Pour une approche critique de la théorie de l’Évolution

Par le Pr Maciej Giertych

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Pr Maciej Giertych1

Résumé : Avec les articles de Dean H. Kenyon et Richard von Sternberg reproduits dans les numéros 40 et 41, cet article constitue le dernier volet d’un triptyque adressé par l’auteur au Pape Benoît XVI pour l’alerter sur l’imprudence qu’il y aurait, de la part de l’Eglise catholique, à prendre parti en faveur de l’évolutionnisme. M. Giertych y narre son  propre cheminement, sa surprise à découvrir que la génétique des populations, la spécialité qu’il enseignait, avait remplacé les fossiles comme « preuve » de l’Evolution, alors que les mutations génétiques sont des perturbations qui généralement détruisent ou atrophient la fonction concernée, et que la formation des races (présentée comme un « petit pas dans l’évolution») appauvrit en réalité le pool génétique. 

La théorie de l’évolution est soutenue pour des raisons idéologiques et non par ses preuves scientifiques. Si ce n’était par manque d’une autre explication athée de l’origine de la vie  et de toutes ses formes, cette théorie aurait été écartée par les scientifiques depuis longtemps. En fait, la plupart des scientifiques préfèrent ne pas se mêler de la controverse sur l’évolution à cause de dommageables conséquences sur leur carrière. On peut voir dans un article de la National Review un exemple récent de telles conséquences pour le Dr Richard von Sternberg du Smithsonian Institution2. La plupart des biologistes peuvent travailler dans leur domaine et progresser dans leur carrière sans jamais mentionner l’évolution, ce que la plupart d’entre eux choisissent de faire.

Macroévolution contre microévolution :

La plus grande tromperie dans la promotion de la théorie de l’évolution se trouve dans l’affirmation que l’adaptation, ou microévolution comme on l’appelle souvent, est un petit pas dans la macroévolution. Cela n’est tout simplement pas vrai. « Macroévolution » désigne l’apparition et la permanence de nouvelles formes biologiques telles que des organes qui n’existaient pas auparavant, ou des fonctions ou au moins la formation de nouvelles catégories taxonomiques plus élevées, incapables de se reproduire dans la population dont elles émanent. Ceci n’a jamais été démontré.

J’ai rencontré pour la première fois la controverse sur la théorie de l’évolution lorsque j’enseignais la génétique des populations aux étudiants en biologie. Ma réflexion provint non pas de textes universitaires mais des manuels scolaires de mes enfants. Lorsque j’étais moi-même à l’école, l’évolution était enseignée comme un fait que l’on disait prouvé par des preuves paléontologiques, par toutes ces formes intermédiaires sophistiquées que les paléontologues déterraient peu à peu. Puis j’étudiai la foresterie, me spécialisant dans la physiologie et la génétique des plantes, pour finir par enseigner la génétique des populations. Pendant toutes ces années je n’ai jamais été tracassé par la validité de la théorie de l’évolution. Mais lorsque mes enfants furent dans le secondaire, je découvris dans leurs manuels que la théorie était toujours enseignée comme un fait biologique, mais que la preuve principale ne venait plus désormais de la paléontologie mais de la génétique des populations. Or j’enseignais cette discipline et je ne savais pas que ma spécialité fournissait le principal soutien à la théorie de l’évolution !

Formation des races :

Je vérifiai dans les manuels utilisés dans les autres pays et découvris que la situation était la même. Les manuels prétendent que la formation des races est un exemple et un petit pas dans l’évolution. Pourtant je sais, et tout généticien des populations sait, que les races, qu’elles soient produites dans la nature ou par élevage, sont dues à :

a) la sélection naturelle ou artificielle,

b) la dérive génétique

c) et l’isolement.

La sélection dépend du rejet de certains et de la préservation des élus. Aucune information génétique nouvelle n’est produite, mais beaucoup est abandonnée. La dérive génétique est une perte accidentelle d’information génétique due à la petite taille de la population choisie. L’isolement conserve la race ; sans lui la spécificité de la race se perd. Si, à la suite de la sélection des races, la population originelle a disparu, la totalité du pool génétique de l’espèce est épuisé. Or pour l’évolution (toujours présentée comme progressive), nous avons besoin d’une augmentation de l’information génétique. La formation des races est donc un processus dans la direction opposée. Une race est  génétiquement  plus pauvre que la population dont elle provient. Elle possède moins d’allèles de ses gènes. Tout ceci est bien documenté. La macroévolution requiert une nouvelle information génétique et la formation des races n’est donc pas un exemple de ce processus.

