L’image miraculeuse de Beyrouth : Nouvelles hypothèses sur les origines du Saint-Suaire*

Par Ray Ch. Fiessinger

, , , , ,

*. © AFERIA-EPSIL, R. Ch. Fiessinger, jan. 2005. 

Résumé : Depuis bien longtemps, l’histoire du Linceul de Turin, dans son long périple supposé vers l’Europe, intrigue et incite à de nombreuses recherches. Mais il faut avouer que la moisson est bien maigre, et qu’aux yeux de beaucoup, l’espoir paraissait s’affaiblir d’année en année. Malgré quelques hypothèses soutenues par certains, il faut bien dire que les grandes avancées sur la compréhension du Linceul et de son histoire sont rares.  Ici nous proposons une hypothèse nouvelle basée sur deux textes anciens, ignorés ou plutôt inexploités à ce jour. Nous espérons que ces résultats contribueront à redonner au Saint Suaire la place que tout esprit ouvert à la recherche d’une vérité essentielle et d’ampleur mondiale, devrait lui donner.

Mots clés : Beyrouth, Linceul de Turin, Saint Suaire, Nicodème.

Nous dédions ce travail à tous les martyrs du Liban en rappelant que saint Louis donna à la nation maronite, à Saint Jean d’Acre le 24 mai 1250, la protection éternelle de la France. Le lundi 28 février 2005, fête de saint Romain, un très grand nombre de manifestants sont passés sur la grande place de Beyrouth. Ce lundi 15 mars plus d’1 million de manifestants s’y retrouvaient. Sur cette place a été réinstallé en 2004 le grand monument métallique noir des martyrs, criblé de balles, qui se trouvait auparavant près de Jounieh et près duquel j’avais  planté un même aloès que celui qui accompagna les souffrances de celui qui, venu pour les sauver, fut abandonné des hommes. C’est sur cette place que se trouvait il y a 2000 ans une synagogue transformée en église puis en mosquée sous les Turcs. C’est là que l’image mystérieuse de Beyrouth apporta bienfait à des hommes de bonne volonté. Puisse-t-elle être un signe de paix et de guérison pour tous les hommes.

En mémoire de ma mère, Marguerite, qui lisait sa Bible tous les jours.

1. Introduction :

C’est sur l’étude du périple du Saint Suaire depuis Jérusalem que porte cette recherche. Il faut dire que les traces historiques connues des premiers siècles sont plus que ténues. A tout le moins jusqu’à l’an  525, date à laquelle, on a commencé à parler d’icônes ou de tissus, apparus à Edesse dans le nord de la Syrie et portant des ‘images’ du Christ. Mais il y a des divergences pour savoir si ces images concernent le visage seul du Christ ou son corps tout entier. Ici nous allons non seulement éclairer cette question mais nous ouvrirons aussi de nouvelles pistes historiques.

Le présent article s’inscrit dans la continuité d’une interrogation qui était la nôtre depuis l’année 2002 à propos de l’empreinte du Saint Suaire. C’est alors que l’un de nos amis de là-bas nous a informé qu’il avait repéré un ouvrage ancien, réédité à Jérusalem, et qui parlait de plantes. Le texte concerné s’est vite avéré sans grand  intérêt. Mais en ouvrant le livre une seconde fois, le hasard nous fit tomber en plein sur un passage qui parlait d’un miracle à Beyrouth.

Nous étions loin d’imaginer que ce passage allait nous amener directement à un autre  sujet qui nous intriguait depuis plusieurs années. Sans le prévoir, nous allions sauter de la chimie, de la botanique, et de la phytothérapie, à l’histoire du Linceul de Turin. Nous y apporterons  un éclairage nouveau portant sur les débuts du christianisme, période où l’on se résignait à  ne plus croire que de nouvelles découvertes fussent possibles.

A ce propos, les recherches historiques ont progressé à partir de l’identification d’un Linceul peu avant le sac de Constantinople en 1204, jusqu’à la mise au jour d’une image du visage du Christ sur un linge, connu sous le nom de ‘Mandylion’, en 525. (cf. VIGNON (1902), LEYNEN (1991), MORETTO (1996), LAVOIE (1997), JACKSON et al. (1999),etc.). La question s’est cependant posée de savoir si le ‘Mandylion’ correspondait au Saint Suaire. C’est à Wilson que l’on doit la théorie d’une équivalence entre les deux reliques. De nombreux auteurs se sont rangés à cette idée comme DUBARLE (1985), ou bien BONNET-EYMARD (1986) (1995).

Ce dernier considère que c’est en 544 que le ‘Saint Suaire – Mandylion’ serait devenu un véritable objet historique.

Selon cette thèse le Mandylion présentait la face avant du  Suaire plié en quatre, pour ne laisser apparaître que le visage du Christ. Mais cette hypothèse est mise en doute par plusieurs auteurs. Ainsi STEVENSON et HABERMAS (1981) ne se trouvent guère convaincus et ne voient pas en quoi il faudrait l’assimiler à un Suaire. Ils résument assez bien les choses en disant :

Un Linceul est même très rarement mentionné dans les sources antérieures au VI è siècleDe plus très rares sont les références existantes qui mentionnent le détail le plus sensationnel : l’image sur le Suaire.’ (p.34)

‘A juste titre les sceptiques demandent pourquoi personne n’a jamais rapporté un détail aussi important. Ceux qui mettent en doute l’authenticité du Suaire ont longtemps considéré ce manque de références historiques comme le maillon le plus faible du débat.

On a même invoqué que :

‘La loi judaïque interdisait les images religieuses.’ (mais était-ce une ‘image’?…)

Puis à propos du Mandylion :

‘Il s’agit d’une étoffe découverte en 525 dans une niche, au dessus de la porte ouest des murailles de la ville d’Edesse, aujourd’hui Urfa, dans le sud de la Turquie centrale.’

‘En 944 le Mandylion fut transporté à Constantinople… L’image était rarement exposée au public ; un ancien hymne byzantin indique qu’elle était jugée trop sacrée pour être vue.’

Pour les origines historiques du Mandylion, ils ajoutent :

‘On raconte qu’Abgar V, roi d’Edesse au 1er siècle, était atteint de lèpre. Il écrivit au prophète guérisseur Jésus de Nazareth en Palestine, en lui demandant de venir à Edesse pour le guérir. Jésus aurait répondu, pour dire qu’il ne viendrait pas mais qu’il enverrait un disciple. Un disciple finit par arriver, après la mort et la résurrection de Jésus, apportant une étoffe sacrée imprimée à l’image du Sauveur. A la vue de l’étoffe, Abgar fut guéri et la foi chrétienne s’établit à Edesse.’

‘Selon certains récits, ce disciple aurait été Jude Thaddée. Stuart McBIRNIE assure que c’était l’apôtre Jude.

Dans ce cas, le porteur du Mandylion aurait été un proche du Seigneur, peut-être même un parent. D’autres érudits contestent l’identification de Jude Thaddée avec l’apôtre Jude et pensent que le messager d’Edesse n’était que l’un des 70 disciples… La région d’Edesse fut évangélisée bientôt après le départ de Jésus de ce monde. Une tradition, à Edesse, veut qu’une image sacrée du Seigneur ait été  associée à cette évangélisation. La Sainte Image d’Edesse disparut rapidement de l’Histoire. Le fils d’Abgar V, Man’nu, retomba dans le paganisme et persécuta les chrétiens. L’étoffe disparut mais son souvenir fut préservé.’

