Les libellules, merveilleux acrobates aériens

Par Werner Gitt

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Regard sur la création :

« Car, depuis la création du monde, les perfections invisibles de Dieu, sa puissance éternelle et sa divinité, se voient comme à l’œil nu quand on Le considère dans ses ouvrages. » (Romains, 1 : 20)

Résumé : La virtuosité en vol des libellules fait notre admiration. Or elle suppose la préadaptation de tous les organes. Même les pattes sont conçues pour saisir au vol de menus insectes. Les antennes captent la vitesse, et le cerveau utilise cette information pour la précision du pilotage. Les ailes ultra-légères sont renforcées par des nervures qui leur permettent jusqu’à 30 battements à la seconde ! C’est en observant le jeu diversifié des deux paires d’ailes de la libellule que Sikorski inventa l’hélicoptère à 4 pales réglables assurant à la fois la propulsion et la portance. Chaque œil de libellule est un assemblage de 30.000 facettes hexagonales avec un cristallin propre captant le signal lumineux 200 fois par seconde ! De là une réactivité en vol qui permet de virevolter entre les roseaux sans jamais les toucher. Comme tous les êtres vivants, cet insecte aux reflets multicolores est une preuve surabondante de l’intelligence du Créateur.


Nous, les libellules (Odonates), appartenons aux spécimens les plus surprenants du royaume des insectes. En plein soleil, nous vivons sous vos yeux, toutes les phases de notre existence : le vol, la chasse, la recherche de partenaire, l’accouplement et la ponte des œufs.

La chorégraphie de nos vols artistiques vous impressionne ! Je vous comprends et je peux vous énumérer neuf variétés de vols que nous maîtrisons parfaitement : le vol neutre, le vol de chasse, d’exploration, d’intimidation, de séduction, de va-et-vient, le vol « ondulant » et le vol au point fixe, sans oublier les différents style de vols « à reculons »… Un vrai ballet n’est-ce pas ?

Parmi 800 000 espèces d’insectes, nous sommes les véritables acrobates aériens. Nous planons des heures durant dans la chaleur estivale, au-dessus d’un étang ; nos ailes bougent à peine.

Pourtant, dès que nous apercevons une proie, nous la happons à coup sûr après un  revirement éclair. Lorsqu’un rival gênant se présente, il est immédiatement écarté et chassé par un vol ascendant en vrilles. Même au travers de joncs très denses, nous glissons élégamment sans que nos ailes délicates ne s’y heurtent. Vous le percevez déjà : près de l’eau, nous sommes les maîtres des airs. Nous nous déplaçons comme des hélicoptères insonores. Nos ailes, battant à une fréquence de trente mouvements par seconde, ne produisent pas de bruit audible pour vous. Elles ne nous servent pas uniquement à voler. Elles jouent un rôle primordial  pour « faire la cour » à notre partenaire et nous tiennent lieu de balancier sur les tiges vacillantes.

Nous les utilisons aussi comme capteurs solaires et comme armes défensives contre les langues des grenouilles trop avides. Malgré tout, le vol en demeure l’utilisation principale.

Parmi nos 4 500 espèces, 80 se cantonnent à l’Europe Centrale. Nous sommes réparties en libellules proprement dites (Anisoptera) et demoiselles (Zygoptera). Pour que vous puissiez un peu mieux vous retrouver au milieu de notre parenté étendue, je vous citerai quelques noms :

Zygoptères : les agrions à larges pattes, les coenagrionidés (ex : agrions jouvencelles, agrions nains, lestes, demoiselles).

Anisoptères : les aeschnes (ex : aeschne bleue, anax empereur), les gomphidés, les cordulégastéridés, les cordulidés (ex : cordulie métallique) et les libellulidés comme la leucorrhine à gros thorax, la libellule écarlate, l’orthétrum réticulé, le sympétrum commun.

