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Par Frank M. Rega
L’Évolution : une hérésie ?1
Résumé : Devant le consensus apparent en faveur de l’Évolution, beaucoup sont tentés par une synthèse conciliant les vérités de la religion avec le nouveau « dogme ». C’est l’évolutionnisme théiste : un dieu caché, que les savants n’aperçoivent pas, régit ou accompagne incognito l’auto-invention des êtres vivants. Cette position a été développée par le P. Coyne, ex-directeur de l’Observatoire du Vatican, qui vient de quitter ses fonctions après avoir proclamé dans une conférence la « fertilité de l’univers »
Or il est bien des vérités scripturaires ou théologiques qui s’opposent radicalement à l’évolutionnisme. Par exemple, si la mort est une conséquence du péché d’Adam, les animaux n’ont pu fossiliser avant l’apparition de l’homme. Et si Adam descend d’animaux humanoïdes, il faut admettre que les gènes de celle qui s’est appelée l’Immaculée Conception sont les gènes, fussent-ils modifiés, des animaux sanguinaires qui s’intercalent inévitablement entre Adam et le lombric dont il est issu.
Certains chrétiens, espérons-le, hésiteront un peu avant d’avaler en toute lucidité le breuvage évolutionniste…
Dans une lettre à l’Académie Pontificale des Sciences du 22 Octobre 1996, le Pape Jean-Paul II fit une déclaration discutable: »(…)Aujourd’hui de nouvelles connaissances conduisent à reconnaître dans la théorie de l’évolution plus qu’une hypothèse. » Cette affirmation en irrita beaucoup dans le camp des anti-évolutionnistes, estimant qu’elle retardait la cause du créationnisme et de « l’intelligent design », qui faisait de grands progrès.
Un des aspects de la théorie évolutionniste est la « sélection naturelle » et, dans certains cas concernant les changements à l’intérieur d’une espèce, la sélection naturelle est de fait « plus qu’une hypothèse. » Par exemple, des études ont montré que la taille du bec des pinsons peut varier par sélection à cause de l’environnement. Le même phénomène de variation statistique a été constaté dans des études classiques sur l’avantage vital que procure à la phalène du bouleau, un papillon, la couleur sombre ou claire de ses ailes.
Mais, finalement, nous avons toujours des pinsons et des phalènes du bouleau, même si les changements dus à la sélection naturelle et à l’environnement agissent sur l’information génétique dominante chez les membres d’une espèce.
L’aspect de la théorie évolutionniste le plus souvent mis en question et débattu est l’hypothèse de la « descendance commune. » Elle est discutable car il n’existe pas de preuve expérimentale, scientifique, qu’une espèce ou une famille descende d’une autre. C’est une pure hypothèse, n’ayant jamais dépassé ce stade depuis un siècle et demi. Dans le présent article nous entendrons par évolution cette prétendue descendance commune.
Au cours des dernières années, les travaux de scientifiques utilisant la théorie de l’intelligent design ont efficacement discrédité le néo-darwinisme, c’est-à-dire l’idée d’une apparition de nouvelles espèces par l’interaction de la sélection naturelle, de l’environnement et des changements génétiques dus surtout aux mutations. Parmi les pionniers du mouvement de l’intelligent design figurent l’Anglais Michael Denton, et les Américains William Dembski et Michael Behe, un catholique. Malgré tout, les nouveaux développements qui ont réussi à contester le néo-darwinisme, n’ont pas empêché les évolutionnistes de qualifier effrontément leur modèle de « fait de l’évolution. » Mais la descendance évolutionniste ne peut être qualifiée ni de fait, ni de « plus qu’une hypothèse », puisqu’il n’a jamais été scientifiquement prouvé que des animaux ou des plantes plus complexes se soient développés à partir d’autres espèces ou de formes de vie plus simples. Les expériences en laboratoire sur les mutations génétiques n’ont jamais prouvé l’apparition de nouvelles espèces ni même celle d’une « version améliorée » des espèces existantes.