Cependant rien ne suggère que le Mandylion  correspondait à une image faite après la mort du Christ. Tout plaide plutôt pour une image faite avant. D’autres textes vont dans le même sens. Or pour le  Saint Suaire tout milite pour qu’il ait été élaboré après la crucifixion.

Il y a donc des interrogations sur l’assimilation du Mandylion avec le Saint Suaire, comme  LEGRAND (1993) qui dit : ‘mon propos sera de dissocier le sindon (Linceul) des évangélistes, du mandylion, né de la légende d’Abgar’ (p.68)… D’autres encore comme FANCHETTE (1996, 2003) militent pour des copies multiples à partir d’un original perdu ou caché avant Constantinople, peut être en Irak chez des Nestoriens…On peut même faire crédit aux chrétiens de ne pas être unanimes sur l’authenticité du Saint Suaire et rappeler que le chanoine CHEVALIER (1899) n’y croyait nullement.

Aussi, d’un point de vue historique, les choses n’étaient pas simples et ne semblaient guère progresser. Jusqu’au jour où le hasard nous conduisit à lire plus en détail un livre inconnu d’un Frère franciscain qui séjourna en Palestine au XIV et au  XV è siècles. C’est à un passage très important de ce Frère qu’est consacré cet article. Du fait de son importance et de la difficulté de se procurer ce texte, nous en donnerons l’essentiel sous trois formes : italienne, française, anglaise. Nous en ferons alors une analyse en montrant son importance pour un éclairage nouveau sur  le Saint Suaire en le reliant aux origines du christianisme.

  Auparavant, nous pensons utile de dire l’essentiel de la possible histoire du Saint Suaire avant le sac de Constantinople. Le lecteur déjà informé pourra se reporter directement au chapitre 3 où l’hypothèse de Beyrouth se trouve présentée.

2. Références sur le Saint-Suaire avant Constantinople :

Il faut reconnaître qu’il n’existe, avant le sac de Constantinople, que très peu de témoignages pouvant assurer l’existence d’un Linceul portant une image ou des empreintes qui puissent être attribuées au Christ. Ici, pour situer la question, nous nous limiterons à un résumé des informations historiques pouvant avoir un rapport avec le Saint-Suaire et plus généralement avec le Moyen-Orient.

-1453 : prise de Constantinople par les Turcs : fin de l’empire chrétien d’Orient

-1250 : perte de Jérusalem par les latins.

-1239-41-42 : envoi de deux frères franciscains, Jacques et André par Saint Louis (frère mineur lui aussi) à Constantinople pour y chercher la couronne d’épines dont venait de lui faire cadeau le roi Beaudouin (en 1239). Deux Frères mineurs se rendent pour un deuxième voyage en Syrie, sous la direction du Chevalier Guy de Mauvoisin, et en ramenèrent d’autres témoignages : une partie de la Sainte Croix , le ‘sacro Saint Sang de NS et Sauveur JC’, aussi : ‘du sang qui par un prodige jaillit de l’image du Seigneur quand elle fut frappée’ (ce phénomène se retrouve étrangement dans l’histoire de l’image de Beyrouth, ci-après) relaté dans le ‘Libellus’ par l’évêque Gauthier de Cornu en 1241, puis par le moine Gérard qui parle étrangement d’une ‘Véronique’ insérée (?) dans un  panneau de bois ( ?) qu’aurait touché le visage du Christ après la descente de Croix, et repris dans De WAILLY et DELISLE. Dans un troisième voyage les frères auraient ramené ‘une partie du suaire qui avait enveloppé le corps du Christ déposé dans le tombeau’. La ‘Véronique’ disparaîtra des inventaires de Paris à partir de 1534.

-1205, 1er août : Théodore Ange, neveu de l’empereur détrôné Isaac II, écrivit au Pape Innocent III, au nom de son frère Michel, pour se plaindre du sac de Constantinople, en disant :

‘Les Vénitiens ont pris, dans le partage du butin, les trésors en objet d’or, d’argent, d’ivoire, les Français les reliques des saints et, parmi elles, objet sacré entre tous, le Suaire dans lequel, après sa mort et avant sa résurrection, Notre Seigneur Jésus Christ fut enveloppé. Nous savons  que ces objets sacrés sont recelés à Venise, en France et en tous autres lieux d’où venaient les pillards, et que le Saint Suaire l’est à Athènes (‘Sacrum Linteum in Athenis’)’  (cf. RAFFARD de BRIENNE (1993) et bien d’autres)

L’on pense qu’il fut emporté par Othon de la Roche, le Bourguignon, qui devint Kir d’Athènes, puis  en transféra probablement la précieuse relique vers la Franche Comté.

-1203/1204 (circ.) : témoignage du chevalier picard Robert de Clary se trouvant dans son récit de la 4è croisade. Il raconte que se rendant au monastère Sainte-Marie des Blachernes :

‘ Où li Sydoines, là où  Nostre  Sires  fut enveloppé, i estoit, qui cascunsz devenres se drechoit tous drois, si que on i pooit bien voir le figure (au sens du corps entier)  de Notre-Seigneur ; on ne seut on onques, ne Grieu ne Franchois, que chis Sydoines devint, quand le vile fu prise. ‘ (cf. VIGNON (1902) : au Moyen-Âge, ‘figure’ signifiait l’ensemble du corps)).(Constantinople fut prise le 12 juillet 1203 et reprise et saccagée le 12 avril 1204).

 Pour Robert de Clary, le Saint Suaire disparut dans ce pillage et :

‘ ni ne sut-on oncques, ni Grec, ni Français, ce que ce sydoine devint quand la ville fut prise’.

 -1201 : Nicolas Mésaritès, gardien des reliques conservées à Sainte-Marie-du-Phare, (sainte chapelle du palais impériale) dit 

«Ici, il ressuscite et le soudarion, avec les linges sépulcraux en sont la manifestation… Ils sont en lin… Ils sentent encore les parfums, ils bravent la corruption parce qu’ils ont enveloppé l’ineffable mort, nu et embaumé après la Passion (SS I, p.138) (selon Bonnet-Aymard, il s’agit des bandelettes et il rajoute ‘J’ai déjà démontré que tous ces termes précis nous décrivent incontestablement le Saint Suaire (SS II, p.32), étoffe de lin parfumée et incorruptible qui porte la manifestation de la résurrection pour avoir enveloppé des pieds à la tête l’ineffable mort nu’).

-1192-95 : date attribuée à la miniature du manuscrit Pray conservé à la Bibliothèque nationale de Budapest avec des traits étonnamment fidèles au Saint Suaire.

-1171 : Guillaume de Tyr parle d’un ‘syndonem’. (cf. p.ex. VIGNON (1902), p.198)

-1150 : un pèlerin anglais parle d’un ‘ Sudarium’, quod fuit super caput ejus’ (op.cit., p.197)

-1147 : Louis VII, roi de France, venu à Constantinople vénère le tissu et Amaury, roi de Jérusalem, voit le sydoine dans la chambre impériale du palais des Blachernes

-1099 : conquête de Jérusalem par les latins

-1095 : Urbain II à Clermont lance la 1ère croisade.

-1071 : invasion turque en Asie Mineure.

-1054 : schisme d’Orient

-XIè siècle : date approximative du codex Vossianus Lat. Q69 qui contient les 2/3 d’un Tractatus traduit du Syriaque, pouvant être considéré comme le plus ancien témoignage de l’histoire d’Abgar. Ce texte évoque aussi, sans repère temporel, une image ou une icône de Beyrouth, texte qui semble n’avoir pas intrigué les historiens et dont nous reparlerons.