Les espèces de taille moyenne constituent généralement le premier sous-ordre. Le second contient, pour la plupart , les spécimens de grande taille mais la dimension ne représente pas pour autant un critère suffisant de distinction. Parmi les plus petites de nos grandes libellules (anisoptères), quelques sympétrums et la mignonne leucorrhine à large queue mesurent 3 cm, alors que parmi les plus grandes des petites libellules -les demoiselles- affichent 5 cm. Ce sont nos ailes qui, pour vous, constituent le meilleur repère de classification. Les zygoptères possèdent deux paires d’ailes -antérieures et postérieures- de dimensions quasi égales.

Au repos, elles joignent leurs ailes deux à deux au-dessus de leur dos tandis que les anisoptères aux ailes inégales les gardent bien étendues. Notre façon de voler nous différencie aussi fondamentalement. Les zygoptères ne battent pas des ailes antérieures et postérieures dans le même sens. Les anisoptères, par contre, synchronisent le battement de leurs ailes antérieures et postérieures. Dans ce qui suit, je limiterai mes observations aux anisoptères. Un de vos poètes et zoologistes Hermann Löns, qui vouait une admiration particulière à l’anax impérial, la décrit en ces termes : « Aucune ne l’égale ; elle est plus belle encore, plus rapide que les grandes aeschnes bleues. Ses ailes se composent de filigranes d’or.

Sur son front, elle porte des bijoux d’émeraude. Son corps est drapé dans un vêtement de soie, ″ glacis bleu liséré de noir″

Un corps aérodynamique :

Comme chez tous les insectes, notre corps se compose de trois parties : tête, thorax et abdomen (figure 1). Notre structure, pourtant, présente de multiples particularités parfaitement adaptées à notre mode de vie et spécialement à notre technique de vol. Remarquez notre abdomen, fin comme une allumette et semblable à un balancier. Il stabilise notre vol et abrite nos systèmes digestif et reproducteur. La structure segmentaire et la peau qui sert de liaison assure à notre abdomen un maximum de souplesse et une surprenante agilité. Semblable à l’armure d’un chevalier, chacun des segments est formé de dures brides pectorales et de solides plaques dorsales.

Pour notre squelette extérieur très robuste, notre Constructeur a utilisé la chitine. Cette substance organique extrêmement légère et résistante est durcie par une imprégnation de calcaire. La combinaison de ces deux éléments confère à notre squelette une grande résistance et un minimum de poids. L’agrion jouvencelle, par exemple, ne pèse qu’un quarantième de gramme. Il vous faudrait en tous cas 80 de ces petites libellules pour équilibrer le poids d’une pièce d’un centime.


Nos pattes : pour la chasse, non pour la marche !

Nos pattes, fines et remarquablement épineuses, nous servent rarement à marcher.

En revanche, elles jouent un rôle essentiel au cours du vol. Normalement, pour réduire la résistance de l’air, nous plaquons nos pattes le long du corps. Si toutefois nous repérons une proie, nous déployons nos six pattes en avant, à la manière d’une épuisette, et nous « pêchons » ainsi, dans l’air, nos friandises. Nos menus se composent d’insectes éphémères, de moustiques ou de mites, toujours happés en plein vol.

Comme nous ne décelons notre proie qu’à une distance très réduite, notre marge de manœuvre pour le vol d’approche est très mince : quelques fractions de seconde seulement ! Dans ces conditions, vous pouvez conclure que notre très remarquable précision de visée exige les plus hautes performances. Elle met à contribution à la fois nos yeux, la capacité de réaction du système nerveux et notre technique de vol.

Notre appareil de vol : prototype de vos hélicoptères !

Comparé à celui de toutes les autres espèces d’insectes, notre vol se base sur un principe totalement différent. Notre Créateur a mis au point, pour nous, un équipement spécifique dont j’aimerais vous entretenir à présent.

