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Par Pr Henri Joyeux
Pilule et cancers……Le silence coupable1
Pr Henri Joyeux2
Résumé : La pilule a le statut d’un médicament, donc d’un produit de santé. On s’attend donc à ne lui voir que peu d’effets secondaires, surtout qu’en France 2 femmes sur 3 la prennent régulièrement. En réalité les risques connus sont si importants, surtout si elle est prise tôt, que l’AMM (autorisation de mise sur le marché) serait refusée à un médicament ordinaire présentant autant d’effets secondaires : cancer du sein, adénome du foie, thromboses, masse osseuse insuffisante, etc. On se demande si les adolescentes d’aujourd’hui ont mérité la vieillesse que leur a préparée une génération dévoyée par la mythique « libération de la femme ».
Il est très difficile d’obtenir des informations sur l’origine des cancers. Les causes hormonales, bien connues des professionnels de santé, sont les plus dissimulées parce qu’elles touchent à des intérêts économiques énormes. En effet, il existe 40 marques différentes de pilules plus ou moins dosées en hormones, deux stérilets aux hormones et sept au cuivre. Tous ces produits sont utilisés par « près de 2/3 des femmes en France ». Le marché est donc considérable. C’est la raison pour laquelle les vendeurs d’hormones se gardent bien de diffuser les connaissances sur les risques induits par la consommation de ces «médicaments». Le Pr Henri Joyeux n’est pas de cet avis et considère, au contraire, qu’il est primordial d’informer les femmes sur les bénéfices et aussi sur les risques inhérents à la consommation de ces puissants contraceptifs
Votre santé : La pilule peut-elle provoquer un cancer ?
Pr Henri Joyeux : Attention, ne prononcez pas ce mot ! Il ne s’agit pas d’un mot médical.
Nous parlons, nous médecins, d’œstroprogestatifs, de contraception hormonale.
Quelle femme sait que la « pilule » (n’importe laquelle, normo, comme mini) est un médicament puissant ? Vous posez une très bonne question à laquelle il est très difficile de répondre de façon sereine. Et pourtant, cinquante ans après sa découverte, il serait logique d’en faire le bilan sereinement, avec tous ses avantages et tous ses inconvénients. Entre 1965 et 1986, au moins 200 millions de femmes ont utilisé la pilule, et B.V. Stadel, du grand Centre de Bethesda, précise : « Il n’y a pas de précédent dans l’histoire de l’humanité d’une consommation aussi large et longue d’hormones chez les femmes en période d’activité génitale ». Aujourd’hui, il y a, en France, 40 marques différentes de pilules. La contraception est devenue courante, banale, elle est considérée comme la grande conquête du féminisme de la seconde moitié du XXème siècle, la première après le vote des femmes. Elle n’a que cinquante ans mais, comme l’avion ou la voiture, la pilule est devenue incontournable, comme un bien de consommation courante que personne ne peut contester. Il ne faut donc pas avoir peur maintenant d’aller plus loin. Car le THS3 ne peut être responsable des cancers du sein observés de plus en plus souvent à 25, 35 ou 45 ans. En effet, le THS est toujours prescrit vers la cinquantaine.
Affirmer que la pilule puisse être responsable d’un certain nombre de cancers du sein chez des femmes jeunes est actuellement « strictement interdit ». Le sujet est tabou. Aucun cancérologue n’ose aborder directement le sujet : « Après tout, si les filles prennent la pilule de plus en plus tôt, c’est l’évolution de la société, on n’y changera rien…. Il est normal qu’il y ait des risques, elles n’ont qu’à assumer. Notre rôle de cancérologue est de dépister les cancers le plus tôt possible et de les guérir avec le moins de mutilations possibles. »
Les jeunes femmes sont-elles bien informées, notamment sur les bénéfices et sur les risques ?
Vous le savez, la femme est de nos jours consommatrice d’hormones dès son plus jeune âge, à l’adolescence, dès le collège. La contraception hormonale est proposée aux collégiennes !
Ainsi le livre de classe de 3ème des Sciences de la Vie et de la Terre, édité par Nathan en 1999, précise que la pilule est un contraceptif oral. Il existe plusieurs sortes de pilules. Les plus courantes bloquent l’ovulation. L’utilisation de la pilule est simple (généralement une prise quotidienne, mais attention aux oublis). Son action est plutôt bénéfique sur les troubles génitaux et/ou dermatologiques de l’adolescence. En sous-titre, on peut lire : « Efficacité 100 % » et « La pilule est prescrite par le médecin après examen médical général pour éviter l’apparition de complications. Des contre-indications, cardiovasculaires notamment, existent en effet ».
Remarquons qu’il n’y a pas un mot sur les risques que nous verrons bientôt et qui sont pourtant officiels en médecine.