-945-1204 : sur cette période, de l’empereur Constantin VII à la prise de Constantinople, toutes les monnaies byzantines porteront l’effigie du Christ avec barbe et deux mèches sur le front, comme cela apparaît sur le Saint Suaire. (cf. CLERCQ (1993))

-944 : entrée triomphale, le 15 août, dans la cité impériale de Constantinople, du saint Mandylion, serviette à frange venue d’Edesse,  qui restera, avec la tuile qui l’avait couvert, objet de vénération. (cf. LEGRAND (1993), p.68). Pour cet auteur, s’appuyant sur une ‘documentation iconographique incontestable’, il y a, là, preuve que le sindon (suaire) et le Mandylion (peinture ou serviette) ne peuvent en aucun cas correspondre à la même chose.

-851 : rétablissement du culte des images saintes par Michel III, fils de Théodora.

-769 : concile réuni par le pape Etienne III qui y proclame orthodoxe le culte des images. Parlant du Mandylion  il parle du linge sur lequel ‘non seulement tu peux voir corporellement son visage mais aussi la stature de son corps’.

D’après LEGRAND la mention du Mandylion est une erreur mais cela atteste que dès cette époque on connaissait un ‘linge’ similaire au Linceul.

-717-842 : empire de Byzance gouverné par des empereurs iconoclastes, ce qui a pu provoquer la dissimulation des reliques.

-692 : le Concile Quinisexte à Trullo déclare, dans son canon 82:

«  Nous décrétons de représenter désormais sur les images, le Christ notre Dieu dans sa figure humaine (et non plus sous la figure d’un agneau) afin de considérer par cette représentation la hauteur de l’humiliation du Verbe de Dieu  et de se rappeler sa vie dans la chair, sa passion, sa mort salvatrice et la Rédemption de tout l’univers qui en est résulté » (cf. BOBRINSKOY (2000 ))

On peut se reporter aussi à CLERCQ (1993), p.88 : d’après lui, ceci a pu résulter indirectement  de la découverte du Mandylion vers 525. Nous pensons qu’il pourrait aussi s’agir du Saint Suaire du fait de la référence à la passion, à la mort et à la Rédemption.

-c.670-680 : récit de l’évêque Arculfe de Périgueux. Il aurait vu le Linceul à Jérusalem. (WILSON (1978), p.125) et rapporte l’histoire d’une dispute entre juifs et chrétiens sous le gouverneur Sarrasin de Jérusalem qui  aurait tenté de résoudre le conflit en le mettant à l’épreuve du feu. Arculfe dit que le Linceul avait 8 pieds de long, i.e. 2m 40, (pendu ?) (p.37).

-639 : Edesse tombe aux mains des Musulmans.

-574 : arrivée à Constantinople de l’icône de Kamuliana (sans rapport avec Jésus) mais dont il est dit qu’elle était ‘non faite de main d’homme’ (cf. LEGRAND (1993), p.69.) Il rajoute que

‘C’est en effet à partir de cette époque que les légendes de Kamuliana et d’Edesse s’enchevêtrèrent ; de même que plus tard, l’on confondra en un seul objet le mandylion et le sindon.’

-555 : Icône du Monastère de Sainte Catherine, au Sinaï, prototype probable de toutes les icônes du visage du Christ ayant des points communs avec l’image du Linceul. (cf. .shroud2000.com)

-c.525 : découverte de l’image d’Edesse.

-340 : Saint Cyrille de Jérusalem évoque « le Linceul témoin de la Résurrection.»

-337 : le culte ‘officiel’ des reliques semble s’établir. Dédicace de l’Eglise des 12 apôtres par  Constantin.

Celui-ci avait entrepris de construire cette église pour sa propre tombe, en y disposant les reliques des 12 apôtres dans 12 niches autour de lui (cf. McBIRNIE (1986), p.19).

-312 : victoire de l’empereur Constantin  sur Maxence au Pont Milvius et adoption, comme emblème des légions, du labarum portant la devise : ‘Par ce signe tu vaincras’ ; ‘In Hoc Signo Vinces’. C’est la consécration de l’Europe et de l’Orient au christianisme.

-306-337 : ère de Constantin . À propos de sainte Nino, évangélisatrice de la Géorgie, WILSON (1978) écrit :

‘Peu avant sa mort, elle a communiqué certains renseignements sur la Passion qu’on lui aurait confiés pendant sa jeunesse à Jérusalem. Selon elle, le Linceul se serait d’abord trouvé entre les mains de la femme de Pilate, puis il serait passé à saint Luc…’

Puis :

‘Le sudarium avait eu un sort différent : trouvé par Pierre, ce dernier le prit et le garda, mais nous ne savons pas si on l’a jamais découvert’.

La sainte aurait demandé des nouvelles du suaire à son maître Niaphore et à d’autres chrétiens de Jérusalem.’ Cf. FANCHETTE (1996), p. 36.

-1er siècle après J.C : la connaissance d’une figure de Jésus Christ proche du Saint Suaire semble être attestée par les représentations trouvées et étudiées dans les catacombes de Rome (MORGAN (1993).

-79 : mort de Vespasien qui aurait été guéri auparavant de la lèpre par un ‘voile’ (cf. cosmovisions.com (poème ‘La destruction de Jérusalem’ du XIII è)

-70 : prise de Jérusalem par Titus, fils de Vespasien

-c.50 : Claude chasse de Rome ‘les juifs qui s’agitent à l’instigation de Chrestus’ (Suétone).

-Possible voyage de l’apôtre Thaddée à Edesse, après l’Ascension, avec le Mandylion qui y serait resté jusqu’en 944. C’est la thèse de WILSON qui interdirait donc, si on le suit dans l’assimilation du Saint-Suaire au Mandylion, à rejeter toute source parlant d’un ‘Saint-Suaire’ ailleurs qu’à Edesse avant 944. (cf. FANCHETTE (1996), p.23)

-30-33-34 : Jésus ressuscité aurait donné son suaire (sindon) au ‘serviteur du prêtre’ avant d’apparaître à Jacques (Citation de  saint Jérôme, tirée de l’évangile des Hébreux, aujourd’hui disparu) (WILSON (1978), p.123).

-Correspondance entre Abgar et Jésus (cf. LAURENTIN (1993), p.123). Le Christ aurait confié cette lettre à Ananias (WILSON (1978), p.318).

Il y a d’autres allusions. Nous ne pouvons toutes les citer ici.

3. Texte du Frère Francesco Suriano :

Du fait de son importance, nous donnons dans le présent article, trois versions d’une narration du Frère Francisco SURIANO qui fut gardien du monastère franciscain Saint-Georges de Beyrouth ainsi que du Mont Sion à Jérusalem. Parti en bateau de Venise le 11 août 1462, il dut arriver à Beyrouth au Liban vers les 29/30 août. Il y avait été nommé gardien (Père Abbé) d’un monastère. Longtemps après, de retour en Italie, il entreprit de relater, à l’intention de sa sœur, clarisse, ses voyages au Moyen-Orient et de lui faire connaître en particulier les lieux intéressants pour les pèlerins. Son livre contient aussi beaucoup d’informations botaniques, ce qui est normal chez un Franciscain. Au dire de Suriano, le couvent des Franciscains se trouvait vers  le haut de Beyrouth. Après une visite de François d’Assise au Moyen-Orient, une étroite collaboration entre Maronites et Franciscains devait s’instaurer au XVè siècle, d’abord avec le Frère Gryphon (1400-1475), arrivé à Jérusalem en 1443, puis avec le frère Francesco SURIANO (1445-1530) qui fut Gardien du Mont Sion de 1493 à 1495 et de 1512 à 1514. Son livre, écrit dans un dialecte italien, fut édité par le Frère Francesco BINDONI en 1524. Il fut réédité bien plus tard par le Frère GOLUBOVICH (1900), puis traduit en anglais par les frères  BELLORINI, HOADE (1949) (1983), franciscains de Jérusalem. Nous en donnons une traduction reprenant les chapitres  102 et 103 du Frère SURIANO

<< CII – La CITE de BEYROUTH >>

« Beyrouth est une cité située au bord de la Méditerranée, comme les cités de Tyr et de Sidon. Elle est distante de Damas  de 60 milles (Bindoni éd. dit : 70 miles): elle se trouve dans la province de Phénicie, sous le métropolite de Tyr.