Pour voler, la plupart des insectes appliquent ce qu’on appelle le « principe de la marmite ». Représentez‑vous un fait‑tout avec un couvercle un peu trop petit sous lequel on coince deux cuillères en bois. Lorsqu’on presse sur le couvercle, les deux cuillères s’élèvent. Relevez‑le, les cuillères s’abaissent. Chez la plupart des insectes, ces « forces manuelles « sont produites par des muscles tendus à l’intérieur du thorax, entre le « couvercle » et le fond. A chaque contraction musculaire, le corps se rétrécit, élevant les ailes. Le processus inverse se produit à chaque détente des muscles. Notre moteur de vol, en revanche, fonctionne selon un principe fondamentalement différent: de puissants muscles sont directement fixés aux articulations des ailes par des tendons. Pour ces articulations, notre Créateur a utilisé une substance aux particularités mécaniques extraordinaires, la résiline.

Aucun autre matériau ne présente de telles qualités. Extrêmement souple, cette matière peut emmagasiner d’incomparables quantités d’énergie qu’elle restitue au moment opportun. Représentez‑vous une bouteille en plastique écrasée qui, aussitôt relâchée, reprend sa forme initiale. Avec les ailes, la résiline constitue un système oscillatoire identique, fonctionnant à une certaine fréquence de battements.

Notre Créateur a pensé à tant de finesses concernant le vol, que nous maîtrisons n’importe quelle situation. Notre structure est en effet conçue pour des techniques de vol optimales.

Pour décrire le comportement en cours de vol, vos ingénieurs aéronautiques utilisent un coefficient qui porte le nom de nombre de Reynolds ». Ce coefficient caractérise la manière dont la viscosité de l’air environnant se répercute sur la surface de l’objet et donc sur sa vitesse de vol. Cette caractéristique ne joue qu’un très faible rôle pour les oiseaux de grande taille, mais pas pour nous, les insectes. Pour les plus petits, cette viscosité est tellement prononcée qu’ils doivent littéralement « nager » dans un air épais. A cause de leur faible coefficient de Reynolds, ils sont obligés de battre des ailes à un rythme bien plus rapide que les insectes de grande taille pour pouvoir avancer. Nous autres libellules, notre Créateur nous a conçues de telle façon que nous sommes dans une sphère privilégiée. Sans battre des ailes en permanence, nous pouvons facilement atteindre une vitesse de 40 km/h.

En vol ralenti et malgré la faible portée de nos ailes, nous disposons toujours de forces ascensionnelles assez puissantes.

Un anémomètre sur le front :

 Deux éléments jouent un rôle déterminant pour atteindre un vol optimal: l’efficacité du moteur et le contrôle de la vitesse. Sur la partie antérieure de la tête, le Créateur nous a installé deux petites antennes aérodynamiques qui se courbent vers l’arrière dans nos déplacements. Leur base contient des cellules sensorielles qui communiquent avec notre cerveau, lequel utilise les données nécessaires pour calculer la vitesse de vol. Ces antennes sont une installation indispensable pour mon pilotage, aussi précis qu’agile.

Des membranes alaires plus minces que du papier :

Nos quatre ailes, prises ensemble, ne pèsent que 5 mg. Transparentes et d’une extrême minceur, elles représentent un  chef-d’oeuvre dans les techniques de construction légère.

Les membranes de nos ailes sont si légères que leur poids ne dépasse guère les 3 g au mètre-carré, soit vingt fois moins qu’une feuille de papier. Pour une même résistance, les feuilles d’emballage en matière synthétique, polyamide ou polyester du commerce pèsent trois à quatre fois plus! Nos ailes sont aussi renforcées par des nervures appelées « montants » en jargon aéronautique. Le diamètre de ces tubes est d’un dixième de mm, et l’épaisseur des parois d’un centième de mm. Ces gaines, cependant, ne servent pas uniquement à rigidifier nos ailes. Elles servent aussi à loger les conduits pour le liquide sanguin (hémolymphe) et le plasma, les câbles d’information du système nerveux ainsi que le dispositif assurant l’apport nécessaire d’oxygène et l’élimination du dioxyde de carbone.

