rester modeste et curieuse, grandir dans cette science mais ne pas y croire comme l’on croit en Dieu. Nous finirons donc par une note non pas scientifique mais poétique ; la poésie, la musique, l’art et la foi nous transportent au-delà de la connaissance et de l’ignorance, pour nous donner un aperçu de la Beauté et de la Vie qui n’a pas besoin d’être expliqué pour nous être communiqué.

Une image nous a souvent accompagnée au cours de ce travail, celle d’un couple d’Aras bleus survolant une forêt équatoriale. Ces splendides oiseux tropicaux passent chacun leur vie en compagnie d’une seule et même compagne, et ne se nourrissent que de fruits sauvages, ces comportements font d’eux des animaux paisibles et pacifiques, reposants en quelque sorte, réunissant en eux ces trois lois créationnelles que sont le repos, l’alimentation originelle et le lien amoureux.

Est-ce parce qu’au moment du drame de la rupture entre l’humain et son Créateur ils volaient suffisamment haut pour ne pas en subir trop les effets ? Ou est-ce parce qu’ils vivent au-dessus de la canopée, loin de la terre des hommes, et si près du ciel ? À moins qu’ils ne soient des messagers de Dieu, une « Bible vivante », envoyée à ceux qui ne la lisent pas…

Bibliographie (abrégée) :

BEAU Jacques & VIBERT Jean-François, Rythmes biologiques : de la Cellule à l’Homme, Préface du Pr Franz Halberg, et de Germaine Cornelissen, Paris, Ed. Polytechnica, 1993.

BLOCHER Henri, Révélation des origines. Le début de la Genèse, Lausanne, Presses Bibliques Universitaires, (1979) 2e édit. revue & augmentée 1988.

FRANKL Viktor Emil (Pr), La psychothérapie et son image de l’homme, Paris, Éd. Resma, 1970.

JOYEUX Henri (Pr), Changez d’alimentation, Monaco, Éd. du Rocher, 7e édit. revue & augm., 2013.

JOYEUX Henri & BAUER Henri, Le Pasteur et le chirurgien. En quête du premier thérapeute, Paris, DDB, 2014 ; y est citée la thèse du Dr Laurence DEJARDIN.

LACROIX Bruno, « S’adapter, c’est survivre », in Nutra News, du 1er décembre 2006, sur le site : nutranews.org.

REINBERG Alain, Le temps humain et les rythmes biologiques, Paris, Éd. du Rocher, 1998.

—, L’art et les secrets du temps. Une approche biologique, Monaco, Éd. du Rocher, 2001.

—, Nos horloges biologiques sont-elles à l’heure ? coll. « Les Petites Pommes du savoir, 52 », Paris, Ed. Le Pommier, 2004.

ROSSI Ernest-Lawrence, Psychobiologie de la guérison : la communication corps/esprit au service de la santé, Paris, Le Souffle d’Or, 2002.

TOURNIER Paul (Dr), Bible et médecine, Neuchâtel-Paris, Delachaux & Niestlé, (1951) 3e édit. 1976.

________________________________

ADDENDUM I.

« Retrouver la santé du jardin d’Eden » : conférence du Dr Laurence DEJARDIN à Pierrerue le 5 octobre 2013 ; à écouter sur le site : croisements04.over-blog.com :

(Extraits à partir de 20’ 13’’/ 60’) : « Il a été observé dans les rythmes scolaires que le fait d’avoir une coupure le mercredi et d’avoir deux jours de repos les samedi-dimanche, le lendemain de ces jours de repos il y a un creux dans les capacités intellectuelles, cognitives et de mémorisation des enfants. Et au contraire, si les enfants ont une activité le mercredi et une activité le samedi ou le dimanche (pas ces deux jours, car il faut un jour de repos nécessaire à la récupération et à l’assimilation des connaissances), donc s’il y a 6 jours d’activité sur 7, alors leurs capacités cognitives, de mémorisation, de concentration sont meilleures. Donc nous sommes faits pour nous reposer le 7e jour, mais nous sommes faits aussi pour être actifs les 6 autres jours. C’est un peu ce qu’ont expérimenté aussi les Soviétiques [qui imposèrent 5 jours de travail + 1 chômé en 1929 : sans succès, si bien qu’au bout de onze ans Staline dut rétablir la semaine traditionnelle] : prendre trop de repos n’est pas bénéfique non plus7.