C’est une ville fertile, plaisante, avec des arbres fruitiers, des vignes, des oliviers, et toutes sortes d’autres fruits. Elle est entourée de bois de pins, de cyprès, de juniper, de myrte et d’autres plantes odorantes qui rendent l’air parfait.

Notre Monastère et la très ancienne église du Saint-Sauveur sont à 50 ‘brassées’ (braccia) (Bindoni: ‘près du bazar, à 50 brassées’, terme de ‘marine’ ?) depuis la place de la cité. Cette église, les Frères la détiennent pour trois raisons.

Premièrement, la cité étant le port de Damas, vers laquelle vont tous les navires et les marchandises, les Frères disent la Messe pour les marins  et assurent d’autres besoins spirituels et administrent les sacrements, et nous vivons de leurs aumônes.

Secondement, c’est une aide et un refuge pour tous les esclaves chrétiens, et aussi les renégats, qui fuient ici vers la liberté du fait du soin que leur font les Frères de les cacher et de leur permettre un retour vers la chrétienté à l’appel des bateaux. Grâce à la réputation de ce monastère, tous les esclaves chrétiens et aussi les renégats trouvent refuge ici de toutes les régions infidèles, et chaque année les Frères sont le salut de beaucoup d’âmes.

La troisième et dernière cause est le miraculeux sang du Christ qui fut versé dans cette église bénie, et ç’en est la principale raison.

SOEUR. Pour ma consolation et mon contentement, dis-moi, je t’en prie les circonstances du miracle qui s’accomplit en ce lieu. »

<< CIII – Le MIRACLE de l’EGLISE du SAINT- SAUVEUR à BEYROUTH >>

« FRERE: Peu de temps après l’Ascension du Christ, tous les Apôtres et les disciples ayant été chassés de la Judée, un parent de Nicodème s’enfuit et vintdans cette cité pour y  habiter, portant avec lui une image du Christ crucifié, que Nicodème avait faite de la nature. Quand il mourut, elle resta à ses héritiers et à leurs successeurs. Ayant loué une maison à un juif, il plaça la dite image sur le mur au dessus du lit. Au bout d’une année, le propriétaire de la maison le congédia car il voulait la maison pour lui-même. Après, ainsi que cela plut à Dieu, lorsqu’il quitta, il oublia la dite image, mais le Juif n’était pas au courant de cela, ni même ne l’avait vue.»

« Un jour, ayant invité les ministres et les prêtres de la Synagogue à dîner, ses yeux s’ouvrirent, et comme cela plut à Dieu, il vit l’image du Crucifié. Indignés par cela et le suspectant d’être Chrétien, mais en secret, ils l’accusèrent auprès du chef des prêtres ; il fut pris et flagellé durement ; alors il affirma sous serment qu’il n’avait jamais vu l’image. L’ayant chassé de la synagogue, ils prirent la dite image. Assemblant tous les Juifs dans la synagogue, ils répétèrent là, l’un après l’autre tous les mystères de la passion du Christ. Et aussi, quand on eut percé son coté avec une lance, subitement il en sorti du sang et de l’eau, et ils en remplirent un vase.  Tous les Juifs en furent stupéfaits et effrayés, et l’un d’eux qui était boiteux  toucha le sang et fut subitement guéri. Ils répétèrent ce fait sur tous les infirmes de la cité et tous furent subitement parfaitement guéris. Remués par ce fait prodigieux et surprenant, ils envoyèrent chercher le Patriarche d’Antioche, qui, ensemble, avec tous les évêques de la province, convertit et baptisa tout ce peuple. Avec ce sang ils remplirent de nombreuses ampoules et les envoyèrent à l’Eglise d’Occident, et ils consacrèrent la synagogue comme Eglise du Sauveur du monde. Et celle-ci fut la première église au monde à être consacrée, comme cela est attesté dans le ‘Rationale divinorum officiorum de consecratione Ecclesiae’. Et l’église de Beyrouth commémore cette consécration le 8 Novembre, et il y est attaché une indulgence. Et pour cela aussi à Rome une église fut consacrée en l’honneur du Sauveur du monde. En ce lieu est conservée l’une des ampoules du sang miraculeux dont nous avons parlé à la louange du Dieu tout-puissant. Amen. »

« Cette église est grandement vénérée dans tout ce pays, par tous, non seulement les chrétiens mais aussi les infidèles.»

4. Analyse des textes de Suriano : chronologie ‘courte’

Ces textes extraordinaires apportent des informations surprenantes sur le Saint-Suaire. Dès l’abord, précisons cependant que l’utilisation que nous ferons du terme ‘Saint-Suaire’ ne préjuge pas de l’identification absolue entre celui-ci, tel que nous le connaissons, et l’image de Beyrouth ; mais on verra que tout milite pour que ce soit le cas. Ici, contrairement au Mandylion ou rien n’est assuré, il s’agit bien de l’image du corps complet d’un crucifié.

La première remarque que l’on peut faire, c’est que le Frère Suriano a surtout centré son récit sur les indulgences que les pèlerins pouvaient obtenir de la visite des lieux saints du Moyen-Orient. C’est à ce titre qu’il s’intéresse à Beyrouth, et non comme à un lieu de tourisme. Et il est beaucoup mieux placé que d’autres pour raconter ces événements. Il fut en effet ‘Gardien’ du monastère franciscain de Beyrouth, et les Frères de Saint François étaient probablement les Européens ayant eu les meilleurs rapports avec les maronites, ceci depuis saint François (1181/82-1226) qui se rendit au Moyen-Orient et en Terre Sainte (1219-1220). Il entreprit aussi d’y convertir le sultan, mais de façon pacifique, contrairement aux croisades précédentes. 

Il est intéressant de noter aussi que le Frère Suriano parle du front moyen-oriental de la méditerranée en  prenant comme centre la ville de Beyrouth. Ceci montre l’importance qu’il attachait à cette ville. Curieusement, sa description va au nord jusqu’à Edesse où justement des reliques religieuses furent longtemps conservées, en particulier le ‘Mandylion’ ou des peintures qui reproduisaient une image du Christ.  Pour ce qui est de la ville de Beyrouth, on y apprend que c’était le port officiel de Damas, ville où Saint-Paul se convertit en chemin alors qu’il  allait y persécuter les chrétiens.

A propos du Mandylion, il y a beaucoup à dire et la place nous manque ici. Entre autres, on peut s’étonner de la remarque de Ian WILSON (1978) disant :

‘On dirait que tous ceux qui ont copié le Mandylion ont travaillé d’après le Suaire. L’admettre, c’est poser la question inévitable : le Mandylion et le Suaire sont-ils en fait un seul et même objet ?’