Sécurité : évaluée au plus juste !

Notre Créateur n’a pas négligé la sécurité dans cette construction légère ! Tout comme dans votre technique, des marges de sécurité bien précises sont mises en place partout dans le règne des êtres vivants, les préservant des fractures ou de chutes prématurées.

En position de repos, par exemple, vos deux fémurs pourraient supporter le poids d’environ 17 personnes. Vous avez besoin de cette marge pour tenir le coup pendant la course ou le saut.

Chez la souris, les fémurs possèdent une réserve de sécurité 750 fois supérieure à la normale. Ne lui faut‑il pas, en effet, risquer des sauts périlleux du haut d’un buffet de cuisine, sans se casser la patte? Même chose pour les ailes. Le pinson, qui ne pèse en tout et pour tout que 25 g, a une superficie d’ailes de 150 cm2. Ainsi 10 cm2 de cette surface n’ont à porter que 1,7 g de son poids. En ce qui nous concerne, nous devons porter 0,5 g pour une surface ailée de 15 cm2, soit 0,33 g pour 10 cm2. Notre marge de sécurité est donc cinq fois supérieure à celle du pinson. Vous attendiez‑vous à cela, vu la finesse de nos ailes ?

Carte d’identité : les empreintes alaires.

Nos ailes sont des membranes hyalines rendues rigides par un réseau de nervures très ramifiées. Les grandes nervures longitudinales assurent la résistance transversale. Les innombrables petites nervures transversales ainsi que le triangle alaire, ou ptérostigma, donnent aux ailes leur solidité dans le sens de la longueur. Jetons un regard sur le renforcement des ailes de l’aeschne bleue et de la mecistogaster lucretia. Nous constatons que le Créateur a utilisé pour la même fonction des principes de construction variés. Des polygones irréguliers ou des carrés réguliers fournissent aux ailes leur indispensable rigidité. Les libellules à battements d’ailes élevés, telle l’aeschne bleue (30 battements par seconde), nécessitent un étayage serré. En revanche, un simple treillage carré, travaillé cependant d’une façon incroyablement précise, suffit aux espèces dont le rythme de battements est plus lent. Les longues ailes effilées de la mecistogaster lucretia, par exemple, ne battent que 15 fois par seconde. Ce type de construction cellulaire, caractéristique de nos membranes alaires, les rend ultra‑légères et pourtant solides. Si vous avez un certain sens de l’observation pour les dessins, vous pourrez identifier nos espèces en vous basant uniquement sur les agencements variés des nervures longitudinales et transversales.

Le chercheur suédois Ake Norberg a découvert récemment le rôle des cellules renforcées formant le bord alaire.

Près de la pointe des ailes de toutes les libellules, on observe un épaississement, façonné différemment selon chaque espèce. Cette consolidation remplit une fonction aérodynamique importante. En fait, c’est une sorte de balourd empêchant la vibration des ailes lors des vols rapides, en battements ou en vol plané.

Virevoltes :

Nous utilisons une technique spéciale de vol qui nous distingue également des autres insectes. Quelques fractions de seconde avant d’amorcer une courbe, nous imposons à notre corps un mouvement de rotation par rapport à l’axe longitudinal.

Vus de devant à ce moment précis, thorax et abdomen ne sont plus dans l’axe mais en oblique, d’où un angle différent pour les ailes intérieures. De cette manière, je trace, une courbe élégante. D’autres insectes (notamment les coléoptères) virent selon un principe différent. L’aile se trouvant à l’intérieur de la courbe réduit son amplitude de battements ce qui réduit la poussée de ce côté et c’est ainsi qu’ils négocient le virage dans la direction voulue.