Malheureusement, l’évolution est encore acceptée comme vraie par bien de catholiques sans esprit critique. Peut-être certains ont-ils si peur d’une autre « affaire Galilée », qu’ils se mettent en quatre pour concilier la théorie de l’évolution avec leur religion. D’où le compromis de « l’évolution théiste », selon lequel Dieu utilisa ou permit la descendance évolutionniste comme le mécanisme de la Création. Suivre cette ligne de pensée paraît permis aux catholiques d’après l’encyclique Humani Generis du Pape Pie XII.
L’encyclique concède que, dans l’état actuel (en 1950) des sciences et de la théologie, il est permis de « rechercher si le corps humain fut tiré d’une matière déjà existante et vivante – car la foi catholique nous oblige à maintenir l’immédiate création des âmes par Dieu. » Dans le demi-siècle suivant comme pendant le siècle et demi après Darwin, la discussion sur la possibilité d’une descendance de l’homme à partir d’animaux inférieurs s’est poursuivie, et cette théorie reste toujours aussi hypothétique et démunie de preuve.
Les évolutionnistes théistes qui ont accepté la fausse prémisse du « fait » de l’évolution doivent essayer de la concilier avec leur foi chrétienne, mais ils ne peuvent le faire sans diluer cette même foi. Par exemple, comment l’accommoder avec la Bible disant que Dieu créa l’homme non seulement avec une âme immortelle, mais avec un corps qui n’était pas soumis à la mort – une mort qui entra dans le monde avec la chute d’Adam ?
« Ainsi donc, comme par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort; ainsi la mort a passé dans tous les hommes parce que tous ont péché. » (Rm. 5,12). Également dans le Catéchisme de l’Église Catholique (§ 1008) « La mort est la conséquence du péché. Interprète authentique des affirmations de la Sainte Écriture et de la Tradition, le Magistère de l’Église enseigne que la mort est entrée dans le monde à cause du péché de l’homme. » En outre, le Livre de la Sagesse semble indiquer qu’à l’origine aucun être vivant, d’aucune sorte, n’était soumis à la mort: « Car Dieu n’a pas fait la mort, et Il n’éprouve pas de joie de la perte des vivants. Il a créé toutes choses pour qu’elles soient. » (Sg 1,13-14)
Et pourtant, les partisans de l’évolutionnisme théiste maintiennent que Dieu a utilisé la survie du plus apte, la violence, la mort et la sélection naturelle pour aboutir aux différents êtres vivants selon un processus évolutionniste.
Ils doivent donc expliquer, en s’accordant avec l’Écriture, comment des animaux qui se battirent, se tuèrent et s’entre-dévorèrent pour survivre, parvinrent finalement à un degré de perfection tel que Dieu trouva convenable de donner aux hommes une âme immortelle et un corps indestructible. « Car Dieu a créé l’homme pour l’immortalité, et il en a fait une image de sa propre nature. » (Sg 2, 23)
De nombreux autres problèmes sérieux apparaissent lorsqu’on analyse l’évolution d’un point de vue catholique.
Quelques excellents exemples de ces difficultés, et de ce qui peut arriver au concept de « Dieu » lorsque l’on veut marier l’évolution au catholicisme, apparaissent dans une communication récente du P. George V. Coyne S.J., ex-Directeur de l’Observatoire du Vatican. En janvier 2006, à l’Université de Palm Beach Atlantic (Floride), il donna une conférence affirmant le « fait » de l’évolution, intitulée « La Science n’a pas besoin de Dieu, n’est-ce pas ? Un savant catholique regarde l’Évolution. » Les raisons qu’il présenta pour défendre, expliquer et justifier l’évolution sont exactement les raisons pour lesquelles la théorie de l’évolution constitue un piège fait de propositions dangereuses pour la foi catholique.