Nous pensons qu’on pourrait tout aussi bien trouver une similitude entre ces deux objets parce qu’ils se rapportent chacun à la même personne, le Mandylion avant la mort de Jésus, et le Saint Suaire, après. La fameuse lettre d’Abgar amène à y penser, même si le tissu dans lequel Jésus aurait épongé son visage, ou la peinture qui aurait été faite de son vivant (sur un support souple, toile ou linge, ou sur un support rigide, bois ou tuile), ont pu avoir été apportés au roi lépreux après la mort de Jésus. A propos de l’image de Beyrouth dont nous parlons ici, il n’y a aucun doute que ce témoignage y a été apporté après la mort de Jésus.

Mais le plus important est bien d’apprendre qu’il n’y a ici aucun doute que l’image de Beyrouth provenait d’un parent de Nicodème, lui qui apporta les ‘aromates’ (Jean) et dont nous pensons qu’il les disposa lui-même sur le corps de Jésus. Nous pensons qu’il devait probablement être médecin, peut être le spécialiste en la matière au Sanhédrin. Il y eut donc un lien réel entre l’image de Beyrouth et Nicodème. Et à quoi cela peut-il se rapporter sinon au Saint Suaire ?

Ceci n’est pas du tout le cas si l’on pense que le Mandylion est à rapprocher de la lettre d’Abgar. A ce propos dans nos investigations pour asseoir la théorie de Beyrouth nous avons découvert avec étonnement que le témoignage de Suriano était étroitement lié à des textes dont nous n’avions jamais vu l’évocation ni l’analyse dans aucune des études que nous connaissions sur le Saint Suaire. Après recherche, nous avons fini par trouver les textes de l’évêque d’Alexandrie (295-373) (Dans la Patrologie de Migne, ainsi que noté dans la première traduction de Suriano). Et là, la surprise était au rendez-vous. Car ce n’était pas d’une simple allusion qu’il s’agissait, mais d’environ 30 pages sur l’image de Beyrouth. Nous en parlerons en détail dans un prochain article.

Peu de temps après l’Ascension du Christ, tous les Apôtres et les disciples ayant été chassés de la Judée, un parent de Nicodème s’enfuit et vint dans cette cité pour y  habiter, portant avec lui une image du Christ crucifié, que Nicodème avait faite de la nature. Quand il mourut elle resta à ses héritiers et leurs successeurs.’

‘Pocho tempo da po’ la ascensione de Christo, essendo scazati de la Iudea tuti li Apostoli e soi discipoli, uno parente de Nichodemo fugite e vene in questa cita ad habitare, e porto seco la ymagine de Christo Crucifixo,  la qual Nichodemo havia facta cavare dal naturale. E morto lui rimase alli soi heredi e successori. ’

Ce texte nous apprend que Nicodème conservait une ‘image de Jésus crucifié’. Il n’y a qu’un objet au monde qui corresponde à cela, c’est le Saint-Suaire. Il y faut en effet que l’image concerne un ‘crucifié’ et cela ne peut être ni le ‘voile de Véronique’ ramené à Paris sous Saint Louis, ni le Mandylion d’Abgar.

On apprend en plus que Nicodème avait fait cette image cavare dal naturale’, ‘de la nature’, et ceci est exactement la théorie que nous développerons dans notre article sur l’explication des traces du Saint Suaire.

On apprend encore qu’il y eut un transfert de cette ‘image’ après la mort de Nicodème. La question est de savoir de quel transfert il s’agit. Ce point sera examiné plus tard, surtout en tenant compte des informations données par Athanase. D’ores et déjà, nous pouvons dire qu’il est certain que cela se passa avant que l’évêque ne fit ses sermons, probablement au plus tard vers le milieu du IVème siècle. Nicodème étant mort, l’image se retrouva détenue par un héritier et peut être un successeur. Personnellement nous pensons que le ‘ses héritiers et leurs successeurs’ peut aussi être une façon de parler pour dire que l’image devait ‘naturellement’ rester détenue par sa famille ou ses proches. L’amour de Nicodème pour Jésus Christ, qui lui a fait le défendre (voir les Actes de Pilate), lui a probablement fait conserver ce Saint Souvenir, sans vouloir s’en séparer avant sa mort.   Mais la lecture de ce texte, repris à son début, nous dit ‘peu de temps après l’Ascension’. Pour une fourchette inférieure, on peut se référer à Anne Catherine EMMERICH (1821) qui dit :

‘J’eus une vision… Dans la troisième année qui suivit l’Ascension du Christ, je vis l’empereur romain envoyer quelqu’un à Jérusalem pour recueillir tous les bruits relatifs à la mort et à la résurrection de Jésus.’

‘Cet homme amena avec lui à Rome Nicodème, Séraphia (cousine de Jean-Baptiste, elle peut être Véronique) et le disciple Epaphras, parent de Jeanne Chusa (plusieurs fois citée par A.C.E). Je vis Véronique chez l’Empereur; il était malade…’ 

(On n’est pas obligé de croire à une vision en matière de science historique, mais on peut s’étonner ici du rapprochement avec le texte de Beyrouth). Peut-être l’homme fut-il envoyé par l’empereur (probablement Tibère (14-37)), après qu’il eut vu Pilate, venu à Rome en l’an 36 ? Ce qui nous fait dire cela est la suite du texte d’Anne Catherine Emmerich (cf. FANCHETTE (1996), p.382) :

‘La face de Jésus n’y était pas proprement comme portrait, mais empreinte en traces de sang… sur l’autre drap  était l’empreinte du corps flagellé de Jésus.

Je crois que c’était un des draps sur lesquels il avait été couché pour le laver avant qu’on le mît au tombeau. Je ne vis pas l’empereur toucher ces linges, mais il fut guéri par leur vue. ‘

Elle dit que le ‘voile’ revint à son retour à Jérusalem aux saintes femmes (Véronique ?) et que le disciple Thaddée l’emporta à Edesse. Il faut remarquer qu’A.C.Emmerich fait une distinction entre ‘voile’ et ‘drap’. Ceci incline à penser que l’image de Beyrouth n’était pas le ‘voile’ mais le ‘drap’, donc le Saint Suaire. Plus loin elle nous parle d’Ananias, serviteur d’Abgar, et peintre… Précisons que Vespasien, mort en 79, aurait été guéri auparavant de la lèpre par un ‘voile’, selon un poème du XIII è intitulé ‘La destruction de Jérusalem’. Il y aurait beaucoup à dire ici et nous avons reporté d’autres remarques importantes à plus tard. Pour l’instant, le texte de Suriano est suffisant pour établir que l’image de Beyrouth était bien le Saint -Suaire.

On doit préciser que le ‘selon’ ou le ‘de’ la nature’ dit bien ce que cela veut dire et conforte notre point de départ dans nos recherches récentes. Ceci est capital, et nous verrons que cela est renforcé par ce que dit Athanase. Mais continuons Suriano :

‘Ayant loué une maison d’un juif, il plaça la dite image sur le mur au dessus du lit..’

 [Cela pouvait être aussi bien dans une niche que pendu au mur même ; ne serait-ce pas là l’origine des crucifix placé en tête des lits ?]

‘Une année après, le propriétaire de la maison le congédia ….

…il fut pris et flagellé…’ [Il s’agit là du juif propriétaire]

‘… et alors il affirma sous serment qu’il n’avait jamais vu l’image’

[cela se comprend quand on voit l’image de Turin, d’autant plus que l’intérieur de la maison ne devait guère être très éclairé, sauf peut-être lors de l’invitation faite aux personnes de la synagogue, où on aurait allumé beaucoup de lampes] 

‘L’ayant chassé de la synagogue, ils prirent la dite image. Assemblant tous les Juifs dans la synagogue, ils répétèrent là, l’un après l’autre tous les mystères de la passion du Christ.’

