Partager la publication "Réflexion sur Tocqueville et sa « démocratie en Amérique »"
Par Conio Gérard
De M. Gérard Conio.
Pour revenir encore sur notre culture de l’égalité qui est plutôt de l’égalitarisme, donc une idéologie, je voudrais renvoyer les lecteurs du Cep à Tocqueville qui, dans ses considérations sur « La démocratie en Amérique » – paru en 1835, rappelons-le –, écrivait ceci :
« On sera surpris et effrayé de voir comment en Europe, tout semble concourir à accroître indéfiniment les prérogatives du pouvoir central et à rendre chaque jour l’existence individuelle plus faible, plus subordonnée et plus précaire. Les nations démocratiques de l’Europe ont toutes les tendances générales et permanentes qui portent les Américains vers la centralisation des pouvoirs et, de plus, elles sont soumises à une multitude de causes secondaires et accidentelles que les Américains ne connaissent point. On dirait que chaque pas qu’elles font vers l’égalité les rapproche du despotisme1. »
Et il concluait son panorama de la démocratie en Amérique par ces termes :
« Je crois qu’il est plus facile d’établir un gouvernement absolu et despotique chez un peuple où les conditions sont égales que chez un autre, et si un pareil gouvernement était établi chez un semblable peuple, non seulement il y opprimerait les hommes, mais qu’à la longue il ravirait à chacun d’eux les principaux attributs de l’humanité. Le despotisme me paraît donc particulièrement à redouter dans les âges démocratiques2. »
1 A. de TOCQUEVILLE, De la Démocratie en Amérique, t. 2, Paris, Garnier-Flammarion, 1981, p. 369.
2 Ibid., p. 389.