Il semble que son exposé ait été avant tout un moyen de présenter ses objections à un article du New York Times du cardinal Christophe Schönborn (7 juillet 2005)2. Dans cet article intitulé « Découvrir la finalité dans la nature », le cardinal nie explicitement que l’évolution soit « …compatible de quelque façon avec la foi chrétienne », puisque « …l’évolution au sens néo-darwinien, de processus non dirigé, non prémédité, de variations aléatoires et de sélection naturelle … » n’est pas vraie. Parlant de l’évolution comme d’un système de pensée idéologique cherchant à « expliquer » les preuves d’une finalité dans la nature, il écrit: « …les théories scientifiques qui tentent d’expliquer l’apparence de finalité par <le hasard et la nécessité> ne sont pas du tout scientifiques, mais, comme Jean-Paul le dit, une abdication de l’intelligence humaine. » L’article du cardinal ne vise pas la théorie de « l’intelligent design » comme telle. Il affirme plutôt que, par la lumière de la seule raison, comme le proclame l’Église, « …l’intelligence humaine peut facilement et clairement discerner l’intention et la finalité dans le monde naturel, y compris celui des êtres vivants. »
Dans sa conférence le P. Coyne énumère cinq raisons pour lesquelles il estime que la position du cardinal contre l’évolution est inexacte ( » le cardinal se trompe sur au moins cinq points fondamentaux… »). Voici une brève description des arguments du P. Coyne, avec nos explications montrant qu’ils sont tous irrecevables.
Son premier point énonce que l’évolution est « complètement neutre par rapport à la pensée religieuse. » Par là il veut évidemment insinuer que l’intelligent design n’est pas religieusement neutre.
Mais, comme le soulignent tous ses adeptes, la théorie de l’intelligent design ne prend aucune position sur qui ou quoi est responsable du dessein, ni ne fait la moindre supposition sur la religion. Puisque l’hypothèse scientifique posant qu’il existe de la finalité et de l’intention dans la nature n’a rien à voir avec un point de vue religieux, elle est à cet égard aussi neutre que la théorie de l’évolution.
Le deuxième argument du P. Coyne contre le cardinal cite le discours où Jean-Paul II déclara que l’évolution est « plus qu’une hypothèse. » Cependant, comme nous l’avons vu plus haut, c’est seulement dans des domaines limités de sélection naturelle que certains faits avérés sont plus qu’une hypothèse. En outre, le Saint Père ne donnait pas son approbation globale à l’ensemble de la théorie de l’évolution.
La troisième objection est intéressante parce que le P. Coyne prétend que l’évolution selon le néo-darwinisme n’est pas « le processus non dirigé de variations aléatoires et de sélection naturelle » que désigne le cardinal Schönborn. Plus loin dans son exposé, il présente sa propre version de la théorie de l’évolution (qui n’est pas le néo-darwinisme standard) où le hasard se combine avec la « nécessité » et la « fertilité. » La fertilité est décrite ainsi: « L’univers possède une certaine vitalité propre, comme l’enfant. Il a la capacité de répondre à des mots d’affection et d’encouragement. » Ici le P. Coyne ajoute que « Dieu travaille avec l’univers », mais il décrit pourtant l’évolution comme un processus dans lequel Dieu n’intervient pas directement: « Dieu laisse le monde devenir ce qu’il devient dans son évolution permanente. Il n’intervient pas, mais plutôt permet, participe et aime. » Ainsi avons-nous un Dieu qui n’intervient pas dans sa propre création, affirmation très surprenante quand on pense à l’Incarnation, qui fut une fameuse intervention!
