Partager la publication "Autour de la grotte de Cussac"
Par le Dr Pierre-Florent Hautvilliers
LES DESSOUS DE LA PREHISTOIRE
Résumé : Nous emmenant avec lui dans ses vacances studieuses en Dordogne, le Dr Hautvilliers met le doigt sur les contradictions de la préhistoire: Bien des faits, gênants pour la théorie de l’Evolution, sont officiellement occultés ou transformés. Le traitement des fouilles récentes de la grotte de Cussac est significatif à cet égard. Il montre aussi que les considérations économiques jouent aussi leur rôle en matière de préhistoire.
Nous avons parlé à plusieurs reprises des différentes « cachotteries » opérées par certains préhistoriens de renom de la première moitié du XX ième siècle, en particulier de celles du professeur Boule1, qui, tel un magicien de la préhistoire, faisait disparaître à son gré des squelettes humains de néandertaliens (moustériens) contredisant les représentations grotesques qu’il en faisait sous la forme d’un homme-singe2.
Nous avons aussi à plusieurs reprises évoqué les persécutions et pressions de toutes sortes qu’ont pu subir les inventeurs (découvreurs) de certains sites préhistoriques (Glozel, Regourdou3) dont les découvertes pouvaient mettre en contradiction une partie des thèses échafaudées en préhistoire depuis un siècle (thèses qui sont toujours présentées en vulgarisation comme autant de certitudes).
Nous pensions qu’en cette aube du XXI ième siècle, ce genre de comportement archaïque et non scientifique, était révolu chez nos spécialistes modernes.
Aussi nous sommes-nous intéressés à la dernière grotte préhistorique découverte, présentée à la presse au début du mois de juillet 2001. Elle est qualifiée de « grandiose découverte, le Lascaux de la gravure ». Découverte au mois d’octobre 2000 à Cussac, près de Cadouin en Dordogne, par un spéléologue, elle est ornée de dessins gravés sur ses parois, et la qualité de ses gravures la classe parmi les grottes de tout premier ordre. Elle présente aussi quelques squelettes. Elle est interdite au public ; une grille en protège l’entrée ; son accès est d’ailleurs très difficile. Des prélèvements ont été effectués pour une datation au C 14 . Elle est datée de 25.000 avant Jésus-Christ.
Fallait-il en rester là pour les informations reçues, accompagnées d’une iconographie sommaire ? Ce fut le cas de la presse en général, y compris jusqu’à ce jour de la presse spécialisée, qui répercuta scrupuleusement toutes les informations que les « spécialistes » concernés voulurent bien leur distiller ou plutôt leur filtrer. Ce ne fut pas notre cas. Nous nous sommes rendus sur place et voici les rectifications qui s’imposent.
1.La datation annoncée laisse croire qu’elle fut déterminée par le laboratoire chargé de faire la radiodatation, en l’occurrence un laboratoire américain.
Il n’en est rien. En fait, le laboratoire n’a encore publié aucune mesure car il a rencontré beaucoup de difficultés techniques. Il s’est refusé à publier ses résultats au moment de l’annonce.
La datation donnée au public est donc arbitraire, sans fondement d’analyse au C 14, seulement déterminée par analogie avec les autres grottes gravées du même genre. C’est aussi une manière de forcer la main au laboratoire américain qui se trouvera dans l’obligation de faire correspondre ses datations avec l’estimation archéologique, sous peine de se discréditer, puisque toutes les autres grottes du Périgord présentent une apparence de datation cohérente les insérant dans une filiation d’évolution artistique et chronologique établie et admise depuis plus de 50 ans. Nous avons appris avec certitude que tout le sol de la grotte était recouvert de quelques millimètres de calcite, y compris le squelette qui a servi au prélèvement de l’échantillon. Cette calcite empêche toute datation sérieuse. Les difficultés techniques du laboratoire se situent à ce niveau, car il a avoué qu’il restait une quantité insuffisante de collagène dans l’os prélevé pour pouvoir réaliser son analyse. Cela prouve son sérieux et révèle une fois de plus qu’une datation au C14 est sans rigueur : on peut lui faire dire n’importe quoi. Peut-être est-ce pour cela qu’elle a été choisie. Si la datation avait été faite sur l’os directement, nous aurions eu toutes les dates possibles… Aussi peut-on se poser la question de savoir pourquoi un laboratoire français n’a pas été choisi…Aurait-il eu moins de scrupules ?
2. Une deuxième cachotterie concerne la présence de squelettes dans la grotte. Jusqu’à présent, d’une manière générale, les préhistoriens ne veulent pas admettre que ces grottes puissent être des sanctuaires. On a donc laissé croire que l’on n’avait trouvé dans cette grotte de Cussac que 5 squelettes … En fait, il y en aurait une vingtaine. Cela doit être gênant, puisque l’on ne tient pas à ce que la chose s’ébruite.
Force est donc de constater que les vieux démons de la manipulation préhistorique ne sont pas encore morts chez nos jeunes loups.