[Cette scène devait être plus qu’impressionnante : peut-être que cela se fit, chacun détaillant sur le suaire les traces de la Passion. Peut-être aussi que l’attitude de celui qu’ils firent flageller les fit revenir sur leur propre attitude.

Notons aussi qu’il n’est pas dit ici ‘fouetté’ (whip) (frustare) mais ‘flagellé’ (scourge) (duramente flagellato)]

‘Et aussi quand on eut percé son côté avec une lance, il en sorti aussitôt du sang et de l’eau, et ils en remplirent un vase.’

 [Cette phrase peut être comprise de plusieurs façons, mais nous pensons qu’il s’agit de la continuité de la narration de la crucifixion, accompagnée d’une description gestuelle qui vient la conforter. Le témoignage parallèle du vase-graal est probablement le plus ancien que l’on connaisse.]

‘De cela tous les Juifs furent stupéfaits et effrayés, et l’un d’eux qui était boiteux  toucha le sang et fut aussitôt guéri.’

[Il y a là à préciser que l’on passe du récit du Golgotha à l’image de Beyrouth où tout laisse à penser que l’image était imprégnée de sang et, comme on le déduit par la suite, que du sang devait réellement couler. Précisons qu’il n’est pas dit que le ‘vase’ passa par Beyrouth]

‘Ils répétèrent cette épreuve sur tous les infirmes de la cité et tous furent subitement parfaitement guéris.’

[… le lecteur peut imaginer ce que cela dut être, et comprendre l’extraordinaire effet sur les fidèles de la synagogue et sur tous les habitants de Beyrouth]

 ‘Remués par ce fait prodigieux et surprenant, ils envoyèrent chercher le Patriarche d’Antioche qui, ensemble, avec tous les évêques de la province, convertit et baptisa tout ce peuple’.

[Antioche fut très rapidement une des premières villes chrétiennes, comme Beyrouth probablement.]

‘Avec ce sang ils remplirent de nombreuses ampoules et les envoyèrent à l’Eglise d’Occident et ils consacrèrent la synagogue comme l’Eglise du Sauveur du monde.

Et celle-ci fut la première église au monde à être consacrée, comme cela est attesté dans le ‘Rationale divinorum officiorum de consecratione Ecclesiae’. [Nous en reparlerons]

‘Et l’église de Beyrouth commémore cette consécration le 8 Novembre, et il y est attachée une indulgence. Et pour cela aussi à Rome une église fut consacrée en l’honneur du Sauveur du monde. Et en ce lieu est conservée une des ampoules du sang miraculeux dont nous avons parlé à la louange du Dieu tout-puissant. Amen. Cette église est grandement vénérée par tous dans toute cette contrée, non seulement les Chrétiens mais aussi les infidèles.’

Cette église de Rome est certainement l’église Saint Jean de Latran, appelée autrefois église Saint-Sauveur et bâtie sous Constantin.

5. Analyse d’un texte d’Athanase : chronologie longue, et date de la mort de Jésus :

Pour donner une idée des textes d’Athanase, nous citerons deux brefs passages :

Πολις  έστι  Βήρυτός κάλόυμένή, τέλόυσά δε υπό Aντιόχέιάν. Eν άυτη τη πολει πληθη πολλα ην τών Ioυδαιών… Plhsion de thV sunagwghV autwn XristianoV  tis labwn xelllion xatemenen. Epoiηse de έιxωνα  του Kυριόυ hmwn Ihsou Xριστου oλοστατον, εzwgrajemenhn e wraiothti pollh. Cronou…..’ (1er sermon 2) ; ‘…oλοστατον [entier] ecousan τηn έιxoνα του Kυριόυ hmwn Ihsou Xριστου. Cronou…’ (2è sermon)

‘Urbs est, Berytus nomine, Antiochae vectigalis,  in qua ingens erat Judaeorum multitudo. Christianus porro quidam accepta prope synagogam eorum cellula, illic commorabatur. Fecit autem  imaginem Domini integram, pulcherrime depictam…Elapso quodam tempore.. (1er sermon 2)…’; ‘…quae staturam Domini nostri Jesu Christi totam repraesentabat. Modico elapso tempore…(2ème sermon)’

‘La ville, nommé Beyrouth, était assujettie à une redevance à Antioche… elle comportait une multitude de Juifs… Il avait ‘fait’ d’autre part une image entière du Seigneur, le dépeignant  de très belle façon.’

Même avec les traductions pas forcément très assurées de Migne ou bien dans ses textes latins qu’il présente sans équivalent grec, lesquels ne sont pas toujours très concordants, Athanase complète Suriano sur quelques points, mais nous pensons que Suriano a dû connaître des traditions anciennes peut-être directes. Suriano ne disait-il pas la messe à l’endroit même où fut amenée l’image ?

On verra que chez Athanase l’image apparaît de prime abord ‘faite par ‘nos pères’… (patres nostri fecerunt).

Mais plus loin, au chapitre IV de son sermon,  les choses ne sont pas présentées ainsi, et l’on a la surprise de découvrir le texte suivant qui corrobore de façon surprenante le récit du moine en le complétant. Sauf qu’il amène plutôt à une chronologie ‘longue’ du périple entre Jérusalem et Beyrouth :

« Cumque ab eo studiosissime fuisset interrogatus, quomodo, icona apud se devenisset, vel a quo tam mirabiliter posita esset, respondit dicens : quod Nicodemus, qui ad Jesum nocte venerat, propriis manibus eam composuisset, et moriens Gamalieli tradidisset. Gamaliel autem doctoris gentium Pauli διδασxαλος, [précepteur de Paul]  cum diem sibi cerneret adesse extremum, Jacobo eam reliquit, et  Jacobus Simeoni, et Simeon Zacchaeo; et sic  per successores temporum in Jerosolyma perduravit [perdura, resta], usquequo subversio illius urbis patrata [étant achevé] est  quadragesimo et tertio anno post ascensionemn Domini Salvatoris ad caelos. Sed biennium antequam [2 ans avant] Titus et Vespasianus eamdem subverterent [détruirent] urbem, admoniti sunt a Spiritu sancto fideles atque discipuli Christi, ut  relicta [quitter]  urbe, ad regnum se transferrent Agrippae regis [le roi Hérode Agrippa II : 53-93], quia ipse tunc [parce qu’à ce moment-là] Agrippa Romanis foederatus erat. Qui egressi ab urbe, omnia quae ad cultum nostrae religionis ve fidei pertinere videbantur secum [avec] auferentes [emportant], in has regiones transtulerunt se. Quo tempore etiam icona, cum caeteris rebus ecclesiasticis deportata, usque hodie [jusqu’à aujourd’hui] in Syria  permansit, quam ego ipse a parentibus ex hac luce migrantibus mihi traditam, jure haereditario usque nunc possedi. Haec certa et manifesta ratio est de icona sancta Domini Salvatoris, qualiter de Syria in Judaeae partes devenit… »’1

De cela on peut penser a priori, dans l’optique d’une chronologie longue, que le transfert de l’image à Beyrouth aura pu se faire autour des années 70-75. Ce résultat très intéressant en amène un autre : c’est la mention d’une multitude de Juifs à Beyrouth.

Elle peut se trouver alors justifiée par l’exode de nombreux juifs fuyant Jérusalem à l’époque de la destruction de la ville par Titus. Un autre fait milite pour la chronologie longue : si un ‘parent ou un proche de Nicodème’ se retrouve à Beyrouth, c’est aussi parce qu’il a dû fuir, soit au moment des persécutions des chrétiens vers 66, soit après la destruction du temple de Jérusalem vers 70. On peut noter que l’analyse des textes de saint Athanase conduit à dater de façon inattendue la mort de Jésus par une nouvelle source. Nous reverrons cela bientôt, cette information n’ayant, à notre connaissance, jamais été exploitée.