À propos du hasard et de la nécessité, nous lisons dans le Catéchisme de l’Église catholique (n° 295): « Nous croyons que Dieu a créé le monde selon sa sagesse. Ce monde n’est pas le produit d’une nécessité quelconque, ni d’un destin aveugle ou du hasard. »
Sa quatrième objection au cardinal Schönborn fait une pétition de principe puisque le P. Coyne y présuppose la validité du « processus évolutionniste »: « …l’orientation apparente vue par la science dans le processus évolutionniste ne requiert pas d’architecte… » Cette objection est en contradiction avec les paroles du Pape Jean-Paul II lors de son audience générale du 10 juillet 1985, citées par le cardinal: « Cette finalité qui oriente les êtres dans une direction pour laquelle ils ne sont pas responsables, oblige à supposer un Esprit qui soit son inventeur, son créateur. » Dans cette même catéchèse le Saint Père ajoutait: » Parler de hasard pour un univers offrant une telle organisation complexe de ses éléments et une telle merveilleuse finalité dans sa vie équivaudrait à renoncer à la recherche d’une explication du monde tel qu’il nous apparaît. En réalité, ceci reviendrait à admettre des effets sans cause. Ce serait une abdication de l’intelligence humaine qui refuserait ainsi de penser, de chercher une solution à ses problèmes. » Le P. Coyne se retrouve bien seul sur une glace fort mince lorsqu’il affirme que la finalité montrée par la nature n’oblige pas à considérer un Ingénieur intelligent.
Sa cinquième objection assène que « …l’Intelligent Design n’est pas de la science… » Cette fois il a raison; puisque ce n’est pas une science…mais une théorie, une façon de conduire les investigations scientifiques. Elle prédit que s’il existe une structure organique, elle doit avoir un but, et que déterminer ce but peut être un objet de recherche scientifique. La théorie de l’évolution, au contraire, nie que la structure naturelle ait un but, car cette structure pourrait être le vestige d’un ancêtre ou encore une anomalie ayant survécu par hasard bien qu’elle n’ait pas de valeur vitale. Par conséquent l’évolution n’est pas un outil utile pour la prédiction scientifique, alors que l’intelligence intentionnelle prédit qu’une utilité sera trouvée pour toute structure vivante observée dans la nature. De fait, on a découvert que presque tous ces organes que les évolutionnistes prenaient pour des vestiges, ont une finalité.
Le discours du P. Coyne montre utilement comment notre conception de Dieu est déformée en essayant de concilier les principes de l’évolution avec les principes établis de la foi. La conclusion évidente de sa théorie révisée de l’évolution comme mélange de nécessité, de hasard et de fertilité est, à ce qu’il remarque, un « Dieu » qui n’intervient pas dans la « loterie » de l’évolution. « Pendant 13,7 milliards d’années l’univers a joué à la loterie…Un bon exemple de hasard serait deux molécules très simples errant dans l’univers. Elles se rencontrent et, lorsqu’elles le font, elles adoreraient faire une molécule plus complexe parce que telle est la nature de ces molécules…Ce processus se poursuivant, des molécules plus complexes se développent, il y a de plus en plus d’orientation dans ce processus…c’est de cette manière que le cerveau humain est apparu et qu’il poursuit son évolution. » Le jésuite ajoute: »…il serait scientifiquement absurde de nier que le cerveau humain est le résultat d’un processus de complexification chimique dans un univers en évolution. »
Face à cette loterie de molécules errantes et de cerveaux humains évoluant chimiquement, il y a la Parole de Dieu. Pour ne citer que deux des nombreux textes pertinents:
Par la parole du Seigneur les cieux ont été faits,
Et toute leur armée par le souffle de sa bouche.
Comme dans une outre Il serre l’eau marine
Et dans des réservoirs place les océans
Que toute la terre craigne le Seigneur!
Que tous les habitants de l’univers tremblent devant lui
Car Il a dit, et tout a été fait;
Il a ordonné, et tout a existé. (Ps 33, 6-9)
« Je t’en conjure, mon enfant, regarde le ciel et la terre, vois tout ce qu’ils contiennent et sache que Dieu les a créés de rien, et que la race des hommes est arrivée ainsi à l’existence. »
(2 Macchabées 7,28)
Non seulement le P. Coyne propose un Dieu non interventionniste mais il met en doute le besoin absolu de Dieu. « Avons-nous besoin de Dieu pour expliquer cela [l’origine de la vie] ? Très succinctement ma réponse est non.
