Présence des Ligures en Languedoc

Par Jean Taffanel

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Jean Taffanel1

Résumé : La table ethnographique de Genèse ch. 10 signale Elysha, fils de Javan, parmi les petits-fils de Japhet. Cette précieuse indication, situe les Ligures parmi ceux qui, avec Javan, ont peuplé les îles de la Méditerranée avant de s’établir sur les rivages de la Provence et du Languedoc. Muni de cette grille de lecture, l’auteur montre, sur l’exemple du mégalithe d’Azillanet, comment l’interprétation et le déchiffrement de tels vestiges devient possible.

Les peuples japhétites, aussi bien en Orient qu’en Europe, dressèrent des mégalithes. Les dolmens en particulier occupent un immense territoire, qui s’étend depuis le Caucase, le Proche Orient, l’Afrique du Nord et l’Europe : nous devons y ajouter les îles de la Méditerranée orientale, Chypre en particulier. En ce qui concerne l’Europe nous retrouvons les dolmens fort nombreux en Espagne-Portugal-France-Angleterre-Allemagne-Scandinavie.

On note aussi leur présence en Afrique Noire et en Amérique. L’examen de ces dolmens nous permet une première constatation : le groupe le plus ancien de ces monuments, qui sont des tombeaux en plus de leur caractère religieux, est représenté par le dolmen de petite dimension ; ce caisson de dalles est une sépulture individuelle. Les archéologues s’accordent à les situer vers la fin du néolithique, soit autour de 2000 ans avant Jésus-Christ. Le défunt était disposé en position fœtale ; quelques instruments en silex, des débris de céramique, ont été observés. Personnellement nous croyons qu’il s’agit d’un premier groupe de population post-diluvien, représentant un peuplement chamito-libyque.

Ensuite, en 1800 avant Jésus-Christ, nous avons l’expansion des premiers Ligures / Elisyces en Languedoc, avec la création, en région narbonnaise, du royaume d’Elisha, fils de Javan.

Ces premiers Ligures Elisyces, construisent des dolmens plus vastes que les précédents ; ce sont désormais des tombeaux collectifs. Les défunts sont toujours disposés en position fœtale (symbole de renaissance au sein de la Terre Mère) ; ils sont accompagnés d’éléments de colliers, de belles pointes de flèche en silex, de vases décorés (dits de la civilisation du vase campaniforme), pour ne citer que les objets principaux.

L’expansion d’Elisha a son point de départ à Chypre, dans sa partie orientale ; ensuite au Péloponnèse ; en un troisième temps, Elisha, par un déplacement maritime, marque son passage en Sardaigne, en Sicile, pour s’installer dans notre région narbonnaise, où se développe cette riche civilisation. Notre région minervoise est la plus riche de France en dolmens, avec la Bretagne. Nous pouvons nous enorgueillir de posséder le plus important du Midi de la France (et peut-être même dépasse-t-il ceux de Bretagne) avec le dolmen de Pépieux (Aude), toujours dans le Minervois. Ce monument fait 25 mètres de long : ce pourrait être le tombeau d’un roi puissant et de sa famille (serait-il possible d’envisager le tombeau d’Elisha lui même ?). Malheureusement, cette sépulture exceptionnelle fut entièrement vidée de son contenu dans une période reculée. Nous ne saurons hélas ! jamais le rang des défunts, qui devaient appartenir à une noblesse puissante.

Fait important, aux VIIIème , IXème siècles avant Jésus-Christ (fin de l’âge du Bronze), nos Ligures descendants d’Elisha, devenus incinérateurs, établirent une vaste nécropole à incinération au pied de la butte où se trouve le dolmen de Pépieux, dit dolmen « de los Fados » (dolmen des Fées). En étudiant les idéogrammes gravés à l’intérieur des plats de cette époque, nous avons découvert un riche répertoire cultuel à caractère chtonien qui évoque les croyances de la Grèce archaïque. En particulier des rondes…. Nous abordons ici le folklore audois avec les rondes des Fées au clair de lune, autour des dolmens. Et ceci fut une réalité, mais les prétendues fées n’étaient autres que des prêtresses, sortes de druidesses avant l’Histoire, qui pratiquaient des rondes sacrées autour des dolmens pour honorer les ancêtres ensevelis sous les mégalithes.

Un autre dolmen existe dans la même région minervoise, au-dessus de la localité d’Azillanet (Hérault) : il s’agit du dolmen de Cigalières, nommé plus anciennement dolmen de Balzabé : ce dernier terme nettement oriental désigne à notre avis le prince des démons, Baalzébub, dont la présence chez les Cananéens est associée aux pierres dressées. On donne à ce dieu ténébreux et sanguinaire un autre nom : le « dieu des mouches ».

Précisément, tout près du mégalithe, un ruisseau prend sa source… C’est le ruisseau de « mousco d’asé » ce qui, dans notre dialecte languedocien signifie « le ruisseau de mouche d’âne ». Pour employer le terme français, ce sont des taons, avides de sang humain ou animal. Cette mouche est parfois nommée « mouche cigalière » ; en effet elle rappelle une petite cigale : d’où sans doute le nom de ce toponyme, Cigalière . Tout cela signifie avec ce toponyme et le « théonyme » Balzabé, la pénétration de cultes cananéens dans la société de nos premiers Ligures.

Avec le développement de l’exploitation de l’étain, des orientaux suivirent la voie de l’étain passant dans notre région, ils furent en contact avec nos japhétites Ligures constructeurs de mégalithes, d’où la pénétration de ces cultes cananéens à Baalzébub, à base de sacrifices, souvent humains, sur la dalle des dolmens : ce « dieu »  cruel était en fait le prince des démons, et nous connaissons par la Bible les malédictions des Prophètes à son égard. Ainsi ce « théonyme » Balzabé, malgré son altération, est parvenu jusqu’à nous ; « mousco d’asé » et Cigalières sont bien liés à Baalzébub, « dieu des mouches ». Tout concorde donc pour nous donner une réponse cultuelle venue de la nuit des temps, éclairant ce problème basé sur la mémoire des hommes, comme le dit R.M. Grattefossé dans son ouvrage2 : « La mémoire des peuples est sans limite ».


1 Archéologue de terrain, notre ami Jean Taffanel a constitué un musée privé à Mailhac, dont l’intérêt exceptionnel vient de la succession bien repérable sur le même site (dont un oppidum) des principales civilisations méditerranéennes jusqu’à l’époque romaine (Ibères, Ligures, Celtes). Visite recommandée pour ceux que leurs vacances amènent en Narbonnaise.

2 R.M. Grattefossé,  Le roman de Marthe la Salyenne, suivi de notes sur les hommes et les dieux de Provence, Lyon, Derain. Raclet, 1942, p.138 (bas de page).

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