Un autre rythme m’a aussi intéressée : dans l’année, il y a un rythme de 7 mois, et l’on voit dans la Bible qu’il y a deux fêtes où est demandé un repos de 7 jours complets : la fête de Souccot, ou des Tabernacles, qui a lieu au début de l’automne en général, [pour nous chrétiens à la période de la Toussaint, fête célébrée début novembre], et la fête de Pessah, la Pâque juive, [pour nous chrétiens : la fête de Pâques], qui a lieu au début du printemps. Il est demandé au peuple d’Israël de se reposer 7 jours complets à ces deux périodes.

Là encore, j’ai découvert, en étudiant particulièrement les rythmes scolaires, qu’à ces deux périodes de l’année, il y a des creux dans les capacités biologiques et psychologiques de l’être humain. C’est une période où l’on est en baisse de capacités ; on a donc besoin de repos.

Une autre chose très intéressante, c’est que les spécialistes de la chronobiologie se sont rendu compte que, quand on ne respecte pas les rythmes biologiques, il y a ce qu’on appelle une « désynchronisation ».

Normalement, tous nos rythmes sont synchronisés : la température corporelle, le rythme cardiaque, la sécrétion du cortisol8, etc. Si on ne les respecte pas, ils se désynchronisent ; cela induit des maladies qui peuvent être graves, puisque l’OMS a même reconnu le cancer comme une des conséquences du travail posté, par exemple les « trois-huit » qui désynchronisent les rythmes biologiques. Les chronobiologistes ont remarqué que, pour resynchroniser les rythmes, il faut se reposer 7 jours : c’est un cycle complet. Si on ne respecte pas 7 jours complets de repos, on ne resynchronise pas ses rythmes et donc la pathologie s’aggrave, alors qu’il y a moyen de récupérer en se reposant 7 jours complets.

Donc, de fait, avec 7 jours de repos, aux deux périodes de l’année, sur le plan biologique, tout correspond à ce qu’a découvert la science. Cela veut dire pour nous qu’on a intérêt à se reposer à ces périodes-là. Les chronobiologistes font remarquer aussi qu’il faut bien 7 jours pour resynchroniser les rythmes, mais si l’on veut « fixer » cette resynchronisation, il est mieux de prendre 15 jours de repos. Partez donc en vacances à la Toussaint et à Pâques – à d’autres moments si vous pouvez en plus, tant mieux ! –, mais ce sont vraiment à ces deux périodes qu’il faut se reposer […].

Donc, on peut dire que ce 7e jour par semaine et ces deux semaines de repos par an correspondent à nos besoins physiologiques. »

ADDENDUM II .

« Le repos shabbatique, moteur du processus d’auto-guérison » : entretien du Dr Laurence DEJARDIN avec Thierry CASASNOVAS, le 26 septembre 2014. Cf. la vidéo sur Youtube :

(Extraits à partir de 17’ 44’’/ 40’ 12’’) : « Dans la Bible, il est question d’un rythme de 7 jours. Dieu crée le monde en 6 Jours et le 7e Jour il cesse son activité, et il demande à l’homme de respecter ce repos […]. Je me suis alors posé la question de savoir si ce rythme de 7 jours avait un intérêt pour nous d’un point de vue physiologique. Donc mes recherches se sont tournées vers ce qu’on appelle la « chronobiologie », qui est l’étude des rythmes du vivant, qui intéresse tout vivant depuis des algues monocellulaires jusqu’à l’être humain dans toute sa complexité. Et les études ont été surprenantes puisqu’elles ont été faites par des scientifiques qui n’étaient pas forcément des gens croyants, enfin qui étaient complètement détachés de cette question de savoir si la Bible disait vrai ou pas.