En fait, avoir besoin de Dieu serait une vraie dénégation de Dieu. Dieu n’est pas la réponse à un besoin. » Et plus loin: « Nous ne devrions pas avoir besoin de Dieu; nous devrions l’accepter, lui ou elle (sic), lorsqu’il vient à nous. »
Pas besoin de Dieu ? Pour ne citer qu’un seul verset d’une pléthore disponible: « Sans moi vous ne pouvez rien faire » (Jn 15,5). Qui d’autre peut nous pardonner nos péchés ? Qui d’autre répond à nos prières ?
D’autre part, son souci de prendre « la science moderne au sérieux » conduit le P. Coyne à minimiser la vision du Dieu vraiment personnel qui nous a été révélé en Jésus-Christ. Bien qu’il mentionne sa description d’un « Dieu personnel », il poursuit : « Nous ne pouvons connaître Dieu que par analogie. L’univers tel que nous le connaissons aujourd’hui par la science est un moyen d’obtenir une connaissance analogique de Dieu. »
Il est merveilleux d’apprendre que la science moderne peut nous enseigner quelque chose sur Dieu, ne serait-ce que par analogie. Cependant, comme catholiques et chrétiens, nous connaissons Dieu indépendamment de la science, parce qu’il s’est révélé à nous dans l’Incarnation, dans l’Écriture, par les sacrements, particulièrement le baptême et la confirmation où nous recevons le Saint Esprit, et très spécialement par la Sainte Eucharistie. « Mais nous savons que le Fils de Dieu est venu, et qu’il nous a donné l’intelligence pour connaître le véritable Dieu, et nous sommes en ce véritable Dieu, en son Fils Jésus-Christ. C’est lui qui est le Dieu véritable et la vie éternelle. » (1 Jn 5, 20) Et lorsque nous recevons son corps et son sang, Jésus vient à nous réellement et pas seulement par analogie. « Celui qui mange ma chair et boit mon sang, demeure en moi, et moi en lui. » (Jn 6, 56)
Cette référence aux Corps et au Sang eucharistiques conduit au cœur du présent article, qui est d’identifier quelques uns des problèmes tournant autour de la relation entre l’évolution du corps humain et l’humanité de Jésus. De nouveau, les propos du P. Coyne fournissent une déclaration discutable pour amener la première de ces questions. Parlant du processus de l’évolution, qu’il considère comme se poursuivant, il dit: » C’est de cette manière que le cerveau humain est apparu et qu’il poursuit son évolution. »
Donc, la création par évolution (hasard, nécessité et fertilité) est un processus permanent comprenant l’évolution de l’être humain. Sans chercher à détailler comment ceci entre en conflit évident avec l’achèvement des Six jours de la Création décrits dans la Genèse, un autre problème plus subtil surgit.
Il y a deux mille ans, Jésus, le Fils de Dieu, s’incarna en un être humain, le plus parfait de tous les humains à tous égards, chair, cerveau et esprit. Ce même Jésus dans son corps glorifié est désormais assis à la droite du Père dans les cieux. D’après le P. Coyne et tous ceux qui acceptent sa position, nos corps humains terrestres vont finalement évoluer vers quelque état supérieur à ce qu’ils sont aujourd’hui.
Ceci veut dire qu’un quelconque être (sur)humain futur aura une humanité plus parfaite en sa chair que celle que revêtit le Fils de Dieu dans son Incarnation.
Or toute proposition, par un évolutionniste catholique, de la continuation de l’évolution du cerveau ou du corps humain se heurte, par exemple, à cette déclaration de foi du Concile de Chalcédoine: « …nous confessons un seul et même Fils, notre Seigneur Jésus Christ, le même parfait en divinité, et le même parfait en humanité, le même vraiment Dieu et vraiment homme (composé) d’une âme raisonnable et d’un corps, consubstantiel au Père selon la divinité et le même consubstantiel à nous selon l’humanité, en tout semblable à nous sauf le péché. » (5ème session du 22 octobre 451). Par conséquent, il semble qu’il soit impossible pour l’Église de jamais pouvoir accepter une théorie de l’évolution corporelle permettant à un futur être humain d’avoir un corps supérieur à l’humanité de Jésus-Christ, ou essentiellement différent de lui.
