Partager la publication "Asthme et Allergie"
Par Gernez André Pr.
Résumé : Cette courte étude est caractéristique de la méthode suivie par le Dr Gernez : acqusition intelligente des données, identification du nœud décisif, proposition thérapeutique, extrême concision du style. Ainsi les allergies, réactions immunitaires intempestives, peuvent être reliées à une insuffisance de stimuli de la mémoire immunitaire lors de la période post-natale. La naissance à l’hôpital, fréquente dans les pays dits avancés, fait que ce mileiu aseptisé atrophie la maturation du système immunitaire du bébé. On pourra pallier cet inconvénient en faisant respirer au nouveau-né des poussières de maison judicieusement prélevées. Le risque est nul en opérant tôt, lorsque l’immunité est encore assurée par les immunoglobulines maternelles.
On assiste depuis trois décennies à une explosion incontrôlée des maladies allergiques dont la morbidité s’accroît de 50% à chaque décennie et qui atteint actuellement 30% de la population française (3,8% en 1968, 10% en 1982, 28% en 1992).
La progression se poursuit sans qu’une parade efficace puisse lui être opposée : la désensibilisation est abandonnée chez les anglo-saxons, les antihistaminiques n’ont qu’un effet symptomatique, 73 % des malades redoutent qu’un traitement broncho-dilatateur continu n’entraîne une servitude et que les corticoïdes n’aggravent leur état.
Concrètement, aucune famille française n’est épargnée.
À l’exception toutefois de groupes qui restent indemnes sous l’effet d’une procédure aussi simple que conforme aux données classiques de la biologie, qu’il convient de rappeler : D’une part, au cours de l’organogenèse, toutes les fonctions passent par un stade initial de maturation, dit « période sensible», au cours duquel une carence ou une insuffisance de stimulation laisse un stigmate indélébile. C’est ainsi qu’un souriceau dont on bande les yeux à la naissance pendant quelques heures restera malvoyant pendant toute sa vie.
D’autre part, l’enfant présente à la naissance un système immunitaire immature et afonctionnel, mais un système de reconnaissance antigénique développé qui régresse avec l’apparition du pouvoir de synthétiser des anticorps.
C’est la période sensible dite de « tolérance immunitaire» qui permet à l’organisme de reconnaître et de tolérer par la suite, sans réactivité, ses propres constituants et ceux de l’environnement avec lequel il est destiné à vivre.
Au terme de cette période post-natale, ne restent réactigènes et allergéniques que les constituants du biotope qui, par leur absence ou leur insuffisance de contact, ont échappé à la recon- naissance et à la tolérance mémorisée du système immunitaire.

Fig. 1 : Variation des allergènes atmosphériques au cours de l’année
C’est le cas particulier des naissances qui se produisent à l’étiage de concentration saisonnière minimale en pollens et spores, à la charnière mars-avril sous notre latitude.
Le pic d’atopie1 y est alors impressionnant.

Fig. 2 : Fréquence des pollinoses avant et après l’âge de 6 ans, en fonction du mois de naissance (source : Revue française d’allergologie 19.3.79)
C’est surtout le cas général, qui résulte de l’accession à la modernité des conditions périnatales que caractérise une asepsie systématique. La substitution d’une obstétrique hospitalisée à l’accouchement domestique, favorisée par une urbanisation qui regroupe 75,5 % de la population, réalise autour du nouveau-né une bulle stérile dans laquelle le processus de tolérance immunitaire reste atrophié par manque de stimulation. Sont systématiquement traqués et chassés des salles de travail, d’incubation et de séjour, à la période la plus active de tolérance immunitaire, tous les facteurs qui la génèrent : poussières, pollens spores, moisissures, poils, plumes, saprophytes, germes.
La sanction en est la réduction définitive de la tolérance immunitaire. Celle-ci, très active à la période postnatale avec un rapport élevé antigène/cellules immunocompétentes (réagines IgE à 0,2 Ul/ml), régresse rapidement (avec un taux de 0,7 au 2e mois) et s’éteint avant le 6e mois (taux de 2,7) en même temps que la période de reconnaissance neutralisante adoptive.
Ce mécanisme biologique rend compte de toutes les expressions de la cinétique actuelle des atopies immunitaires :
– prévalence des manifestations allergiques dans les pays et les classes favorisés ;
– participation des groupes défavorisés au fur et à mesure de leur accession à la modernité ;
– progression parallèle à celle de l’urbanisation qui concerne actuellement 75,5 % de la population ;
– protection, dans une même aire, avec un ratio de 0,14/3,17 %, des enfants nés en contact étroit avec un milieu rural ;
– innocence actuellement reconnue de la pollution atmosphérique qui est aggravante, mais non initiatrice de l’atopie.


Fig. 3 : Évolution des populations françaises urbaine et rurale depuis 1936.
La solution
La solution, simple au point d’en paraître dérisoire, mais dont un recul de deux décennies confirme l’efficacité, consiste à assurer le contact post-natal avec les constituants du biotope pour que celui-ci ne soit plus réactigène.
La procédure se borne à souffler au-dessus du berceau du nouveau-né une pincée de poussière de maison recueillie en août dans le sac d’un aspirateur domestique et à laquelle on ajoute un mélange de pollens vendu dans le commerce.
La stérilisation en est inutile en raison de la couverture par les immoglobines maternelles.

Fig. 4 : Couverture immunitaire du nouveau-né : jusqu’à 2 mois, les immunoglobulines maternelles continuent d’assurer l’immunité.
De plus, la stérilisation risque, si elle est thermique, d’altérer la stéréo-configuration de structures antigéniques et de supprimer des tolérances croisées induites par leurs déterminants.
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Références
Atlas de biologie, Stock 309
Revue française d’Allergologie, 1979, 19.3
Immunologie, P.U.F 64
Les pollinoses, Lab. Fisons 212, QM 26-287
Allergologie et immunologie, 1985, XVII 153
Gazette médicale, 1987, 94 n°13
Pathologie médicale, Pequinot 184
Encyclopédie Médico-chirurgicale : « Pédiatrie » 3, 8 000 h 10
Immunologie, Delaunay, 66
Pédiatrie, Pasteur, V. R. 28 D
Liste des images présentes dans l’article.
- image1: Variation des allergènes atmosphériques au cours de l’année
- image2: Fréquence des pollinoses avant et après l’âge de 6 ans, en fonction du mois de naissance
- image3: Évolution des populations françaises urbaine et rurale depuis 1936.
- image4: Couverture immunitaire du nouveau-né : jusqu’à 2 mois, les immunoglobulines maternelles continuent d’assurer l’immunité.
1 Ndlr. Manifestation allergique, ici (fig. 2, flèche rouge) une pollinose.