Or, on a observé qu’en effet il existe des rythmes de 7 jours dans le vivant. On les a constatés, que ce soit dans les règnes végétal, animal, humain. Et – notamment pour moi, le sujet m’intéressant directement – on a constaté un rythme de 7 jours du cortisol. On sécrète une certaine quantité de cortisol pendant 6 jours. Si on respecte un temps de repos de 24 heures, au terme de ces 24h, le cortisol va remonter. Si on ne le respecte pas, le cortisol ne remonte pas. Il va donc y avoir petit à petit un épuisement de la sécrétion. Mais 24h de repos suffisent pour faire remonter le niveau de cortisol et sa capacité de production par les glandes surrénales. C’est même endogène, c’est dans nos gènes, c’est un rythme qui est inscrit dans nos gènes. Différentes études ont permis de prouver que ce n’était pas influencé par nos rythmes de vie, par nos choix, par notre culture : d’avoir 6 jours de travail et un jour de repos, etc. Toutes nos cellules sont indexées sur ce rythme-là, même celles des algues monocellulaires.

Toute la création, tout le vivant est indexé sur ce rythme-là. Même au niveau électronique, même au niveau moléculaire dans la cellule, il y a ce rythme.

Il faut s’arrêter un jour par semaine, et il faut que ce soit toujours le même jour puisque c’est « six-un ». Le choix de ce jour de repos va synchroniser le jour où le cortisol va remonter. On peut donc choisir n’importe quel jour de repos, mais il faut que ce soit toujours le même. Ce rythme endogène va s’adapter au jour de repos choisi. Si l’on n’en choisit pas un, il se fera quand même, mais si on ne se repose pas, le cortisol va s’épuiser. Et l’épuisement du cortisol conduit au Syndrome d’épuisement, de fatigue chronique. Il n’y a plus compensation des pertes du cortisol, il n’y a plus possibilité de le faire remonter puisqu’il n’y a pas de jour de repos ; le cortisol ne remonte que s’il y a ce jour de repos.

Se reposer consiste à ne pas faire la même activité qu’habituellement, à éviter les activités hyper-stimulantes pour l’organisme – par exemple si notre passion est d’aller au cinéma, nous éviterons d’aller voir un film d’horreur qui va nous faire vider nos surrénales –, à ne pas faire les courses dans un grand magasin ce jour-là, pas de grands déplacements, pas de sports hyper-intensifs. Si on aime marcher, nager, le faire mais sans essayer de dépasser ses limites. Ce n’est pas le jour de la performance, c’est le jour où l’on fait les choses tranquillement et de préférence des choses qu’on aime faire : être en famille, aller se promener, bouquiner […]. On observe actuellement l’effet délétère des « laisses électroniques » : ordinateurs, téléphones portables, etc. Idéalement, durant le jour de repos ce serait bien de ne pas ouvrir son ordinateur, surtout pas pour son travail ! […].

On sait que les relations humaines sont des facteurs de stress, il n’est pas compliqué de le démontrer. Il y a quelques études qui sont particulièrement étonnantes, notamment sur ce qu’on a appelé les « guérisons remarquables9 », que d’autres vont appeler « miraculeuses, ou inattendues, extraordinaires ». Ce sont des gens qui étaient dans des situations pathologiques extrêmes devant conduire à la mort et qui ont guéri de façon inattendue. Et quand on creuse un petit peu l’histoire de ces gens-là, on se rend compte que ce qui les a amenés à la maladie – en l’occurrence, dans cette étude, le cancer –, c’est en général d’arriver à une situation d’impuissance-désespoir, i. e. inhibition de l’action. Et ça, on le retrouve complètement dans la physiologie du stress, ce qui amène le stress, ce n’est pas l’agent agresseur, c’est la façon dont on réagit à cet agent. Et donc s’il y a une inhibition de l’action, c’est-à-dire à un moment où l’on ne peut pas répondre à l’agression soit en fuyant soit en réagissant, on se retrouve alors dans une situation d’impuissance qui crée le désespoir et, là, tout chute, notamment l’immunité. Impuissance non pas tant face à la maladie, mais plutôt face à une situation en général relationnelle qui amène la maladie, parce qu’il y a une chute des défenses et une forme de burn out [entièrement « cramé »], qui peut favoriser le développement d’une maladie selon nos prédispositions génétiques aux uns et aux autres.