Vient ensuite le problème de l’origine d’Adam. En toute honnêteté, il faut noter que ni ce point ni ceux qui vont suivre, ne furent mentionnés dans l’exposé du P. Coyne. L’Église, en accord avec la Sainte Écriture, a toujours enseigné qu’Adam fut le premier homme. Cependant les évolutionnistes catholiques, tout en admettant qu’Adam fut le premier homme et admettant même une création spéciale d’Ève, doivent donner à Adam des sortes de parents de chair et de sang.
Mais ces parents, évidemment, ne peuvent pas être eux-mêmes de la race de « l’homme » et ils ne sauraient donc avoir des âmes humaines rationnelles. En d’autres termes, les parents d’Adam devraient avoir été des hominidés infra-humains qui auraient donné naissance au premier véritable être humain.
Le chapitre 3 de Luc donne une généalogie du Messie, remontant jusqu’à l’origine. Pour les temps les plus anciens, le dernier verset énumérant la ligne ancestrale énonce: « …fils d’Enos, fils de Seth, fils d’Adam, fils de Dieu. » (Lc 3, 38)
L’évolutionniste a maintenant besoin d’insérer d’autres membres non humains dans cet arbre généalogique afin de combler le vide entre Adam et Dieu. À mesure que l’arbre remonte dans le temps, les ancêtres d’Adam ne sont même plus des hominidés, mais d’autres mammifères, puis des créatures encore plus primitives, peut-être des oiseaux, des reptiles, des amphibiens et finalement des poissons ou ce que désigne la descendance évolutionniste actuellement en vogue. En outre ces animaux inférieurs ont évolué vers le stade humain par leur capacité de survie. En vertu du principe de la survie du plus apte, ces créatures transmirent aux générations futures les différentes adaptations génétiques qui leur permirent de chasser, de tuer et de dévorer leurs proies plus efficacement que les hôtes de la jungle avoisinante. Tels seraient donc, d’après les évolutionnistes chrétiens, les ancêtres de Jésus-Christ. Cette conclusion ne veut pas dire qu’il y ait quelque chose de « mauvais » ou de négatif dans la matière elle-même; elle montre plutôt les implications embarrassantes que les partisans de l’évolutionnisme théiste doivent admettre.
D’autres raisons extrêmement importantes rendent affligeant d’entendre des intellectuels catholiques prétendre que l’évolution est compatible avec le catholicisme. Regardons d’un peu plus près l’humanité de Jésus en considérant la Bienheureuse Vierge Marie, mère du Dieu-Homme, Jésus-Christ. La Vierge Marie annonça à Lourdes à sainte Bernadette :« Je suis l’Immaculée Conception. » Elle est immaculée, sans péché et pure dans son corps et dans son âme. Considérons aussi notre dévotion à son Cœur Immaculé.
Lors des apparitions de Fatima en 1917, Notre Dame a révélé aux voyants : « …Dieu veut instaurer dans le monde la dévotion à mon Cœur Immaculé…Je viendrai pour demander la consécration de la Russie à mon Cœur Immaculé. » Et, ce qui est peut-être le plus important, « À la fin, mon Cœur Immaculé triomphera. »
Les évolutionnistes théistes sont forcés de reconnaître que dans la lignée évolutionniste supposée d’Adam, les ancêtres de la plus pure et de la plus parfaite des femmes doivent compter des créatures primitives mi-humaines, mi-animales.