Savez‑vous que le pionnier de la technique de vos hélicoptères, Igor Sikorsky (né à Kiev en 1889, décédé en 1972 aux USA), a trouvé son idée en observant notre manière de voler? Tout comme nos quatre ailes, les quatre pales réglables du rotor produisent simultanément la force motrice et ascensionnelle. En dépit du degré de  perfection de vos appareils de navigation, tout un monde demeure entre vos hélicoptères et nous : notre vol absolument silencieux est cent fois plus agile. En vol d’approche, seul un léger crissement se perçoit lorsque les surfaces portantes tendues se touchent. Tout cela se passe avec un degré d’efficacité absolument inégalé.

Nos yeux extraordinaires !

Pour manœuvrer avec habileté et rapidité, il faut disposer d’instruments de navigation performants. Nos yeux, de forme sphérique, remplissent cette fonction. Parmi tous les insectes, nous constituons une « espèce optique ».

Notre appareil visuel couvre la plus grande surface de la tête. Le profil de nos yeux, fortement bombé, ouvre un champ visuel maximal.

Nos yeux sont composés d’environ 30 000 facettes hexagonales. A elle seule, chacune de ces facettes constitue un oeil pourvu d’un cristallin microscopique. Chacun de ces yeux, pris isolément, dispose d’un angle de vue différent. Tous ensemble, ils captent un champ visuel très étendu, sans me contraindre pour autant à bouger un seul d’entre eux ou même la tête. A bien des égards, nos yeux sont nettement plus performants que les vôtres.

Ainsi, nous sommes capables d’enregistrer 200 éclairs lumineux par seconde. Vous n’arrivez qu’au dixième de ce chiffre !

S’il existait des téléviseurs pour libellules, les films devraient absolument être tournés à un rythme dix fois plus rapide, pour décupler le nombre d’images projetées par seconde.

Je vais essayer de vous en expliquer le principe physique. Comparée à celle de votre œil, l’image visuelle composée par l’ensemble de mes 30 000 yeux peut sembler très imparfaite et imprécise. Chacun de nos yeux à facettes ne compte guère que huit cellules visuelles alors que votre œil en compte 78 millions. Vous enregistrez, par conséquent, une image beaucoup plus nette. De ce fait notre acuité visuelle est bien moindre que la vôtre. Pourtant nous disposons d’un appareil visuel exceptionnel. Une technique raffinée, ajoutée par le Créateur, augmente considérablement le nombre d’informations optiques. Une succession rapide d’impulsions lumineuses est enregistrée, en tant qu’excitations séparées, jusqu’à concurrence de 200 par seconde. Vous allez en comprendre l’utilité.

Nos déplacements sont presque exclusivement des acrobaties aériennes qui entraînent donc une mouvance permanente par rapport à notre environnement. Au cours du vol, activité essentielle, le centre optique enregistre un nombre d’informations isolées nettement plus important qu’au repos.

Par conséquent, notre acuité visuelle aéronautique dépasse sensiblement en qualité celle que vous pourriez escompter en observant notre construction anatomique. Peut‑être pourrait‑on comparer notre vue à vos camescopes.

Le faisceau électronique balayant l’image remplirait la même fonction que notre « oeil à facettes ». Le faisceau en soi est impropre à balayer la moindre trace de la forme d’une image. Mais déplaçons ce faisceau et transposons les variations de lumière émises en cours de balayage en impulsions successives. Nous obtenons un cliché de l’objet visé riche en détails.

En fait, un principe commun régit vos téléviseurs et notre « oeil à facettes ». La production de l’image est obtenue par l’action combinée de deux systèmes : un captage par balayages très fréquents, conjugué à un appareil optique dont la capacité de résolution en surface plane est faible.