6. Conclusion :

L’hypothèse de Beyrouth, dont nous pensons avoir présenté ici l’essentiel, apporte au dossier du Saint Suaire un nouvel éclairage et un argument très important pour l’existence effective d’un Linceul dès les toutes premières années qui ont suivi la mort de Jésus. Evidemment, de très nombreuses nouvelles questions sont soulevées ici tant historiques, archéologiques, scripturales, exégétiques, que théologiques. Mais il y a aussi des études chimiques, biologiques, médicales et autres, qui sont loin d’être épuisées. Nous souhaitons simplement qu’on veuille bien cesser de charcuter un si extraordinaire témoignage, vieux – on peut le dire maintenant – de 2000 ans. Il a converti toute une ville. Il peut convertir le monde.

7. Notes :

1. La présente étude est basée sur des documents historiques que nous avons eu la chance de connaître. Mais nous sommes conscient qu’il est devenu difficile aujourd’hui de prétendre à une connaissance exhaustive de toutes les études consacrées au Saint-Suaire. Cet  article peut ainsi être imparfait. Aussi remercions-nous à l’avance ceux qui nous le signaleraient ou pourraient nous apporter des renseignements complémentaires, en particulier sur certaines références d’accès difficiles qui peuvent constituer des variantes intéressantes. Tous les textes anciens que nous aurons pu identifier seront disponibles dans nos publications ultérieures et notre ouvrage.

2. Hormis les textes cités, on peut trouver une allusion à l’image de Beyrouth dans l’article italien de ZANINOTTO (1993) (p.60) qui reprend  le codex Vossianus Latinus Q 69 du Xè siècle (selon K.A. de MEYIER), conservé à l’université de Rjik de Leide,  qui contient des fragments d’un texte couvrant 6 feuillets : le ‘Codex Vossiani Latini’, Pars II, Presses de l’Université, 1975, (‘Redemptor igitur et salator noster dominus Jhesus Christus antequam pro salute hominum pateretur cuidam regi Mesopotamie Agaro nomine,  commoranti in Edissa civitate, qui eum corporaliter cupiebat cernere, per epistolam suam dignatus est visitare’). Voir aussi STRECKER, Zu den Karolingischen Rhythmen, « Neues Archiv der Gesellschaft für altere deutsche Geschichtskunde, 34, 1909, 604,  qui lui assigne la date du XIè siècle (cf. aussi DOBSCÜTZ (1899)). Le texte reproduit en  italien dans ZANINOTTO (1993) ne voit  l’image de Beyrouth, qu’il effleure à peine, que comme  une icône ne faisant que corroborer les images d’Edesse, ou ne faisant que les reprendre. Il cite d’autres références non exploitées comme celle St Athanase (295/373) (aussi Grégoire de Tours (RI 71 724) ou Antonino da Piacenza (XIII)) et d’autres). Une analyse approfondie de saint Athanase sera faite dans notre prochain article. 

Remerciements : Nous tenons tout d’abord à remercier ici notre très cher ami de Kaslik, le Père Joseph, de l’ordre Maronite, puis le Frère Yves Soudan, Madame S. Bosc, le Père Gérard de La Blaque, et enfin nos frères Louis de France et Louis du Liban.

8. Références :

BOBRINSKOY, Boris R.P (1960) Bref aperçu de la querelle des images. Contacts » n. spécial « l’Icône » n.32, 1960 (cf. Myriobiblos.gr)

BONNET-EYMARD, Bruno (1991) Les témoignages historiques surabondent. In ‘Le Saint-Suaire’, CRC, n. spécial 271, février-mars. Voir aussi les articles de 1986, 1988.

BONNET-EYMARD, B, DE NANTES, G. (1995) A la découverte des temps évangéliques et apostoliques. CRC, 10 260 Saint-Parres-les-Vaudes, France.

CHEVALIER, U. (1899) Le Saint-Suaire de Turin est-il l’original ou une copie? Chambery.

CLERCQ, J.M. (1993) Le Linceul et les monnaies byzantines. In UPINSKY (1993).

BONNET-EYMARD, B, DE NANTES, G. (1995) A la découverte des temps évangéliques et apostoliques. CRC, 10 260 Saint-Parres-les-Vaudes, France.

De WAILLY et DELISLE (1865) Recueil des Historiens de France. T. XXII, p.26.

DOBSCÜTZ, E. von (1899) Christusbilder, untersuchungen zur Christichen Legenden.(Images du Christ. Recherches sur la légende chrétienne) Leipzig, J.C. Heinrichs, 1899, Beilage III, p.130, 146, 149, 152, 280, 292.

DUBARLE, R.P., o.p. (1985) Histoire ancienne du linceul de Turin, jusqu’au XIIIe siècle. ŒIL, 12 rue du Dragon, Paris.

DUBARLE, R.P., o.p. (1993) L’image d’Edesse dans l’homélie de Grégoire le Référendaire. In  UPINSKI (1993), Paris. p.81-56.

EMMERICH, A.C. (1854) La Douloureuse Passion du Christ. Traduction de l’Abbé De CAZALES. Restituée aussi par Lina Murr NEHME, Eds Fr.-X. de GUIBERT.

cf. .jesusmarie.com/anne_catherine_emmerich_livre_4.html: téléchargement gratuit de ses 9 livres (1720 pages en 1.92 Mo), .ebior.org/Societe/Emmerich-portrait.htm.

FANCHETTE, S. (1996) Le Linceul de Turin: identité retrouvée. Téqui, éd., Paris.

FANCHETTE, S. (2003) Pour en finir avec le Linceul de Turin. Téqui, éd., Paris.

FIESSINGER, R. et al. (2005) Le Saint Suaire: 2000 ans d’histoire. AFERIA-EPSIL, à paraître.

GOLUBOVICH, Fr. Girolamo. (1900) Il Trattato di Terra Santa e dell’Oriente di Frate Francesco Suriano, Missionario E Viaggiatore del Secolo XV. Golubovich, ed. Milano, Tipografia editrice ARTIGIANELLI, 100. Edito per la prima volta nella suaintegrita su due Codici della Comunale di Perugia e sul testo Bindoni : Dal P. Girolamo GOLUBOVICH Ord. Mis. Missionario Apostolico e figlio della Custodia de Terra Santa.

JACKSON, R.S., JACKSON, J.P. (1999) The Jewish and Early Christian History of the Turin Shroud. Proceedings of the Shroud of Turin International Research Conference, Richmond, USA. (voir .shroudofturin.com et les articles antérieurs de 93, 94, 97, 99 de RS. J)

LAURENTIN, René (1993) Historicité de Jésus. In UPINSKI (1993), p.122-128.

LAVOIE, G. R. (1997) Origin of the Shroud. In UPINSKY (1993, 95), ed., p.167.

LEGRAND, Antoine (1993) Les représentations du Mandylion. In UPINSKY (1993), p.69.

LEYNEN, H.(1991) A propos du Mandylion. In ‘Soudarion’, revue trimestrielle flamande par Lijwade Genootschap, v.2., Boeveriestraat, 18, B-8000 Brugge, Belgique.

McBIRNIE, W. S. (1986) The search for the Twelve apostle. Living Books.