En termes plus simples et plus choquants (au risque de paraître dur et grossier, mais ceci doit être mis en lumière) : selon le plan divin d’une évolution guidée, l’arrière-arrière… arrière-arrière-grand-père de la Sainte Vierge Marie aurait été un gorille, un singe ou un lémur de la jungle, ou même un singe-homme encore plus primitif ! Ces créatures seraient non seulement les géniteurs de la chair humaine par développement génétique, mais elles seraient aussi les ancêtres de leur constitution psychologique.
Les partisans de l’évolution théiste ne peuvent éluder que telle est la conclusion logique et nécessaire de leur croyance. Cela ne revient pas à nier la possibilité théorique d’une telle ascendance, dont la cause finale serait la volonté de Dieu, puisque tel est le sens que certains entendent donner au « limon » de la terre à partir duquel l’homme fut formé (Gn 2, 7). Cependant, ceux qui acceptent cette vue doivent admettre l’existence d’une généalogie pré-adamique infrahumaine pour origine génétique non seulement de l’homme en général, mais de la Maison de David, de la Sainte Famille et, tout spécialement, du Jésus de l’eucharistie.
Lors de l’Incarnation, le corps de Jésus fut tiré de la chair de Marie, et nous recevons ces mêmes précieux Corps et Sang de Notre Seigneur dans notre propre corps lorsque nous consommons les espèces eucharistiques. L’argument de la descendance évolutionniste commune entraîne l’affirmation que la chair de la Bienheureuse Vierge Marie et les précieux Corps et Sang de Jésus proviennent finalement d’ancêtres animaux primitifs et de formes de vie inférieures, qui se tuèrent et s’entredévorèrent.
Devons-nous dire alors que le Corps et le Sang de notre Sauveur, que nous recevons à la sainte messe, est la chair – bien que maintenant glorifiée – de quelqu’un dont les ancêtres maternels lointains comprenaient des singes, des reptiles et des créatures les plus basses ?
Pourtant cette conclusion dérangeante est la conséquence inévitable de la position prise par tous ceux qui soutiennent n’importe quelle forme d’évolution humaine. Même s’il était possible de justifier de tels concepts, ces pensées et images soulèvent une répulsion innée sur le plan de la dévotion.
Tels sont quelques uns des problèmes qu’une analyse vraiment théologique de l’évolutionnisme théiste doit considérer et résoudre de façon satisfaisante, si l’on veut que l’évolution puisse un jour être considérée comme compatible avec la Foi catholique. La réponse du bon sens, cependant, est de tenir de telles idées pour impensables et peut-être blasphématoires. Bien qu’il soit permis maintenant, selon l’enseignement de l’Église, de discuter librement de l’hypothétique évolution du corps humain, on peut légitimement poser la question suivante: est-il possible que les concepts de descendance évolutionniste commune et d’évolution théiste ne soient un jour considérés comme hérétiques?
Par exemple, l’Incarnation du Christ dans le temps paraît interdire, au moins pour raison théologique, la proposition que le corps humain continue d’évoluer. Deuxièmement, puisque la « mort » est une partie intégrante de l’évolution, la charge de la preuve est pour les évolutionnistes d’expliquer pourquoi l’auteur tout-puissant de la vie (Actes 3,15) aurait utilisé la mort et le carnage pendant des périodes incommensurables afin de « créer » les êtres humains. Enfin, comment l’Église pourrait-elle soutenir que le Corps et le Sang de Jésus, la Résurrection et la Vie, (Jn 11,25) que nous recevons dans la sainte Eucharistie, est bien la même humanité dont la « création » fut le résultat d’une combinaison fataliste de sélection naturelle, de hasards, de mutations et d’un cruel processus impersonnel de naissance, de mort, de destruction et de tuerie, afin de mettre au point la machine de survie la plus efficace ?
« En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes. » (Jn 1,4).
1 Reproduction autorisée du Remnant , 15 Septembre 2006. Titre original: Evolution as Heresy ? Traduction Claude Eon.
2 Ndlr. A ce sujet on se reportera aux Cep n° 33 et 35.