Dans les manuels scolaires règne l’histoire de Bistona betularia [la phalène ou « géomètre » du bouleau] ce papillon qui est blanchâtre sur l’écorce propre du bouleau et foncé sur l’écorce couverte de suie. Les oiseaux sont les agents de la sélection: ils attrapent plus facilement les papillons visibles, les noirs sur l’écorce blanche et les blancs sur l’écorce noire. Alors la population s’adapte. Avec le contrôle de la pollution, l’écorce du bouleau redevint blanche et les papillons aussi reprirent leur couleur blanchâtre. Il en fut ainsi parce que la population dans son ensemble, au-delà de la zone polluée, conservait les deux types de papillons dans les limites de sa variabilité, le blanc dominant. Il n’y avait pas d’isolement et l’avantage sélectif  des papillons noirs n’était que temporaire. Aucune nouvelle fonction ni aucun organe ne fut créé ; aucun nouveau taxon, aucune indication d’un pas dans l’évolution. Voilà pourtant le principal argument en faveur de l’évolution que les scientifiques fournissent aux écoliers ! (Pour davantage de détails sur ce débat de la relation entre micro et macro évolution, je renvoie les lecteurs intéressés au Dr Lee Spetner discutant ce sujet avec le Dr Edward E. Max3 )

Mutations :

D’après la théorie de l’évolution, la nouvelle information génétique provient des mutations. Nous avons étudié les mutations pendant plus d’un demi-siècle et jusqu’à présent aucune mutation positive n’a été trouvée. Elles sont soit négatives soit neutres. Nous craignons les mutations, nous essayons d’en réduire le nombre (en évitant les expositions à la radioactivité, aux rayons X, aux produits chimiques mutagènes, etc.). La plupart de ceux qui tentèrent l’élevage par la mutagenèse ont abandonné cette approche car elle ne mène nulle part. J’ai souvent demandé à mes étudiants et aux auditeurs de mes conférences de fournir une preuve documentée d’apparition d’une mutation positive. On ne m’en a jamais montré une seule qui puisse être utilisée comme argument en faveur de l’évolution. Ce qui est le plus généralement présenté comme preuve d’une mutation positive vient des quelques cas où on a montré qu’une mutation fut utile en apportant une résistance aux produits chimiques artificiels (antibiotiques, herbicides, etc.). Cependant il s’agit seulement d’une défense des fonctions existantes, non de la création de nouvelles fonctions.

Ceci est comparable aux divers mécanismes de protection ou de réparation des tissus tels que la cicatrisation, l’adaptation immunologique aux protéines hostiles, les kystes autour des corps étrangers, etc. Lorsque l’application du produit chimique nocif cesse, la mutation est éliminée par sélection naturelle. Ainsi ces mutations sont inutiles du point de vue de l’évolution. Les mutations utiles seulement pour l’homme (oranges sans pépins, formes naines, fleurs sans certains pigments, etc.) ne méritent pas la qualification de positives. La sélection naturelle existe dans la nature et elle favorise les formes les mieux adaptées. Il est cependant important de faire la distinction cruciale entre la sélection après une recombinaison de gènes et la sélection après mutation. Cette dernière n’a jamais été démontrée positivement sélectionnée. La recombinaison de gènes, due aux processus reproductifs naturels ou guidés par l’homme (choix du conjoint, méiose) ou due à l’ingénierie  génétique naturelle ou humaine, est un fait scientifique établi.

C’est le remaniement d’une information génétique existante, qui permet toute la diversité de la nature sur laquelle la sélection opère. Ceci cependant n’a pas d’incidence sur la macroévolution. La macroévolution requiert un mécanisme pour créer une nouvelle information génétique, de l’amibe jusqu’à l’homme.

Il y a aussi des problèmes théoriques pour expliquer comment une mutation positive présumée unique va remplacer les gènes non mutés dans la population. Le coût pour la population apparaît insurmontable. C’est ce qu’on appelle le « dilemme de Haldane »4.

 Dans le monde entier, leurs manuels inculquent aux enfants des idées fausses sur la formation des races et sur les mutations expliquant la théorie de l’évolution. Pourtant elles ne font qu’embrouiller le problème. L’extrapolation indue des maigres faits disponibles aux conclusions évolutionnistes ne respecte pas la rigueur normalement exigée dans le travail scientifique.

Autres sciences :

Voyant comment  mon propre domaine, la génétique des populations, est abusé par la promotion de la théorie de l’évolution, je commençai à vérifier ce que les autres domaines de la science en disaient. Je découvris que dans beaucoup de domaines il y avait de sérieux doutes à avoir sur ce qui était présenté comme « preuve » de l’évolution.