MIGNE, J.P. ed. (1887) Patrologie grecque. Vol. 28, p.795-824, GARNIER Fratres et MIGNE, Paris. Patrologiae cursus completus. Sources : ex codece Palatino: Colbertinis codicib. 833, 4457, 5110. ‘Ex Palatinis’ deux exemplaires en parlent : un en vrai latin de la même histoire, p.293, transmis de l’édition lyonnaise de 532, un autre en même Latin du codex Sangermanensi num. 108 (orthodoxia.org/hilarion/stGregory/bibl.htm).

MORETTO, Gino (1990) The Shroud: a guide. Editrice Elle Di Ci, et Paulist Press, 1998.

MORGAN, Rex (1993) New evidence for the earliest portrait of Christ. In UPINSKY (1993).

NICOMEDE  Evangile de Nicomède. (Actes de Pilate)

RAFFARD de BRIENNE, D. (1993) Le secret du Saint Suaire. Ed. de Chiré.

SAVIO, Pietro (1957) Ricerche storica sulla Santa Sindone. Torino. (Aussi Sindon n.3, 1960)

STEVENSON, K. E., HABERMAS, G. R. (1981) La vérité sur le Suaire de Turin. Preuves de la mort et de la résurrection du Christ (Verdict on the Shroud) France Livres.

STRECKER, K.A. (1909) Zu den Karolingischen Rhythmen, « Neues Archiv der Geselischaft für altere deutsche Geschichtskunde. 34, 1909, 604.

SURIANO, Francesco (1524, 1900, 1949, 1983) Treatise on the Holy Land. Translated by  Bellorini, Hoade with a preface and notes by Bagatti. Franciscan Printing Press, Jerusalem.

UPINSKY, A.A., ed. (1995) L’identification scientifique de l’homme du linceul, Jésus de Nazareth. Actes du symposium scientifique international, Rome 1993, F..X. De GUIBERT.

VIGNON, Paul (1902) Le Linceul du Christ : étude scientifique. Masson, Paris.

WILSON, Ian (1978)  Le Suaire de Turin. Albin Michel, Paris.

ZANINOTTO, Gino (1993) L’imagine Edessena : impronta dell’intera personna di Cristo Nuove conferme dal codex Vossianus Latinus Q 69 del sec. X. In UPINSKY (1995).

ANNEXES : versions anglaises et italiennes

CIII – The Miracle in the Church of ST. Saviour, Beirut

“BROTHER. Shortly after the Ascension of Christ, all the Apostles and disciples having been expelled from Judea, a relative of Nicodemus fled and came to live in this city, carrying with him an image of Christ crucified, which Nicodemus had made from nature. When he died it remained to his heirs and successors. Having rented a house from a Jew, he placed the said image on the wall over the bed. After a year the owner of the house dismissed him as he wanted the house himself. After as it pleased God, when leaving he forgot the said image, and the Jew was not aware of it, nor did he see it. One day inviting the ministers and the priests of the Synagogue to dinner, his eyes were opened, and as it pleased God he saw the image of the Crucified.

Indignant at this and suspecting him of being a Christian, but in secret, they accused him to the high priest: he was taken and scourged and then he affirmed on oath that he had never seen the image. Having expelled him from the synagogue, they took away the said image. Assembling all the Jews in the synagogue, they repeated there one after the other all the mysteries of the passion of Christ. And when they had pierced his side with a lance, immediately blood and water flowed, and with it they filled a vase. The Jews were frightened at this and afeard, and one of them who was lame touched the blood and was healed. They repeated the experiment on all the infirm of the city and they were all perfectly cured immediately.          Moved by this stupendous and admirable fact, they sent for the Patriarch of Antioch, who together with all his bishops of the province came and converted and baptised all that people. With that blood they filled many phials and sent them to the Western church, and the synagogue they consecrated as the Church of the Saviour of the world. And this was the first church in the world to be consecrated as testified in the ‘Rationale divinorum officiorum de consecratione Ecclesiae’. And the church of Beirut commemorates this consecration on November 8th, and there is an indulgence. And for this also at Rome the church was consecrated in honour of the Saviour of the world, in which place is preserved a phial of the said miraculous blood to the praise of the Almighty God. Amen. This church is greatly venerated not only by the Christians but by all the infidels of all that country.”

Capo CIII – Del stupendo myracolo accaduto nel predicto loco de sancto Salvator de Barutho.

“Pocho tempo da po’ la ascensione de Christo, essendo scazati de la Iudea tuti li Apostoli e soi discipoli, uno parente de Nichodemo fugite e vene in questa cita ad habitare, e porto seco la ymagine de Christo Crucifixo,  la qual Nichodemo havia facta cavare dal naturale. E morto lui rimase alli soi heredi e sucessori. ’

‘E tollendo a pisone e fito una casa da uno Iudeo, pose al pariete del lecto la predicta ymagine. Finito adumque l’anno, el patron de la predicta casa lo licentie per volei vi lui habitare. E como piaque a Dio tramutandose se scordo la predicta ymagine ; nè lo Iudeo mai se ne accorse, nè ‘etiam’ la vedeva.

Uno giorno invitando a pranzo li ministri e sacerdoti de la Synagoga foli aperti li ochii : e como piaque a Dio vedero la predicta ymagine del crucifixo. De la qual cossa indignati, dubitando lui esser christiano, ma oculto, lo accusarono al principe de li sacerdoti, el qual essendo preso, e duramento flagellato, cum iuramento affermava, mai haver veduta dicta ymagine. Scazatolo adumque da la Synagoga, pigliarono la dicta ymagine ;  congregati tuti li Iudei ne la synagoga,  renovorono  per ordine in quella tuti li mysterii de la passione de Christo. Et perforato che hebero el costato cum la lanza, subitamente ne ussite sangue et aqua ; de lo qual ne inpirono uno vaso.

Stupefacti de questo tuti li Iudei et inpauriti, uno de loro essendo zoppo, tocando qual sangue, subito fo sanato. Per il che provarono questo facto sopra tuti li infermi de la cità, li quali tuti subitamente forono perfectama sanati. De la qual stupenda cossa et admiranta conponti, manda  veno per el patriarcha de Antiocha, el quale, insieme cum tuti li vescovi de la provintia, convertirono e batizorono tuto quel populo. Del qual sangue inpirono molte ampolline, e mandaronle alla chiesia occidentale, e consecrorono quella sinagoga in chiesia del Salvator  del mondo. E questa e la prima chiesa che al mondo fosse consecrata come testifica e dice Rationale divinorum officiorum de consecratione ecclesie. E questa è quella consecratione che ne fa festa la chiesia de Barutho predicta a di octo de Novembre et ecce la indulgentia. E per questa etiam ad Roma lo consecrata la chiesia in honor del Salvator del mondo. Nel qual loco se conserva una de le ampolle del predicto Sangue myracoloso  ad laude de lo omnipotente Dio. Amen.

Questa adumque chiesa è in tuto quel paese in grande veneratione de tuti con solum Christiani, ma infideli. »’

Dans les notes de Golubovich, une version différente  est signalée dans le Codex n.58  où l’on trouve ‘la leggenda . ‘Circha l’anni del Signore septecento cinquanta, havendo uno christiano …ipegionata ( ?) la casa… piglio un altra casa a pegione lassando per dimenticanza in quello loco la dicta imagine, unde uno Iudeo ecc. (fol. 99r), Idem voir Baranto Annal. T. IX, 737 (ou 787). Che dice successo il prodigio nel 765 ecc.’


1 Ndlr. Dans un article ultérieur sur saint Athanase, une traduction fine de ces textes sera fournie. Nous prions nos lecteurs de bien vouloir patienter.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Retour en haut