Drapées de somptueuses couleurs :

Vous avez déjà eu l’occasion de bien apprendre à connaître le type d’insectes que nous sommes. Néanmoins, je ne peux me permettre d’oublier une caractéristique. Après les papillons, nous aurions sûrement la deuxième place dans un concours de beauté et de richesse des couleurs. Vous trouverez chez nous tout ce qu’on peut imaginer : des tendres teintes pastel aux couleurs foncées et crues, en passant par des colorations métalliques lumineuses.

Mais par quel moyen toutes ces nuances et combinaisons colorées sont‑elles produites ?

Je pourrais vous expliquer le processus de formation de nos luxueuses teintes au niveau scientifique, mais je préfère m’en abstenir. Il me faudrait avoir recours à de solides connaissances en chimie et même en physique. Vous devriez pourtant connaître trois principes complètement indépendants:

1. Couleurs pigmentaires :

Pourquoi les Chinois sont‑ils jaunes, les Indiens rouges et les Africains noirs ? Leur peau contient certaines substances colorantes, les pigments, caractéristiques de chaque race.

Le Créateur a utilisé exactement la même méthode pour nombre d’espèces de libellulidés comme le sympetrum commun, par exemple, mais également pour certains zygoptères.

Contrairement à vos races, Dieu a employé pour nous des combinaisons chimiques aux effets colorants nettement supérieurs, comme par exemple la mélanine pour les tons jaunes, rouges, bruns et noirs, l’ommine pour les couleurs brun‑violacé et l’ommatine pour les teintes rouge‑brun, Des ptérines à nuances lumineuses blanches, jaunes ou rougeâtres sont également utilisées. Vous pouvez imaginer la merveilleuse gamme de couleurs que l’on peut obtenir par le mélange et le dosage appropriés de ces supports colorants !

2. Couleurs structurelles :

Avec cette méthode, les couleurs sont créées non par des molécules organiques, mais par un processus physique : l’incidence de la lumière solaire sur les minces strates chitineuses de la carapace produit, par réfraction, ces effets de couleurs.

En réalité, toutes les libellules à reflets métalliques sont incolores. Pourtant, elles scintillent de riches nuances colorées, comme par exemple la teinte bleue métallisée des demoiselles, les nuances passant du vert à la couleur cuivrée des lestes fiancés, les scintillants reflets verts de la cordulie métallique. Le bouclier chitineux des coenagrions et des aeschnes, aux reflets émaillés verts et bleus, contient en plus des substances colorantes ternes qui produisent une dispersion lumineuse rehaussant considérablement la grande diversité des couleurs.

3. Couleurs à base de cire :

Ce système évoque la pruine sur une prune mûre. L’abdomen du leste fiancé présente des bandes bleutées en forme d’anneaux provenant d’un enduit de cire sécrété par des glandes cutanées. Ainsi la diffuse réflexion de la lumière solaire crée la couleur. Quel est au fond le but de toutes ces colorations ? Leurs raisons d’être : faciliter entre nous la reconnaissance de l’espèce et du partenaire.

Ces couleurs s’avèrent aussi efficaces comme camouflage. Nous faisons partie des animaux « poïkilothermes » dont la température corporelle varie avec celle du milieu ambiant.

En tant que tels, l’harmonisation synchronisée des couleurs facilite notre réchauffement au petit matin. Elles constituent en outre, une protection adéquate contre les rayons ultra‑violets et règlent le degré d’insolation.

Toutefois, un nombre réduit de couleurs produirait les mêmes effets. Cette étonnante diversité de coloration cache encore une autre raison d’être : l’infinie richesse inventive du Créateur et Son amour pour la beauté. En évoquant les lis, le Seigneur Jésus a dit :

« Considérez comment croissent les lis des champs… Je vous dis que Salomon même, dans toute sa gloire, n’a pas été vêtu comme l’un d’eux… « 1

Nous provenons de l’atelier du même Créateur. Ne vous étonnez donc pas de notre beauté ni de nos somptueuses couleurs.


1 Matthieu 6 :28-30

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