Accueil » Les singes thérapeutes

Par Combris Gabriel

, , , ,

REGARD SUR LA CRÉATION
« Car, depuis la création du monde, les perfections invisibles de Dieu, sa puissance éternelle et sa divinité, se voient comme à l’œil nu quand on Le considère dans ses ouvrages »
(Rm 1, 20).

Les singes thérapeutes1

Résumé : L’étude des animaux dans leur milieu de vie peut amener à des découvertes surprenantes. C’est ainsi qu’une jeune vétérinaire, Sabrina Krief, a constaté que les chimpanzés, même élevés en zoo où ils ne conaissent que la banane et les quignons de pain des visiteurs, savent d’instinct de quelles plantes ils doivent se nourrir, avec quelles feuilles se débarrasser des vers intestianux et même comment soigner le paludisme. Remarquons toutefois que la « surprise » de cette jeune femme ne tient qu’à sa vision évolutionniste du monde. En réalité, Dieu a créé dès le Commencement et l’être vivant et son milieu de vie. L’instinct ne vient pas d’une adaptation progressive (comment l’animal pourrait-il vivre avant d’être adapté ?) mais est une des modalités de la préadaptation2 universelle.

Cette histoire commence avec les recherches d’une jeune vétérinaire, Sabrina Krief, qui a commencé à étudier les chimpanzés en 1997, au Congo Kinshasa. Six singes dont la mère avait été abattue par des braconniers furent recueillis et éduqués par des humains. Lors de leur réintroduction dans la forêt équatoriale, à l’âge adulte, la vétérinaire fut chargée de vérifier leur état de santé, évaluer leurs capacités de survivre et leur donner d’éventuels compléments alimentaires. Mais voilà ce qu’elle a observé : « Dès le premier jour, les chimpanzés ont été autonomes et ont mangé les bonnes plantes, alors qu’ils avaient été élevés aux bananes. »

Non seulement ils savaient intuitivement ce qu’ils devaient manger pour ne pas s’empoisonner, mais ils pratiquaient aussi une forme d’automédication : lorsqu’ils étaient malades, ces chimpanzés se nourrissaient de plantes qui ne faisaient pas partie de leur régime habituel. Comme s’ils connaissaient leur pouvoir médicinal ! 

Après quelques semaines cependant, la vétérinaire s’inquiéta… elle avait constaté que les chimpanzés consommaient leurs propres crottes. Un trouble du comportement, peut-être lié à l’absence de mère ? Non. Sabrina Krief comprit que les singes ne mangaient pas leurs crottes, mais picoraient des graines au milieu de celles-ci. Et l’explication apparut alors : « J’ai réalisé que les chimpanzés étaient friands d’un fruit dont ils avalent non seulement la pulpe mais également le noyau. Celui-ci, au départ noir et très dur, devient mou et blanc nacré à la suite d’une première transformation chimique lors de la digestion. »

À l’analyse, ces graines se révéleront d’une exceptionnelle richesse protéique, devenue biodisponible grâce à ce processus de digestion en deux temps… Derrière ces chimpanzés se cachent de véritables experts en micronutrition, dignes de célébrité… Et ce n’est pas tout !

Stratégie des chimpanzés contre les vers digestifs

Les singes sont aussi détenteurs d’une science de l’automédication : « Le matin, certains d’entre eux roulaient une feuille rugueuse d’aspilla sur elle-même et l’avalaient tout rond, sans la mâcher. » 

« Ils renouvelaient leur prise une trentaine de foisSix heures plus tard, en analysant les crottes, nous avons retrouvé les feuilles intactes dont les petits poils avaient accroché des parasites. »

Vous avez compris : poussées dans le système digestif sans pouvoir être digérées, toutes ces feuilles rugueuses agissent comme un velcro, accrochant et chassant les vers… Magistral ! 

Les singes trouvent un traitement antipalu 

Les grands singes ont aussi pour habitude de mâcher des feuilles aux propriétés antibactériennes, mélangées avec de la viande. Cela ne vous dit rien ?

Il existe nombre de traditions culinaires dans lesquelles la viande est associée à des herbes aromatiques ou des épices dont les vertus antibactériennes et digestives sont connues (coriandre, cardamome, cumin, fenouil, curcuma, etc.) Et quand les malaises sont là, les chimpanzés non plus ne sont pas démunis. 

Un matin, Sabrina Krief constate qu’une jeune femelle atteinte d’une diarrhée alternant avec de la constipation réalise de gros efforts pour écorcer longuement un Albizia, afin de lécher la résine qui s’écoule du tronc. À l’analyse, cette résine se révélera contenir des molécules saponines jamais identifiées jusqu’alors et aux propriétés vermifuges, mais également anticancéreuses. Plus étonnant encore, fut la découverte d’une plante contenant une molécule aussi active contre le paludisme que la chloroquine, la substance médicamenteuse de référence

Un jour, un mâle visiblement abattu se met à ingérer de jeunes feuilles de Trichilia rubescens, une plante que les chimpanzés mangent rarement. Après avoir ingéré les feuilles, le primate se met à creuser parmi des racines pour prélever une poignée de terre fine et rouge. Des analyses montreront que la terre potentialise l’activité des molécules antipaludisme de la plante ! Quand on sait que cette maladie fait plus de 600 000 morts par an, on mesure l’intérêt potentiel d’une telle découverte pour la santé humaine… 

Dans la pharmacie des chimpanzés

Alors, y aura-t-il bientôt des singes pour faire la leçon aux étudiants en médecine ? Il y a en tout cas beaucoup de choses à découvrir dans la pharmacie des chimpanzés. Il suffit d’observer leurs conditions de vie pour comprendre que ce sont d’excellents médecins : malgré les parasites, malgré les champignons, les bactéries, malgré les mutilations dues aux pièges des braconniers, les chimpanzés vivent parfois au-delà de 65 ans. Et ils résistent mieux à certaines maladies communes à nos deux espèces. Alors qu’au Togo et au Ghana un parasite digestif, l’œsophagostomum, provoque une très forte mortalité chez l’homme, le même parasite, également mortel pour les chimpanzés captifs, n’occasionne aucune mortalité chez les chimpanzés sauvages…

Leur remède : les feuilles rugueuses d’Aspilla qu’ils avalent quand ils sont infectés et qui permettent d’évacuer le parasite. Ah, une dernière chose : leurs ordonnances sont entièrement gratuites. Et avec eux, on s’amuse bien ! 