D’ailleurs, ce qui a été observé, c’est que si l’on prend deux populations de personnes à peu près dans la même situation pathologique au même moment, avec à peu près le même facteur déclenchant, une de ces deux populations va suivre une psychothérapie, en tout cas une aide relationnelle, l’autre pas. Dans celle qui n’en a pas suivi, toutes les personnes qui devaient mourir vont mourir comme attendu ; dans celle où les personnes ont eu sinon toujours une psychothérapie, du moins la possibilité d’un nouveau mode relationnel et une nouvelle façon d’envisager la vie, de sortir du sentiment d’impuissance et de désespoir, toutes ont guéri, alors qu’elles étaient condamnées à mort, toutes ! C’est énorme, c’est vraiment assez frappant, c’est assez extraordinaire ! »

1 Extraits d’une thèse (version augmentée) pour le Doctorat de médecine (université de Paris 13), présentée et soutenue publiquement le 18 déc. 2012, avec les félicitations du jury. Président de thèse : Pr Olivier Fain. Directeur de thèse : Dr Marc Gatfossé. Rapporteur de thèse : Pr Henri Joyeux. Membre du jury : Pr Benoît Diebold. Titre : Actualité médicale de la Loi de Moïse à travers l’étude du Syndrome d’Épuisement.

2 Ndlr. L’ensemble de cette thèse de quelque 309 pages est disponible sur le site : sd-6.archive-host.com. Extraits choisis par Jean-Marie MATHIEU.

3 Ndlr. Stress : (mot anglais, de l’ancien français « destresse » qui a donné détresse, du lat. districtia « étroitesse »). Désigne l’ensemble des réponses physiologiques et psychosomatiques d’un organisme soumis à des pressions, ou contraintes, de la part de son environnement. L’hyper-stimulation du système parasympathique, en particulier du système cortisol, entraîne un épuisement surrénalien. Le déséquilibre entre les deux systèmes nerveux parasympathique et orthosympathique s’explique ainsi : l’orthosympathique est emballé et donc le parasympathique ne fonctionne plus.

4 Ndlr. La production de cortisol a lieu durant 6 jours, puis doit cesser pour une journée avant d’être relancée.

5 Ndlr. Etymologie grecque : αἰτια aïtia « cause » + logos « raison, science ». Partie de la médecine qui recherche les causes des maladies.

6 Ndlr. Tanak : acronyme pour : Torah (pentateuque) + Néviim (prophètes) + touvim (hagiographes).

7 Ndlr. En 1793, la Convention imposait le décadi (repos le dixième jour, ce qui devait augmenter la productivité). Le “calendrier républicain” de la Révolution française dura à peine 13 ans !

8 Ndlr. Cortisol : hormone stéroïde sécrétée par le cortex ou partie externe de la glande surrénale (au-dessus des reins), qui intervient dans la régulation du cycle circadien : le corps sécrète beaucoup de cortisol à 8 h du matin et très peu à 2 ou 3 h du matin. Hormone essentielle dans l’adaptation au stress.

9 Ndlr. Se reporter à ce sujet à la conférence « Le médecin devant lesurnaturel » (CD 0903, 10 €) donnée au CEP en 2009 par le Dr Patrick THEILLIER, directeur, de 1998 à 2009, du Bureau médical des Sanctuaires Notre-Dame de Lourdes et, par ailleurs, auteur de  Lourdes : des miracles pour notre guérison, Paris, Presses de la Renaissance, 2008.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

Retour en haut