Est-il possible de mieux contrôler les comportements affectifs avec des hormones ?
Voilà le discours ambiant scientifiquement, médicalement et sexuellement correct. S’il était la source d’un grand bonheur pour les jeunes, garçons et filles, nul doute qu’il faudrait le proposer partout. Ceux qui pensent ainsi ont considéré que les distributeurs de préservatifs devaient être mis à la disposition des élèves dans les lycées et les collèges s’il le faut, et, plus récemment, que les infirmières scolaires seraient transformées en distributrices pour les petites qui auraient fait quelques imprudences avec leur copain. On n’a pas osé mettre le planning familial dans les établissements scolaires, c’eut été politiquement mal perçu – mais les mesures prises par une jolie ministre femme qui veut tellement « le bien des enfants » vont dans le même sens. Quant à l’autorisation parentale, qui aurait dû être présentée sous forme de « soutien parental », elle est légalement supprimée.
Toutes ces mesures, au nom de la « souveraine liberté », destinées à être plus cool avec les jeunes, ne font qu’agrandir le fossé d’incompréhension entre les jeunes et les adultes.
On parle de « l’âge ingrat des adolescents », alors qu’il faudrait parler de « l’âge ingrat des adultes » qui ne savent pas comment s’y prendre pour dialoguer avec leurs jeunes.
Ces décisions des adultes, souvent « adulescents », qui dirigent notre société traduisent le même mode de pensée. Une pensée en cohérence avec des concepts scientifiques faux que je résumerai ainsi : « Les médicaments régleront, chez des personnes en bonne santé, les comportements affectifs et leurs dérives, et leur éviteront ainsi à la fois réflexions et responsabilités ». Et l’on n’a jamais eu autant de grossesses d’adolescentes et, dans le même temps, autant d’avortements en France.
A ces concepts, que de plus en plus de femmes considèrent comme suspects pour leur santé physique et mentale, s’opposent les nouveaux concepts écologiques, sans « medicine », au sens anglo-saxon du terme, c’est-à-dire sans « médicament ». Ces derniers ont, aujourd’hui, des bases scientifiques sérieuses.
Mais tout cela, les femmes ne le savent pas, ce n’est écrit nulle part ! Comment fonctionne la pilule ?
Il y a sur ce sujet des enjeux économiques, idéologiques et religieux. Par exemple, parmi les femmes utilisatrices, combien savent qu’une échographie hépatique devrait être réalisée chez toutes celles qui ont consommé la pilule plus de sept ans, à la recherche de tumeur bénigne du foie ? Ces adénomes du foie peuvent se transformer (heureusement rarement) en cancer. On comprend les termes du Pr Lucien Israël, dans sa préface au livre du Dr Helen Grant The Bitter Pill (Amère pilule), publié en 1998 et qu’aucun média audiovisuel n’a évidemment présenté puisqu’il n’y avait pas de « sponsor » : « La manipulation hormonale prolongée des cycles ovariens est nocive et toxique. S’agissant d’autres domaines de la médecine, il est vraisemblable que des produits entraînant de telles conséquences n’auraient jamais reçu l’autorisation de mise sur le marché ».
Parmi les utilisatrices, combien savent comment fonctionne la pilule contraceptive ? Les menstruations régulières observées avec ce comprimé sont totalement artificielles.
Au niveau des ovaires, il n’y a plus de maturation des follicules. L’intérieur de l’utérus s’atrophie pour être impropre à toute nidation. Le mucus fabriqué par le col de l’utérus se modifie, il devient visqueux et épais, pour rendre la glaire cervicale inapte à l’ascension des spermatozoïdes. Les trompes perdent leur mobilité. La période sans pilule dans le mois est de sept jours. Pour les pilules de dernière génération (Mélodia, Minesse) il y a quatre jours sans prise d’hormones, mais on prend quand même un comprimé dit placebo.
Quels sont les effets secondaires dus à la pilule ?
Les thromboses aiguës artérielles ou veineuses peuvent s’observer dès le premier mois d’utilisation, complication la plus redoutable des œstro-progestatifs.
Parmi les thromboses artérielles, l’infarctus du myocarde, l’accident vasculaire cérébral, la thrombose de l’artère centrale de la rétine. Parmi les thromboses veineuses, les phlébites des membres inférieurs. L’installation progressive d’une hypertension artérielle (hypertension franche chez 3 % des femmes prenant la pilule), de migraines, d’une prise de poids évoluant vers l’obésité, un état de prédiabète. L’augmentation des taux sanguins des triglycérides et de cholestérol. Une stase biliaire latente chez les femmes prédisposées et une augmentation du risque de complication inflammatoires de la vésicule biliaire accélérant la formation de calculs. Une augmentation de la formation de tumeur bénigne du foie (adénome ou hyperplasie nodulaire focale du foie) au-delà de sept ans de prise de la pilule.