Appendice. Dans un numéro de la rubrique « Sciences » du Figaro3, nous relevons d’intéressants compléments sous le titre :

Dans la pharmacie des singes.

Jérôme Strazzulla

Il faut être curieux de nature pour aller goûter les plantes que mâchonnent les singes et vérifier ainsi que le plaisir gustatif ne motive pas toujours les primates dans leur sélection alimentaire. On appelle zoopharmacognosistes cette catégorie de chercheurs qui ne craint pas d’user de leurs papilles pour saisir les richesses de l’instinct alimentaire animal. Leur méthode ne se limite pas à l’empirisme du goût, elle s’appuie sur une solide connaissance zoologique préalable accompagnée d’analyses biochimiques. Leur recherche vient de porter des fruits inattendus4

La zoopharmacognosie a commencé lors d’un beau lever de soleil sur la forêt tanzanienne. Richard Wrangham, anthropologue à Harvard, observait le comportement des chimpanzés à l’aube. Pourquoi certains primates prenaient-ils la peine de marcher pendant une vingtaine de minutes le ventre vide, négligeant les fruits des arbres les plus proches ? Le chercheur repéra un arbre sélectionné par les primates. Un Aspilia mossambicensis ;de la même famille que le tournesol. L’homme cueillit une des feuilles si appréciées, la mâcha et constata instantanément que le goût fort désagréable n’expliquait rien. Il envoya donc quelques feuilles dans un laboratoire de biochimie (Eloy Rodriguez, Université de Californie). Celui-ci certifia que le principal composant de la feuille d’Aspilia était une huile rouge, la thiarubrine A.

Cette dernière a la propriété de tuer champignons, parasites et nématodes, dont ceux qui sont réputés pour perturber l’intestin du chimpanzé tanzanien.

Présentant ses travaux tout récemment à Chicago, lors de la grande fête de la science américaine (le Congrès de l’American Association for the Advancement of Science, ou AAAS), Richard Wrangham comprit qu’il n’avait pas épuisé toutes les finesses du chimpanzé tanzanien. Son collègue Michael Huffmann, de l’université de Kyoto, avait suivi, lui, une femelle chimpanzée apparemment au plus mal. Son régime alimentaire se limita pendant plus de vingt-quatre heures à la sève de Vernonia amygdalia, jusqu’à ce qu’elle montre à nouveau des signes de santé. Le chercheur suça lui aussi un rameau du buisson, le trouva très amer, et se demande toujours aujourd’hui comment le chimpanzé sait que le jus de Vernonia contient des antibiotiques.

Les deux scientifiques semblent d’accord pour dire que les chimpanzés n’excellent pas seulement dans les traitements curatifs, mais pratiquent également des traitements préventifs. Pendant la saison des pluies, en particulier, ils mâchonnent des plantes médicinales qui leur évitent bronchites et pneumonies. Toute cette stratégie fait paraître ignorants les humains, et permet de mesurer la détresse des primates encagés dans les zoos, impuissants à courir la forêt pour trouver la plante qui les guérirait.

Mais ce n’est encore rien, comparé à la théorie avancée par Karen Strier, zoologue spécialiste des primates de l’université de Wisconsin à Madison5. Les femelles, selon Karen Strier, sont prêtes à mâchouiller, au moment où elles vont ovuler et lorsqu’elles semblent désirer une grossesse, un curieux légume appelé oreille-de-singe, produisant un stéroïde facilitant la fertilité.

Les zoopharmacognosistes n’en ont pas encore fini : selon Kenneth Glander (Duke University), les singes du Costa Rica sauraient influencer le sexe de leur progéniture en mangeant des plantes. Ces dernières modifieraient l’équilibre physico-chimique de l’organe récepteur femelle, créant un environnement ionique chargé négativement, fatal aux spermatozoïdes portant les gènes masculins. Une vérification est en cours en laboratoire.

Si la conviction de Kenner Glander devenait certitude scientifique, les hommes accuseraient, par rapport aux singes dont ils sont supposés descendre6, près de quatre millions d’années de retard.


1 Chronique rédigée à partir d’une enquête publiée par la revue Plantes & Bien-Être.

2 Ndlr. Renvoyons ici à l’article « Autoportrait du dromadaire », in Le Cep n°63, p. 85.

3 Le Figaro du vendredi 28 février 1992.

4 Cf. revue Science du 21 février 1992, p. 921.

5 Ibidem.

6 Ndlr. On mesure ici l’incohérence mentale à laquelle s’acoutument les évolutionnistes. En effet, s’il y avait une évolution progressive, l’homme l’emporterait sur le singe ou, plus exactement, il l’aurait remplacé en ayant accumulé des aptitudes supérieures. Or cet article démontre exactement l’inverse : l’instinct animal l’emporte de beaucoup sur l’humain. La raison en est simple : la Chute. Elle a marqué le coupable : l’homme a perdu la science infuse sans acquérir pour autant la sûreté de l’instinct animal. Tandis que l’animal subit lui aussi les affres d’un environnement dégradé, mais sans que ses facultés propres soient diminuées.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

Retour en haut