La préhistoire a engendré en Dordogne un dynamisme touristique et donc une manne économique qu’il est nécessaire d’entretenir, car on constate depuis quelques d’années une érosion régulière de la fréquentation des sites et des musées, même parmi les plus en vue. C’est le cas de la réplique des grottes de Lascaux, qui reçoit environ 5 millions de visiteurs par an, comme aussi du Musée national de Préhistoire des Eyzies-de-Tayac qui s’est lancé dans des agrandissements pharaoniques. Coût prévu : 160 millions de francs ; coût final : 420 millions, par la destruction d’une partie de la falaise de ce site pourtant classé » patrimoine mondial de l’Humanité » par l’UNESCO. Aussi n’est-on pas surpris de la date choisie pour annoncer la découverte de la grotte de Cussac : au début de la saison du tourisme estival. Ce choix n’est certainement pas dépourvu d’arrières pensées.
Le « marketing » de la Dordogne préhistorique se trouve donc très bien organisé à tous les niveaux. Cette année ce sont les « nocturnes » de l’Abri Pataud (site–musée des Eyzies) qui ont réservé quelques surprises. Ces soirées permettent à un public averti d’approfondir ses connaissances en préhistoire grâce à des intervenants de qualité. Une des soirées de la saison 2001 (17 juillet) a vu Yves Coppens4, présent au premier rang du public, affirmer que « les conceptions en préhistoire évoluaient avec les idées ». Nous aurions pu penser (naïvement) que cela ne se faisait qu’en fonction des découvertes et dans un souci d’approcher et de servir la « vérité »… En fait, il semble plutôt que l’on se serve de la préhistoire pour établir ou asseoir sa notoriété.
Lors de la soirée du 31 juillet, un conférencier américain, le Pr. Randall White (New York University) a avoué que les plus beaux objets préhistoriques du Périgord se trouvent dans les musées américains, tout simplement parce qu’ils ont été vendus par des préhistoriens français peu scrupuleux ; il n’eut aucun remords à livrer la liste des noms des trafiquants dont certains sont des personnalités périgourdines connues, comme l’abbé Breuil et Denis Peyrony. Il confirme ainsi ce que nous avons déjà dénoncé5 sur le sujet.
Près du château de Puymartin, entre Sarlat et les Eyzies, des fouilles en cours ayant permis de mettre à jours une petite dizaine de squelettes ont réservé une surprise : la taille moyenne des individus se situait autour de 2 mètres !…
La région des Eyzies pose des problèmes sérieux aux préhistoriens. En effet, toutes les grottes et tous les abris sous roche de cette région ont été occupés et habités, et ceci probablement en permanence et sur une période certainement bien moins étalée qu’on ne l’affirme. Cela représente une surface de plusieurs centaines de km2 , où les sols sont recouverts de galets agencés, et les fonds d’abris peints et sculptés de reliefs décoratifs. De très nombreux objets préhistoriques sont présents presque à fleur de sol ; des sépultures sont régulièrement retrouvées dans les grottes soit lors de fouilles officielles, soit aussi et surtout par des particuliers fouillant leur terrain. Celles-là ne font pas l’objet de déclaration, pour éviter les ennuis, car il existe dans le pays une réelle méfiance vis à vis des autorités pour tout ce qui concerne la préhistoire. Nous en avons encore été témoin lors de ce dernier passage. On en vient donc à postuler une population importante sur cette région : plusieurs milliers de personnes, ce qui éloigne les territoires de chasses et implique une sédentarisation des habitants ; d’où la culture du sol, un artisanat, une organisation sociale et religieuse et pourquoi pas artistique… conception qui n’est pas encore acceptée mais qui finira bien par s’imposer à force de découvertes.
1 voir Le Cep n°11 et n°14
2 Le Pr. Boule (1861 – 1942), personnalité incontournable de son époque, considérait que l’homme de Neandertal ne pouvait pas être un homo sapiens. Il le reconstituait comme un être sortant à peine de l’animalité, une sorte d’homme-singe aux jambes semi-fléchies, n’hésitant pas pour cela à trafiquer le montage du crâne de l’homme de la Chapelle aux Saints pour mieux imposer ses vues, ou à faire disparaître des squelettes (Le Moustier et La Ferrassie, en Dordogne) parce qu’ils montraient des signes évidents d’humanité par leur sépulture. Il fallut attendre les années 1955 pour que l’on osât « corriger » ses travaux et ses représentations grotesques. Son œuvre illustre très bien ce que le préhistorien B. Vandermeersch avait pu écrire en 1988, d’une manière générale, sur les reconstitutions de l’homme de Neandertal : « Lorsque nous essayons de reconstituer l’histoire et la façon de vivre de nos ancêtres, nous ne pouvons saisir les données de la recherche qu’à travers le prisme de nos idées » (Dossiers Histoire &Archéologie, n° 124, p.10)…Il aurait pu rajouter : « et de l’idéologie directrice sous-jacente « !
3 voir Le Cep n°4, 6, 8 et 13
4 Paléo-anthropologue, directeur du Centre de Recherche anthropologique du Musée de l’Homme.
5 Voir Le Cep n°3