La paléontologie n’est plus au premier rang car le trait dominant y est la stabilité, l’immutabilité des formes dans toutes les strates dans lesquelles on les trouve, jusqu’à celles qui existent toujours (fossiles vivants). En outre il est désormais évident que les « chaînons manquants » sont tout simplement inexistants. On n’en trouve pas ; et ceux qui ont été trouvés précédemment sont progressivement disqualifiés par une analyse plus approfondie. Pire, nous ne pouvons même pas imaginer à quoi ces formes transitoires pourraient bien ressembler.

A quoi ressemblerait une structure intermédiaire entre une jambe et une aile (dans le cas d’une chauve-souris), et pourquoi devrait-elle être sélectionnée comme une amélioration ? D’autre part, de grands sauts (passant directement d’une patte à une aile) demanderaient des changements simultanés dans beaucoup de gènes ; mais ceci est contraire à l’idée que ce sont les mutations aléatoires qui procurent les changements. Même si quelques mutations positives pouvaient être trouvées, elles seraient noyées dans la multitude des mutations négatives que nous observons tout le temps.

Les paléontologues continuent de trouver des fossiles « mal placés » (dans l’échelle stratigraphique). On trouve aussi des fossiles polystrates (arbres ou récifs coralliens enterrés sur plusieurs strates). Le principe de dater les strates par leurs fossiles et les fossiles par leurs strates (raisonnement circulaire) est de plus en plus mis en question.

Ceci m’amène à la datation des strates. Les méthodes isotopiques de datation des roches sont sans utilité pour les roches sédimentaires, car les composants des strates ont leur propre histoire, antérieure à la sédimentation. De toute façon la validité de ces méthodes est sérieusement contestée.

Il existe de nouvelles preuves très convaincantes que les strates se forment latéralement et non pas par superposition. Entre l’érosion et la sédimentation il y a le transport durant lequel les particules se séparent en « laminées »  ou strates, selon la pesanteur spécifique, la forme et la taille des particules, de même que selon la nature de l’agent de transport, son débit et ses fluctuations. La sédimentologie expérimentale met en question toute la colonne géologique et les longues durées qui lui sont attachées5. Sans ces longues durées, l’évolution n’est plus crédible.

Les études sur les mammouths enterrés dans le permafrost au nord de la Sibérie et de l’Alaska, de même que sur les colonies humaines sous la Mer Noire et à des niveaux similaires à l’est de la mer Caspienne, suggèrent l’intervention d’une catastrophe globale majeure à une époque peu éloignée. Elle pourrait avoir causé toute la colonne stratigraphique présentée par le Grand Canyon.

Il y a beaucoup de raisons scientifiques pour que la théorie de l’évolution soit rejetée, ou du moins examinée très attentivement, sans colère ni passion. Nous ne devrions pas permettre son utilisation sans critique dans l’enseignement, simplement parce qu’elle fournit une vue athée du monde.

L’Église orthodoxe en Russie a déjà admis avec Alexis II, le Patriarche de Moscou et de toutes les Russies, parlant lors d’une conférence sur l’éducation au Kremlin le 29 janvier 2007, que « d’enseigner la théorie biblique de la création du monde ne fera pas de mal aux étudiants. Si les gens choisissent de croire qu’ils descendent du singe, très bien, mais sans qu’ils imposent leur opinion aux autres. » 6 Il est temps que l’Église catholique confirme à nouveau son enseignement traditionnel sur l’origine des êtres vivants.

(Traduit par Claude Eon)


1 Généticien, Professeur émérite à l’Académie Polonaise des Sciences, Institut de Dendrologie. Membre du Parlement Européen. maciejmarian.giertych@europarl.euro.eu

2 http://www.nationalreview.com/comment/klinghoffer200508160826.asp  On lira aussi avec profit l’article publié par R. von Sternberg dans Le Cep n°41. Après que la situation qui lui était faite au Musée National d’Histoire Naturelle du Smithsonian fut reconnue par le Sénat américain comme un cas de « harassement moral », R. von Sternberg a choisi de poursuivre ses travaux au Discovery Institute, centre nerveux et financier de l’Intelligent Design aux Etats-Unis. 

3 http://www.trueorigin.org/spetner1.asp

4 W.J. ReMine 1993 The Biotic Message St. Paul, Minn. St. Paul Science, p.539

5 Cf. l’article de Guy Berthault dans Le Cep n°4. Une information actualisée et complétée par des animations  et par des publications russes (en anglais) est consultable sur  www.sedimentology.fr

6 http://directionstoorthodoxy.org/mod/news/view.php?article_id=278

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