Peut-elle favoriser l’apparition d’un cancer du sein ?
Concernant les risques de cancer du sein, je cite à nouveau ce que disent les spécialistes, dans la Revue du Praticien d’avril 2000, qui présentent ce sujet pour la préparation aux concours de l’internat : « La prise d’œstro-progestatifs augmente de 25 % environ l’incidence du cancer du sein. Ce risque est augmenté lorsque la prise a débuté avant l’âge de 20 ans. Le risque disparaît dix ans après l’arrêt de la pilule.
(Cette toute dernière affirmation est gratuite, elle n’a jamais été sérieusement démontrée). Les œstro-progestatifs séquentiels risquent d’entraîner une hyperplasie endométriale (dans l’utérus) s’ils sont donnés durant une longue période ».
Il faut savoir que l’hyperplasie endométriale est capable d’évoluer et de se transformer en cancer du corps6 de l’utérus. Pour cette raison, on en parle comme d’un cancer hormonodépendant.
La pilule du lendemain a-t-elle des effets néfastes ?
Il faut ajouter des découvertes récentes qui en étonneront plus d’un : la contraception œstro-progestative « sur une longue période, ferait perdre l’effet bénéfique d’une pratique longue d’un exercice physique », donc favoriserait un contenu minéral osseux plus faible, et la contraception progestative, celle de la pilule du lendemain, « montre un effet néfaste sur l’os, d’autant plus important que la durée d’utilisation a été plus longue, mais aussi que le traitement a été débuté chez des adolescentes plus jeunes, altérant probablement l’acquisition du pic de masse osseuse ». (Contraception orale et os : Références en gynécologie obstétrique, 1999, 6 : 213-217.) Nous suggérons à nos collègues une large étude scientifique qui apprécierait le pic de masse osseuse après plusieurs années de consommation hormonale dès l’adolescence.
L’avortement, en France ou ailleurs, a-t-il diminué en nombre ?
En Angleterre, le Dr Helen Grant fut une « apôtre » de la pilule. Elle contribua avec enthousiasme aux premiers essais anglais, fascinée comme toutes les femmes de l’époque (années 1960-1975) par la fantastique libération pour les femmes qu’apportait la mise au point par Pincus, dans les années 50, de la pilule et les premiers résultats de ses essais sur les femmes portoricaines (les Américains font souvent tester leurs nouveaux médicaments par les hommes ou des femmes de pays ou de zones d’influence où les populations sont en voie de développement).
La large prescription de la pilule, considérée comme sans danger, permettait d’envisager enfin pour les femmes la vraie libération, celle de l’esclavage des grossesses non désirées. L’avortement serait ainsi évité.
Ce furent les deux arguments essentiels qui se diffusèrent partout. Mais, en France, on compte toujours au moins 220 000 avortement légaux chaque année depuis vingt-cinq ans !
Faut-il arrêter la pilule pour allaiter ?
Les différents dossiers scientifiques sur la contraception orale précisent : « En cas d’allaitement, la contraception orale est déconseillée en raison du passage, même faible, des stéroïdes dans le lait et de son effet néfaste sur la sécrétion lactée. »
Les laboratoires qui distribuent la pilule vont dans le même sens que ceux qui font la promotion des laits artificiels maternisés. Curieusement, ils n’évoquent même pas les dangers pour le nouveau-né d’allergies incompréhensibles, d’infections chroniques, en particulier ORL (rhinites, otites, pharyngites à répétition). Le lait maternel reste le meilleur aliment du nouveau-né.
Comment éviter le cancer du sein ?
Evidemment le cancer du sein, comme beaucoup d’autres cancers, est évitable. Mais il faut en connaître toutes les causes. Personne n’est destiné à avoir le cancer. Nous ne sommes pas faits pour être malades, mais pour être en bonne santé au sens de l’OMS : santé globale de tout l’être.
Ce sont les inépuisables capacités de l’intelligence et du cœur humain, féminin et masculin, qui feront avancer l’humanité vers plus de santé, plus de bonheur, plus de joie de vivre, plus d’originalité pour chacun et pour les sociétés, où qu’elles soient situées dans l’univers.
Je reste très optimiste. Le cancer n’est pas inéluctable. Faisons confiance aux formidables complémentarités d’intelligence et de cœur de la femme et de l’homme.
1 Votre Santé n° 28 – janvier 2002. Propos recueillis par Céline Andrillon.
2 Cancérologue et diététicien, le Pr Joyeux enseigne à la Faculté de Médecine de Montpellier.
3 Traitement hormono-suppresseur, souvent prescrit à la ménopause.
6 L’utérus est constitué de deux parties : le col et le corps.